RENCONTRE – Lee Chor Lin, directrice du Musée National de Singapour

A l'occasion de Vision of the east, Asia Through French Eyes qui s'est déroulé ce mois-ci au National Museum, sa directrice Madame Lee Chor Lin, nous parle de l'Art et de la culture à Singapour

Il y a une décennie la scène culturelle de la cité-État était très différente: les musées étaient principalement considérés comme des lieux pour les touristes, les collectionneurs d'art ou les amateurs d'histoire. Un changement s'est opéré en 2006 lorsque le Musée national a rouvert ses portes après une rénovation de deux ans avec la nomination de Ms Lee Chor Lin en tant que directrice du musée. Spécialiste du textile asiatique et de l'art bouddhiste, diplômée d'une maîtrise en histoire de l'Université nationale de Singapour, Ms Lee Chor Lin a pour mission d'aider les singapouriens à apprécier l'art et la culture.

Le Petit Journal.com - En tant que directrice du National Museum, quel est votre regard sur le développement de la culture dans la cité-État ?
Lee Chor Lin - Lorsque j'ai rejoint le Musée National, ma tâche pour les quatre  années à venir était de contribuer à son réaménagement - qui comprend une extension -  en développant la totalité du contenu des galeries sur  l'histoire de Singapour, en élargissant la programmation des expositions internationales et en présentant  un contenu riche et varié au sein de la Cinémathèque du Musée dans un but : gagner plus d'auditoire et rendre l'histoire de la cité-État accessible à tous:  Singapouriens et touristes de passage.  Les nouvelles technologies nous aident au quotidien à donner envie de découvrir le musée seul ou en famille. Notre idée étant que l'on puisse s'amuser tout en apprenant dans un cadre agréable et tranquille.

Diriez-vous que les arts et la culture sont appréciés par la population  singapourienne ? Y a-t-il eu des changements depuis ces dernières années ?
Oui, le comportement des singapouriens envers l'art et la culture a changé radicalement car une nouvelle génération de jeunes gens ont  l'occasion de se rendre à l'étranger notamment pour y étudier.  Ils ont ramené avec eux une perspective différente sur les arts. D'autres voyagent beaucoup et ont une soif d'apprendre et de connaitre davantage. Cette population constitue une audience sophistiquée, très exigeante avec un regard international. Ils sont plus enclins à dépenser de l'argent pour acheter des ?uvres d'art ou aller voir un spectacle ou une exposition. L'art est devenu quelque chose de familier qui fait partie de leur vie.
Dans le même temps, nous sommes conscients qu'il y a encore une partie de Singapour, qui choisit de ne pas aller au musée préférant les centres commerciaux de leur quartier. Donc, notre but est d'attirer ces personnes en nous  appuyant sur la cinémathèque  tout comme les galeries et les expositions temporaires qui ont une place prépondérantes au sein du Musée.

Pourquoi est-ce important de présenter des documentaires, des films anciens au sein du Musée ?
Le cinéma  projeté dans le cadre de la cinémathèque  montre des films, un peu comme le musée montre ses collections et organise ses expositions temporaires.
En effet, les films anciens ou modernes, certains réputés rares car on ne les voit pas souvent, tournent  autour de différentes thématiques.  A l'image de Vision of the east : Asia Through French Eyes, qui montrait la fascination du cinéma français pour le continent asiatique et qui au-delà de Singapour, permettait de mieux comprendre et d'apprendre un peu plus sur ce continent asiatique qui ne cesse de se développer. Les Français ont été des précurseurs dans l'industrie du cinéma et dans la manière "d'enregistrer" leurs expériences. Leurs films ont depuis influencé la manière dont le monde perçoit l'Asie, l'Asie comment elle se voit. À bien des égards, les films français ont aidé à préserver une partie de notre mémoire.
La cinémathèque tout comme le Musée est un temple de la connaissance et du savoir accessible à tous. Les films ont un atout précieux : ils racontent une histoire, ils ont le pouvoir de montrer les choses, de toucher tout  public, jeunes ou moins jeunes. Les images ont pris une place considérable dans notre société et revêtent les formes les plus variées allant de l'?uvres cinématographiques, audiovisuelles et multimédia, elles  font désormais partie de la culture des enfants et des jeunes.

Parlez-nous de la prochaine exposition Dreams and reality du Musée Quai d'Orsay ?
L'exposition "Rêve et Réalité" qui ouvre prochainement dans le cadre du festival français Voilah!, proposera de découvrir les chefs-d'?uvre du Musée d'Orsay sans avoir à voyager jusqu'à  Paris. Les amateurs pourront y admirer des toiles des maîtres de Gauguin à Van Gogh et de Cézanne à Renoir en passant par Ingres ou Manet. C'est un choix de qualité qui présente des artistes français contemporains et classiques que les étudiants  singapouriens notamment pourront découvrir à travers  la peinture mais aussi les arts, la photographie tout ceci associé à  la musique. C'est une approche intéressante qui j'espère attirera beaucoup de visiteurs et surtout la population francophone qui vit à Singapour.

Propos recueillis par Carole Chomat (www.lepetitjournal.com-Singapour) Lundi 17 octobre 2011

Situé au c?ur de la cité-État, le Musée national de Singapour est un joyau architectural où l'art et l'histoire se rejoignent à travers des expositions temporaires, des galeries dédiées à la culture et aux modes de vie d'aujourd'hui  et d'une cinémathèque où de nombreuses vidéos et programmes sont projetés durant toute l'année.
Sous la direction de Ms Lee Chor Lin, le musée a présenté un certain nombre de grandes expositions internationales à Singapour, y compris les «Chefs-d'?uvre grecs du Louvre" (2008), «La quête de l'immortalité: Le Monde de l'Égypte ancienne" (2009) et «Pompéi: La vie dans une ville romaine, 79 CE »(2010). Sans oublier le Night Festival qui a lieu toutes les années et qui compte parmi les événements culturels les plus populaires de la ville. En quatre ans, le nombre de visiteurs au National Museum a triplé.