

L'auteur de théâtre et directeur du Théâtre des Treize Vents, Centre Dramatique National de Montpellier Languedoc est à l'affiche du prochain Festival du Film Français* qui démarre aujourd'hui, avec le film d'André Téchiné dont il est le co-scénariste
Jean-Marie Besset est un auteur de théâtre qui a écrit près de vingt pièces dont Villa Luco (1984), Grande Ecole (1990), Commentaire d'amour (1998), Rue de Babylone (2002), Perthus (2007). Celles-ci lui ont apporté de nombreuses récompenses dont le prestigieux Grand Prix du Théâtre de l'Académie Française, et pas moins de dix nominations aux Molières. La fille du R.E.R. est l'adaptation cinématographique de la pièce de Jean-Marie Besset, écrite en 2005 (R.E.R.). Il en a signé le scénario avec André Téchiné et Odile Barski. Coïncidence, R.E.R. sera à l'affiche du Théâtre des Treize Vents en même temps que le film sera projeté à Singapour, le 2 octobre prochain à l'Alliance Française. Pour l'occasion, nous avons interrogé Jean-Marie Besset sur son travail de scénariste.
Le petit journal.com: Dans une présentation de la pièce, vous faites référence à plusieurs faits divers. Tous présentent des personnages affabulateurs. Qu'est-ce qui vous a intéressé dans ces personnages ?
Jean-Marie Besset : Tawana Bradley en 1987 (Wappingers Falls, NY) ou Marie-Léonie Leblanc en 2004 (ligne du RER D) sont deux adolescentes perdues, deux mythomanes, qui entrent à grand fracas dans l'imaginaire collectif en dénonçant des délits fictionnels à caractère raciste ou antisémite. Sans leurs actes, je n'aurais sûrement jamais croisé la trajectoire de ces vies fragiles et désespérées. Les similitudes des deux affaires m'ont frappé : chaque fois un manque éperdu d'amour ; chaque fois une même solution pour s'en sortir "par le haut" ; chaque fois un mensonge déchaînant des forces immenses qu'on a pu juger "disproportionnées". Leur invention ne leur a peut-être pas permis d'échapper à leur destin ; elle a déchiré le voile qui nous empêchait de voir leurs petites vies.
La transposition théâtre/cinéma impose une réécriture du script initial : Comment avez-vous adapté cette pièce de théâtre pour en faire un scénario ? Quelles modifications avez-vous été amené à faire avec André Téchiné ? André Téchiné s'est approprié l'histoire, en éclatant complètement la pièce. Il trouvait que la pièce était une « pièce-cercle » (avec une dimension "La Ronde" de Schnitzler : a rencontre b, qui rencontre c?). Il voulait faire un "film-ligne droite", esquisser une tangente, une ligne de fuite. Et en effet, le film suit la trajectoire de Jeanne, qui file à toute allure, dans le RER, mais aussi sur ses rollers. Il privilégie la "France d'en bas" : Jeanne, sa mère, son petit ami. La "France d'en haut" (l'avocat juif, l'ingénieur en Chine, sa bien-aimée juive militante) étant au second plan, alors qu'elle est traitée à égalité dans la pièce.
Qu'est-ce qui vous a le plus intéressé dans ce travail de transposition ? Voir comment fonctionne le cerveau d'un grand cinéaste. Le roman est plus proche d'une narration cinéma qu'une pièce de théâtre. J'ai compris à quel point André avait besoin de décomposer ma pièce pour recomposer son film.
André Téchiné est un des grands cinéastes français : comment avez-vous accueilli la proposition d'adapter votre pièce ? Comment votre collaboration s'est-elle passée ? André est un ami. Un proche. Nous avons depuis plusieurs années un dialogue continu. Ça ne va pas sans frictions, grands débats, grandes engueulades. Il me reproche de ne pas donner assez de place à l'inconscient. On peut bouder pendant des heures. Par exemple, un jour que nous traversions la France par l'autoroute, il a arrêté de me parler pendant 400 kilomètres à propos du beau et du bon chez Platon, et de la relation avec Alcibiade. Je ne crois pas que beaucoup d'automobilistes avaient au même moment des conflits sur ce genre de sujet?
Avez-vous d'autres projets d'adaptation cinématographique d'une de vos pièces ? Deux projets, l'un de PERTHUS par le duo Ducastel et Martineau, produit par Catherine Dussart. L'autre de ma pièce LES GRECS, par un jeune réalisateur américain, produit par David Barrot.
Pour découvrir la modernité de l'écriture dramatique de Jean-Marie Besset, la COPAT propose dans son catalogue DVD, deux captations de ses pièces, Rue de Babylone dans une mise en scène de Jacques Lassalle (2004) et Les Grecs, dans une mise en scène de Gilbert Desveaux (2006).
En attendant, précipitez-vous ce samedi 2 octobre, à l'Alliance Française.
Olivier Massis (www.lepetitjournal.com-Singapour) vendredi 1er octobre 2010
* Du 30 septembre au 10 octobre, le Festival de films français de Singapour célèbrera son 26ème anniversaire. 23 films seront à l'affiche dont une spéciale rétrospective Melville. Pour découvrir le programme complet, consultez notre agenda ou le site de l'Alliance



















