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ARTS PLASTIQUES - Les dessous d’une création à quatre mains

Helene Le ChatelierHelene Le Chatelier
Écrit par Clémentine de Beaupuy
Publié le 9 juin 2016, mis à jour le 13 octobre 2019

Comment les choses se passent-elles quand deux artistes décident de créer ensemble? C'est l'exercice auquel se sont livrés Hélène Le Chatellier et Pang. Dans le cadre de l'exposition Autographic Matters, à la galerie Intersections, ils ont créé une installation qui représente les racines et les chemins de vie. Ils reviennent pour lepetitjournal.com, sur ce processus de création à quatre mains.

Conversation au coeur du travail des deux artistes

Tout d'abord, comment vous êtes-vous rencontrés ?

- Hélène Le Chatelier : nous nous sommes rencontrés « artistiquement » lors d'une précédente exposition à la Galerie Intersections, en décembre 2015, dans le cadre d'une exposition collective Small is beautiful qui célébrait les 3 ans de la galerie. Touchée par le travail de Pang, j'ai voulu le rencontrer après l'exposition sans aucune idée de collaboration commune.  Cela a été l'occasion pour nous d'échanger sur nos pratiques artistiques, notre travail, nos recherches artistiques.

- Pang : j'ai connu Hélène d'abord par son travail d'artiste qui avait fait une exposition solo InkMagination I, en juin de l'année dernière. J'avais beaucoup apprécié son travail.  On s'est rencontré personnellement quelques mois plus tard.

Comment s'est déclenchée cette envie commune de créer ensemble ?

- Hélène Le Chatelier : Cela s'est fait très naturellement en fait.  Je pense que, d'emblée, nous avions des points communs et des valeurs communes, sinon cela n'aurait pas pu marcher. En tant qu'artiste, Pang travaille sur le quotidien et l'impermanence des choses dans la vie, les rencontres. Dans mon travail personnel, j'explore plutôt le thème de la mémoire. Nos deux recherches artistiques ne sont pas si éloignées que ça : le quotidien, l'ordinaire, la mémoire. Cela pouvait fonctionner ; Et la galerie nous a contacté pour faire une exposition dans le cadre de VOILAH !. Dans ce contexte, nous avons proposé la création d'une ?uvre commune.  

- Pang : Je pense aussi que notre rencontre avait révélé des points communs entre Hélène et moi : dans nos pratiques artistiques, dans notre parcours individuel. En quelque sorte, la proposition de la galerie nous confortait dans un processus de partage déjà engagé.

Concrètement comment est venue l'idée créative de votre installation ? Comment avez vous travaillé ?

- Hélène Le Chatelier : Lors de nos premières rencontres, j'avais exprimé avec Pang le souhait de faire une installation.  Depuis des années, je ramasse dans la rue des branches d'arbres, je les trouvais esthétiques mais je ne savais pas du tout quoi en faire. Parallèlement, Pang travaillait sur un projet de feuilles en papier. Et quand il a visité mon atelier avec ces branches, il les a trouvées très belles. Je lui ai expliqué ce que j'avais en tête, ce qu'elles symbolisaient pour moi. Les deux éléments s'accordaient parfaitement.

- Pang : Pour résumer notre processus, je crois que notre pratique artistique personnelle nous a guidé vers ce travail commun. Il y avait quelque chose dans mon travail qui faisait écho à celui d'Hélène. Nous avions les mêmes goûts et les mêmes envies au final.

Qu'est qui fait la qualité d'une collaboration artistique ?

- Pang : J'ai pensé souvent à ce qui fait une bonne collaboration entre deux artistes. Je faisais parti d'un collectif d'artistes,  j'avais déjà fait des collaborations artistiques. Et certaines, humainement, ont été catastrophiques. Et puis, j'ai toujours considéré ma pratique comme un canevas qui laissait de la place à d'autres. Souvent les pratiques des uns et des autres peuvent produire des clashs. Ma collaboration avec Hélène a été  très facile. Je pense qu'une pratique artistique est une voix, un moyen de se faire entendre. A deux artistes, cela devient un dialogue et c'est ce dialogue qui s'installe qui m'intéresse.

- Hélène Le Chatelier : j'espère que l'installation que nous montrons est le résultat de nos deux univers. Je ne crois pas qu'un artiste ait pris le dessus sur l'autre. Aujourd'hui quand je regarde l'exposition, je serais incapable de vous dire : cet élément est celui apporté par Pang, celui a été pensé par moi.  C'est une ?uvre réellement commune. Pour moi, c'est ça une bonne collaboration artistique. Et puis, Pang est une personne très respectueuse et qui laisse de la place aux autres. Il a crée une merveilleuse «  boite à bijoux » pour que je puisse m'exprimer. J'avais peur d'être trop directive mais cela n'a pas été le cas.

Comment pouvez vous nous expliquer votre installation commune ?

- Hélène Le Chatelier : je suis très intéressée par ce qui touche aux racines et à la mémoire. Cet arbre, à l'envers évoque cela. Et Pang, travaillait sur ces feuilles et il m'a proposé d'y créer des nervures à l'encre. Je n'étais pas très à l'aise avec cela : utiliser de l'encre sur les feuilles et casser cette blancheur et la délicatesse de son travail.

- Pang : nous avons essayer chacun de laisser de l'espace à l'autre. On était attaché à la couleur blanche et aux feuilles qui tombent.

L'écriture pour vous deux est aussi présente. Comment l'utilisez vous ?

- Hélène Le Chatelier : je dirais que, personnellement, j'ai 2 moyens d'expression dont l'un est plus intime : c'est celui de l'écriture. J'utilise d'ailleurs ma langue maternelle, le français, pour écrire. Dans l'écriture, en l'occurrence un roman,  je crois que l'auteur guide son lecteur. Dans la création plastique, l'artiste a une idée, mais peu importe si elle est semblable à celui qui regarde. Ce qui est important c'est l'émotion transmise.

- Pang : J'aime bien ce que dit Hélène sur l'intimité de la langue. Je parle chinois en famille, avec mes proches. D'ailleurs, le livre que je présente à la galerie Going Home, à part le titre en anglais, fait référence à mes racines chinoises. Pour moi, l'anglais est la langue de l'extérieur, de travail. Et je crois que  cet élément est très spécifique à Singapour. Par contre, pour moi, l'écriture est un médium comme un autre, comme la photo, la vidéo, la peinture.  C'est juste un  moyen de s'exprimer, d'enlever les filtres, de repousser les frontières.

Clémentine de Beaupuy (www.lepetitjournal.com/singapour) vendredi 10 juin 2016

Autographic Matters, InkMaginations II - Jusqu'au 26 juin, la galerie INTERSECTIONS présente une exposition et des performances avec 4 artistes,  June Lee Yu  Juan, Syv Bruzeau, Hélène Le Chateller et Pang, qui explorent chacun avec sensibilité les liens entre traditions et modernité. Détail de l'exposition dans l'agenda
 

clémentine de beaupuy
Publié le 9 juin 2016, mis à jour le 13 octobre 2019

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