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Golden week ... les Chinois, où vont-ils ?

Chinois en vacances à la merChinois en vacances à la mer
Chinois en vacances à la mer
Écrit par Le Petit Journal Shanghai
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 14 juillet 2016

Marée humaine déferlant sur la Grande Muraille pendant la Golden Week, raz-de-marée de bouées multicolores dans les piscines du Sichuan, vagues de "Ooooh" et de "Aaaah" d'admiration devant la mer de nuages des Huangshan? Que celui qui n'a jamais souri devant ces clichés me jette la première pierre ! Lepetitjournal s'est intéressé aux habitudes des Chinois en vacances.

 

Vers une société de loisirs

Considéré comme un plaisir bourgeois sous la Révolution culturelle (1966-1976), le tourisme est longtemps banni par le Parti communiste. Ca n'est qu'à partir des réformes de 1978 que l'on prend conscience de la manne financière que les loisirs pourraient engendrer. Réduction du temps de travail hebdomadaire de 44 à 40 heures en 1995 ; 1996 proclamée année des loisirs et des vacances ; instauration l'année suivante des week-ends non travaillés pour les salariés ; mise en place en 1999 de trois Golden Weeks autour de la fête du printemps, de la fête du travail et de la fête nationale ; réforme en 2007 de ces Golden Weeks et passage à 11 jours de congés annuels... Ce n'est pas encore le Front populaire, mais quelle avancée !

 

Les tribulations d'un Chinois en Chine

En Chine, les touristes sont principalement issus des nouvelles classes moyennes vivant dans les grandes villes du Guangdong, de Shanghai, du Zhejiang et de Pékin. Ils sont entre 300 et 400 millions à sillonner le pays chaque année. S'ils privilégient avant tout ces mêmes destinations, les régions du sud-ouest et du centre (Yunnan, Sichuan, Jinan) ont également le vent en poupe, tandis que les provinces de l'ouest (Xinjiang, Gansu, Qinghai) commencent à tirer leur épingle du jeu. Et contrairement aux idées reçues, les voyages organisés en groupe, en mode "Les jolies colonies de vacances", n'ont plus autant la côte, puisque les Chinois sont de plus en plus nombreux à partir en famille et entre amis. Moins de guides qui s'époumoneront dans leur micro ? Chouette alors !

Pour les Chinois, se faire prendre en photo dans des lieux ou devant des paysages très connus, en prenant systématiquement la pose qui va bien, est presque un sport national ? Oh le joli selfie avec les doigts en V ! En quête permanente de reconnaissance sociale, ce genre de photo leur permet de "gagner de la face". Alors que tout le monde ne peut pas encore s'offrir un séjour touristique, on n'hésitera pas à se faire valoir auprès de ses collègues pour gagner en considération en exhibant ses plus beaux clichés. 

Comment élisent-ils leur lieu de villégiature ?

Plutôt rats des villes que rats des champs, ce qu'ils recherchent avant tout, c'est la modernité des grosses bourgades prospères et surpeuplées, symboles de la puissance économique récente du pays. Peu soucieux de l'authenticité des lieux visités et de la préservation du patrimoine, c'est avant tout beau parce que c'est moderne. Grande Muraille rénovée en fausses pierres, cascades artificielles et autres aménagements factices sont largement vantés dans les brochures touristiques. En outre, parce qu'ils favorisent la sociabilité, ils préfèrent les lieux bruyants et animés ( renao, chaleureux et vacarme). Ça, on avait remarqué !

 

Il y a le ciel, le soleil et la mer

Second critère de sélection, les mingsheng, c'est-à-dire les zones "d'intérêt paysager et historique d'importance nationale". Dans la culture chinoise, on fait la part belle aux shanshui : paysages de montagnes et d'eau, vue sur les nuages, etc. Après la mort de Mao, pour favoriser la construction nationale, c'est même l'Etat qui détermine quels seront les lieux touristiques, comme par exemple les Huangshan, les fameuses Montagnes Jaunes. Les incontournables sont d'ailleurs illustrés sur les nouveaux billets de banque. A la fin des années 1990, un sondage révèle que "62% des personnes interrogées considèrent que seul un mingsheng peut constituer un site digne d'intérêt." Avouez, qui n'a pas sa photo-souvenir brandissant un billet de 20 RMB à Yangshuo, hein ?

Une petite partie de la population commence à élire la plage comme nouveau lieu de vacances, et les pratiques des touristes chinois ne sont pas sans rappeler les nôtres au début du XXème siècle. On se baigne peu - encore faudrait-il savoir nager, alors on n'oublie pas sa bouée ! -, on cache son corps des vilains assauts du soleil pour conserver une peau aussi blanche que possible - le face-kini qui a fait fureur sur les plages de Qingdao l'an dernier, vous vous en souvenez ?-, on privilégie les maillots très couvrants, et on évite de s'allonger sur le sable. L'itsi bitsi petit bikini, ce n'est donc pas pour tout de suite?

 

Des Chinois globe-trotteurs

Des revenus en hausse, les sites touristiques majeurs pris d'assaut, et la pollution atmosphérique des grandes mégalopoles sont autant de facteurs qui poussent les Chinois, passeport en poche, à passer leurs vacances à l'étranger. Selon les chiffres de l'Organisation Mondiale du Tourisme, ils étaient 83 millions, originaires principalement des grands centres urbains (Pékin, Shanghai et Canton), à sortir des frontières en 2012 (ils n'étaient que 10 millions en 2000). Si Hong-Kong et Macao, capitales du shopping et du jeu, restent leurs destinations favorites, de plus en plus de Chinois profitent de l'ouverture de nouvelles destinations sur les compagnies low-cost pour s'envoler vers l'Asie : Tokyo, Bangkok, Phuket,...

Une part grandissante de touristes chinois lorgne désormais du côté de notre vieille Europe : déjà 2,3 millions en 2010. Ils partent généralement pour des séjours en groupe millimétrés : voyages éclair de deux semaines, jusqu'à dix pays traversés, la photo-souvenir à côté des mingsheng célèbres, nuits dans des hôtels quatre ou cinq étoiles, et surtout, un porte-monnaie bien garni ! Car le shopping reste leur activité favorite : en 2012, la Chine devient la nation la plus dépensière avec 75,5 milliards d'euros dépensés à l'étranger. Et la concurrence est rude en Europe pour attirer cette manne touristique. Les pays de l'espace Schengen et le Royaume-Uni l'ont bien compris, puisqu'ils ont allégé ces dernières années les procédures d'obtention de visa. Le Ministre des Affaires Etrangères Laurent Fabius a par ailleurs annoncé le 13 janvier 2014, à l'occasion du 50ème anniversaire des relations France-Chine, que la France délivrerait des visas en 48 heures pour les Chinois.

Sources : geoconfluences, scienceshumaines.com, lexpress.fr, tourismechine.com

Aurélie Costenoble lepetitjournal.com/shanghai (rediffusion)

 

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