Les céladons de Longquan

Qu’est-ce qu’un céladon?

Appelée qingci en mandarin (ce qui se traduit par “porcelaine verte”), le céladon désigne un type de céramique dont le berceau se trouve à Longquan dans la région de Zhejiang, et dont les origines remontent au II-ème siècle de notre ère. Cette céramique se caractérise par une glaçure translucide dans la gamme bleu-vert obtenue grâce à l’introduction d’une certaine quantité d’oxyde de fer lors de la cuisson en réduction (petite quantité d’air). Cette glaçure s’applique sur un grès déjà cuit et qui est un mélange d’argile, de calcaire, de quartz et d’éléments végétaux. La température de cuisson des céladons est savamment maîtrisée alternant les températures plus ou moins élevées.

La cuisson se fait soit dans un four scellé traditionnel au feu de bois, appelé four-dragon dont la température doit être contrôlée à l’aide d’un thermomètre et peut monter jusque’à 1310 degrés, soit - dans les ateliers récents - dans des fours à gaz plus faciles à contrôler.

La gamme de couleurs céladon est toutefois assez riche et ne cesse d’évoluer de nos jours avec les expérimentations des créateurs de Longquan. Les recettes de ces glaçures sont jalousement gardées par les familles de potiers et transmises de génération en génération voire de maître à disciple.

Sachez que le taux de réussite dans une fournée est de seulement 30%!

Les deux grands styles de céladons existants sont le style dit du grand frère (ceux-ci ont des craquelures caractéristiques) ou du petit frère avec une finition lisse couleur vert prune ou gris.

Et comment est-on passé de qingci à céladon, terme utilisé communément en occident? L’histoire nous renvoie au héros du roman pastoral d’Honoré d’Urfé, nommé Céladon et qui a la particularité de porter des rubans verts. Au tout début du XVII-ème siècle le roman, intitulé l’Astrée, connait une grande popularité au même moment que les porcelaines vertes de Longquan d’où l’association.

D'où nous viennent les céladons?

L’apparition des premiers céladons remonte au II-ème / III-ème siècle et à la dynastie Jin. On parle alors de proto-céladons. Durant les siècles suivants, la technique se répand dans d’autres régions - Jiangsu, Hunan, Hubei… Une autre branche se développe également en parallèle en Corée au cours du X-ème siècle et atteint de son côté un haut niveau de finesse dans des tons plutôt bleutés.

L’apogée de l’art des céladons survient pendant le règne de la dynastie Song (X - XIII siècle) pour ensuite décliner progressivement à partir de la dynastie mongole des Yuan (XIII - XIV siècle) lorsque les céramiques deviennent moins travaillées et moins raffinées. La production continue à décliner sous les Ming et enfin sous la dynastie Qing l’art des céladons tombe définitivement dans l’oubli jusqu’à sa re-découverte contemporaine. Les chinois aiment souligner notamment le rôle du premier ministre de la RPC, Zhou En-Lai, grand amateur d’art en général, dans la re-découverte et la restauration de l’art des céladons. La production est relancée dans neuf fours dragon construits par l’Etat dans les années 1950. C’est à cette période que de nouveaux maîtres potiers sont formés. Depuis, la production des céladons est passée essentiellement dans les mains privées des artisans les plus expérimentés et réputés.
Les céladons de Longquan ont été inscrits en 2009 sur la liste du patrimoine immatériel de l’UNESCO.

Que visiter à Longquan?

Visiter Longquan est une expérience très intéressante qu’il vaut mieux répartir sur au moins 2 jours. Il est facile de s’y rendre en prenant le train depuis Shanghai (environ 5h de route).
Depuis la renaissance de l’art des céladons, la ville semble toute entière se développer autour de son art millénaire. 
Il y a le lycée professionnel de Longquan dont l’un des trois départements est spécialisé dans la formation des maîtres de céladon. Après plusieurs années d’apprentissage, un jeune particulièrement doué peut passer sous la houlette d’un maître pour parfaire sa technique et, in fine, souvent trouver sa propre voie et son propre style. Le lycée enseigne toutes les étapes de création depuis le dessin, en passant par le tournage, le tournassage, la cuisson, la décoration, la gravure…. Il dispose également de son propre four dragon dans lequel deux fois par an seulement jusque’à 400 pièces de céladons sont cuites en une fois.

Les maîtres des céladons sont reconnus aux différents niveaux - régional ou national, ce qui définit leur status.

La ville de Longquan a développé un impressionnant quartier résidentiel pour ces maîtres dans lequel ils peuvent acquérir à des tarifs préférentiels de vastes demeures modernes, permettant de combiner l’atelier, l’espace d’exposition de leurs plus belles pièces et la partie privée.

En plus des maîtres des céladons déjà reconnus, il y a partout en ville beaucoup de jeunes designers dynamiques et créatifs, cherchant de nouvelles techniques (dont ils gardent bien le secret) pour des résultats encore plus surprenants. Il est possible de visiter leurs ateliers sur rendez-vous et d’acquérir de belles pièces uniques avec signature et certificat. De plus vous pouvez vous faire livrer ces pièces en toute sécurité directement chez vous à Shanghai ou ailleurs.

Si vous souhaitez faire des petits achats souvenirs ou menus cadeaux à ramener en France, la ville regorge de boutiques de céladons fabriqués au moule, où vous trouverez votre bonheur à des prix plus que raisonnables.

Non loin du quartier des maîtres se trouve le musée des céladons. La bâtisse moderne en forme de four est dotée d’une entrée reproduisant l’intérieur d’un four dragon. Entre la texture des murs, la lumière tamisée et même le crépitement des céladons qui craquèlent en musique de fond, on s’y croirait vraiment. Au fil des expositions vous pourrez admirer et comparer des céladons de différentes périodes historiques mais aussi découvrir en détail le processus de création traditionnelle de ces magnifiques pièces.

En reprenant le train pour Shanghai vous remarquerez que même la gare ferroviaire est dans les tons vert céladon :)

Enfin il faut noter que la ville de Longquan est également connue pour ses épées mais cela est une autre histoire à découvrir dans un autre article.