Longtemps fragilisé par des décennies d’industrialisation accélérée, le Yangtsé incarne aujourd’hui le virage écologique opéré par la Chine. Portée par une volonté politique forte et une planification étatique à long terme, sa restauration s’impose comme l’un des exemples les plus aboutis de transition environnementale à grande échelle.


Le Yangtsé, entre impératif économique et virage écologique
Le fleuve Yangtsé n’est pas seulement un cours d’eau : il constitue l’une des principales artères économiques de la Chine. Il traverse les zones industrielles les plus dynamiques du pays et soutient une part essentielle de la logistique, de l’agriculture et de l’industrie lourde. Pendant des décennies, la stratégie de développement chinoise a privilégié la croissance rapide, souvent au détriment de la qualité de l’eau et des écosystèmes.
La dépollution du Yangtsé ne répond donc pas uniquement à une préoccupation environnementale, mais à une logique beaucoup plus pragmatique : sécuriser l’appareil productif. Une eau fortement dégradée fragilise les chaînes industrielles, augmente les coûts de traitement pour les entreprises et fait peser des risques sanitaires sur les populations urbaines. Pour Pékin, il ne s’agit plus seulement de « protéger la nature », mais de préserver la durabilité de son modèle économique.
Des mesures massives et centralisées
Face à cette situation, l’État chinois a engagé une série de mesures structurantes. Pékin a renforcé son arsenal législatif en matière environnementale, imposé des normes plus strictes en matière de rejets industriels et multiplié les inspections sur les sites sensibles. De nombreuses usines jugées trop polluantes ont été fermées, déplacées ou contraintes d’investir massivement afin de moderniser leurs équipements et de réduire leur impact sur le milieu aquatique.
Parallèlement, la Chine a lancé de vastes programmes de traitement des eaux usées, de restauration des berges et de surveillance numérique de la qualité de l’eau, tout en intégrant les performances environnementales dans l’évaluation des autorités locales, ce qui a profondément réorienté les priorités politiques à l’échelle provinciale et municipale. Dans une approche plus structurelle, les autorités ont également procédé au démantèlement de nombreux petits barrages et ouvrages hydroélectriques sur certains affluents du Yangtsé ; plusieurs centaines d’installations, notamment sur la rivière Chishui, ont été supprimées afin de rétablir l’écoulement naturel des eaux et de favoriser la restauration des habitats aquatiques ainsi que les routes migratoires des poissons.
Où en est le Yangtsé aujourd’hui ?
La qualité de l’eau du Yangtsé se serait globalement améliorée au cours de la dernière décennie. La proportion de sections du fleuve classées en « bonne qualité » serait passée d’environ 82,3 % en 2016 à plus de 98 % ces dernières années, notamment dans les zones urbaines majeures. Le cours principal du fleuve conserverait une qualité de l’eau de classe II pendant cinq années consécutives.
Des signes de reprise de la biodiversité aquatique auraient également été observés. Entre 2021 et 2024, près de 344 espèces de poissons indigènes auraient été recensées dans le bassin du Yangtsé, soit plus d’une trentaine d’espèces supplémentaires par rapport aux périodes précédentes. Certaines espèces considérées à l'heure actuelle comme menacées feraient l’objet de programmes de protection renforcés, et des indices de reproduction naturelle auraient été observés dans certaines zones restaurées.
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