Pour la première fois, les élèves du Club Journal du Lycée Français de Shanghai ont interviewé Didier Pujol, rédacteur en chef des éditions Chine du Petit Journal. Encadrés par Christophe Koeltgen, professeur-documentaliste du campus de Yangpu, Chloé, Julian, Johnny, Minjun et Claire, âgés entre 12 et 14 ans, ont mené l’entretien pour en savoir plus sur les coulisses du métier de journaliste.


Un Club Journal curieux et engagé
Tous les mercredis, juste après la pause déjeuner, le Club Journal se réunit au campus de Yangpu. Sous la direction de Christophe Koeltgen, les élèves développent leurs compétences d’écriture, leur esprit critique et leur goût pour l’actualité. Ce 3 décembre, ils étaient 5 à poser leurs questions à notre journal.
Chloé, 14 ans, s'intéresse au journalisme d’investigation et rêve d'enquêter sur les mystères du sous-sol de l'école. Julian, 12 ans, jeune Chinois qui fait des progrès spectaculaires en français et rédige pour l’instant en anglais. Il a déjà écrit sur un champion d'échecs. Johnny, 12 ans et demi, auteur d'articles historiques, mène en ce moment l'enquête sur la tribu gauloise dont serait issu le célèbre Astérix. Minjun, 13 ans, est francophone d’origine coréenne. Il explore l’univers des jeux vidéo et leurs impacts sur les jeunes. Claire, 14 ans, passionnée d’écriture, s’intéresse à Louis XIV et à l’énigme du masque de fer.

Notre journal se doit d'être impartial
Chloé : Est-ce que Lepetitournal.com parle de questions politiques et couvre les grandes crises ?
Notre journal parle de tout, mais sans prendre position. En particulier en Chine, il est malvenu pour des étrangers de commenter des sujets de politique nationale. Même pour les élections de la communauté française, nous donnons donc des informations factuelles : les candidats, les programmes, les dates, mais ne prenons jamais parti ni ne donnons notre avis.
Quand Emmanuel Macron visite la Chine comme en ce moment, nous donnons le contenu de ses déclarations, expliquons comment il a été reçu et quelles décisions ont été prises, mais nous refusons d’analyser.
Bien sûr, nous couvrons les grandes crises : ainsi le récent incendie meurtrier à Hong Kong a-t-il été couvert en priorité lorsqu'il s'est produit, prenant la une du journal par rapport aux sujets moins urgents. La pandémie du COVID qui a frappé la communauté francophone a largement occupé nos équipes car ses développements étaient de première importance pour nos lecteurs… Nous sommes d'ailleurs beaucoup sollicités par les médias nationaux car lepetitjournal.com dispose du plus grand réseau de correspondants locaux, couvrant 75 villes dans le monde. Nous sommes donc au plus près de l'actualité internationale.

Chaque article doit être utile aux lecteurs
Julian : Quel est votre quotidien au travail ? Décrivez-nous votre journée type.
En général, je commence par les réseaux sociaux : je sélectionne les actualités importantes pour nos abonnés, puis je les redistribue pour qu’elles soient le plus lues possible.
Je passe ensuite à l’édition des articles du lendemain, ce qui occupe une bonne partie de la matinée. L’après-midi est consacrée aux rendez-vous : partenaires, interviews, événements communautaires. Le soir, nous sommes parfois invités à des spectacles ou des rencontres, où nous réalisons aussi des interviews et des articles.
Johnny : Est-ce que vous vérifiez tous les articles avant leur publication ?
Absolument. Au-delà de l’orthographe — aujourd’hui très bien prise en charge par les correcteurs ou l’intelligence artificielle — il faut vérifier que l’article est utile, pratique, documenté avec suffisamment de chiffres, dates ou noms pour être utile à nos lecteurs. Je renvoie parfois le texte au journaliste pour qu’il précise les éléments nécessaires : adresses pour les sorties, dates pour la politique, auteurs des citations… Il ne doit y avoir aucune ambiguïté.
Toutes les informations doivent être vérifiées
Minjun : Justement, avez-vous des conseils pour distinguer une fausse information d’une vraie ?
Les réseaux sociaux diffusent souvent des informations spectaculaires qui doivent absolument être vérifiées. Quand une source est inconnue ou qu’un titre est trop accrocheur, c’est mauvais signe. On vérifie donc si d'autres articles existent sur le même sujet. Si l’information est isolée, farfelue ou trop surprenante, il y a de fortes chances pour qu’elle soit fausse. Pour les photos, c’est pareil : tel ou tel “monstre marin” aux dimensions inhabituelles vu dans un endroit très fréquenté relève sûrement d’un montage. Les fausses informations écrites sont encore plus courantes. Il faut toujours contextualiser les news, vérifier que les données ne sont pas partielles. Et en cas de doute, on ne publie pas.
Comment trouvez-vous vos sujets ? Est-ce qu’il vous arrive d’être à court d’idées ?
Chaque semaine, nous avons une réunion de rédaction. Nous listons les actualités, les événements importants, les informations à ne pas manquer. Quand il n’y a pas de “news”, nous publions des articles historiques, culturels, pratiques ou des portraits de membres de la communauté. Le monde est assez riche pour ne jamais manquer de matière.
Privilégier l'information sur la forme
Claire : Combien faut-il être pour écrire un article et combien de temps cela prend-il?
Il n’y a pas de règle : on peut écrire seul ou à plusieurs. Parfois deux journalistes veulent traiter le même sujet, alors ils se répartissent le travail. Sur un sujet historique, par exemple, on peut imaginer une première partie générale, une seconde sur la vie d’un personnage comme Louis XIV, et une troisième sur les expositions ou musées qui lui sont consacrés. Un même article peut aussi intégrer plusieurs interviews autour d’un même événement. Plusieurs contributeurs, c’est souvent plus riche du fait des différents angles de traitement !
Il faut entre 30 et 40 minutes pour écrire un article en ligne, mais la collecte des informations prend au moins le même temps, sans compter la préparation de questions et un éventuel déplacement. Nous essayons donc d'optimiser notre temps en envoyant les questions à l'avance, en collectant les réponses à distance, par écrit ou par messages, visio ou audio enregistrés. Cela permet de nous focaliser sur les informations brutes et d'automatiser les tâches chronophages sans réelle valeur ajoutée. C'est l'information qui compte, la forme ne doit pas être la priorité d'un journaliste.
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