Retour sur les élections consulaires avec le référent Amérique Latine Caraïbes de la République en Marche. Dans cette région du monde, son parti a fait “chou blanc“, mais il reste confiant pour 2022.
Hubert Maguin, comment expliquez-vous les résultats de la République en Marche au Brésil et en Amérique latine ? Vous avez des élus dans le monde entier, sauf ici.
Le challenge a été rempli pour la République en Marche au niveau mondial. On sort avec 85 élus, ce qui est, grosso modo, l’objectif qu’on s’était fixé, environ 20% des postes à pourvoir. On partait de zéro, c’est vrai qu’on ne pouvait donc que progresser. Mais en Amérique latine et Caraïbes, on a fait chou blanc, on a aucun siège, et c’est une déception.
Parfois cela s’est joué à quelques voix seulement, vu la faible participation, qui rend difficile de tirer des enseignement. La représentation des Français de l’étranger souffre encore d’un manque de notoriété. Cela explique aussi notre difficulté à faire campagne. On a été en position de challengers face à des formations (y compris des listes faussement indépendantes) qui bénéficient de réseaux, de connexions, qui sont bien implantés. Cela dit c’est vrai qu’on est en dessous des attentes qu’on avait.
A lire aussi : Cartes redistribuées par les consulaires : nouvelle donne pour les sénatoriales ?
Pour nous l’explication principale, c’est qu’on n’a pas réussi à différencier En Marche de la députée de la circonscription, Paula Forteza. Les gens ont fait l’association avec Paula, qui s’est moins investie ici depuis 2019, depuis son départ de LREM et sa candidature aux élections municipales à Paris. C’est quelque chose qui a négativement impacté le mouvement sur la zone.
On s’est pourtant distancié d’elle à l’époque où elle s’est présentée à Paris. On a communiqué dessus, on a dit sur les réseaux sociaux que c’était une attitude non compatible avec la représentation des Français d’Amérique Latine et des Caraïbes, et on a même perdu tout contact avec elle. Mais visiblement, on n’a pas réussi à bien l’expliquer, à bien montrer qu’il y avait un parti En Marche en dehors de Paula Forteza.
A vous écouter, c’est comme si vous aviez trouvé votre bouc-émissaire. Pour vous, il n’y a pas d’autres éléments d’explication à votre contre-performance, des éléments contextuels, locaux, comme certaines mesures prises, ou non prises, sur les voyages, la vaccination…?
Pour nous c’est le principal motif. Mais il y en a d’autres également bien sûr. On est les représentants du parti gouvernemental et c’est toujours une position inconfortable. On a pâti du mécontentement des français d’Amérique Latine sur les mesures qui ont été annoncées, notamment les restrictions de voyage.
Je rappelle quand même que la France a été l’un des pays qui a le plus aidé ses ressortissants à l’étranger pendant la pandémie, avec des aides et un plan d’urgence pour les Français de 240 millions d’euros qui ont été mis sur la table. Il y a assez peu de pays qui ont eu des dispositifs aussi amples.
Il y a eu surtout une erreur de communication à destination des français du Brésil.
Maintenant c’est vrai qu’il y a eu ce mécontentement lié aux restrictions de voyage. Il y a eu, j’en conviens, surtout une erreur de communication à destination des Français du Brésil. Le fait de suspendre les vols du jour au lendemain sans beaucoup d’explication a été assez mal vécu par nos compatriotes, même si ça a été une mesure temporaire, et que ces restrictions ont été adoptées en réalité par tous les pays d’Europe, pas par la France seulement.
Moi-même, je n’ai pas été non plus content au moment où les frontières ont été fermées. Je pense qu’il y a eu une erreur de communication. C’est aussi une décision qui a été prise à un moment où il y avait beaucoup d’incertitudes. Dans cette période de pandémie, on est obligé de prendre des décisions un petit peu par tâtonnement. On était à un moment où on avait ce nouveau variant qui émergeait, où on était dans uns phase très ascendante des contaminations et des morts au Brésil. La campagne de vaccination n’avait pas encore vraiment démarré en France, on avait aucune évidence que le vaccin était efficace contre le variant, et il y a eu cette décision qui a sans doute été disproportionnée et qui a d’ailleurs été temporaire.
Il y a eu une erreur de communication et peut-être une erreur sur le fond qui a généré de la frustration et du ressentiment contre En Marche à ce moment-là, c’est vrai.
Et alors maintenant, comment préparez-vous les échéances électorales de 2022 ?
Pour nous la première échéance, ce sont les élections sénatoriales en septembre prochain. On a perdu une bataille, mais pas la guerre. Il y a plusieurs conseillers consulaires sans étiquette qui sont proches de nos idées. On va donc faire campagne activement pour ces élections.
Ensuite, l’impératif pour 2022, c’est de se remobiliser, de rester actifs sur le terrain, de préparer la campagne, de ramener à nous des personnes qui souhaiteraient militer, qui souhaiteraient s’engager pour En Marche et la majorité présidentielle dans l’optique de 2022. J’en profite pour lancer un appel pour que toutes celles et tous ceux qui se sentent proches de nos idées nous rejoignent.
Vous êtes inquiet ?
On n’est pas forcément inquiet. On voit juste qu’on a du chemin à faire. Ce résultat des élections consulaires a été une surprise pour nous, mais aussi pour d’autres formations. En Marche a gagné toutes les élections en Amérique Latine depuis sa création : présidentielle, législatives, Européennes (avec la liste Renaissance). C’est donc un peu une cassure. Sans doute encore une fois l’effet Covid et le désamour de mi-mandat qui touche les partis de la majorité.
Je reste convaincu que la République en Marche est toujours un mouvement politique différent des autres.
En Amérique latine, on fonctionnera au diapason de la campagne présidentielle dès qu’elle sera lancée en 2022. Beaucoup d’initiatives se préparent, notamment le dispositif des « causes » qui permet à des porteurs de projets, des citoyens, de porter une cause pour le mouvement et de rassembler autour de lui des gens qui ont les mêmes idées, et qui ont envie de porter les mêmes projets.
Bien évidemment, ce dispositif des causes, ce sera un instrument de la campagne présidentielle, un des outils, et on compte prendre toute notre part.
Qui sera candidat ici aux législatives ?
C’est une question qui est ouverte. C’est un process qui n’a pas du tout démarré dans le mouvement. Il y aura une procédure de désignation qui sera organisée par le parti comme elle avait été organisée par le mouvement en 2017. Pour le moment, ce n’est pas le sujet. On n’a pas de calendrier fixé.
On est dans une problématique qui est celle d’En Marche à tous les niveaux, peut-être plus saillante chez nous, de transformer l’essai de 2017, donner au mouvement un vrai ancrage local, constituer un vrai réseau de militants qui soient présents, motivés, engagés pour nous aider à faire campagne.
Est-ce que l’enthousiasme des débuts n’est pas retombé ? Est-ce que vous n’êtes pas devenu un parti comme les autres ?
Je ne pense pas que LREM soit devenu un mouvement politique comme les autres. Je pense qu’on continue à faire de la politique différemment. Les gens ne sont pas dupes. Je pense qu’on continue à être un mouvement qui se positionne comme étant un mouvement ni de droite ni de gauche, un mouvement plus pragmatique, avec moins d’idéologie, c’est ça qui m’attire et qui me fait militer à LREM. Cet ADN ne s’est pas perdu.
Ça fait 5 ans que le parti d’Emmanuel Macron est en responsabilité, et il va falloir désormais montrer que LREM peut avoir un projet innovant de nouveau en 2022, peut continuer à ramener de nouveaux thèmes et de nouvelles manières de faire de la politique comme le projet des causes. Ça va être ça l’objectif. Je reste convaincu que LREM est toujours un mouvement politique différent des autres et qu’il a encore sa carte à jouer pour l’année prochaine.