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Au Morro do Fubá, l'ONG Terr’Ativa crée du lien

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Écrit par Anne Pouzargues
Publié le 15 décembre 2020, mis à jour le 18 décembre 2020

L’association franco-brésilienne accompagne 85 familles au sein du Moro do Fubá, dans la Zone Nord de Rio. Soutien scolaire, activités culturelles et sorties sont proposés aux bénéficiaires, dans le but de les aider à mieux s'intégrer à tout l’espace de la ville.

« Sur notre liste d’attente, il y a une centaine d’enfants… certains n’auront une place que lorsqu’ils seront déjà des ados, » nous confie Justine Laborde, directrice de l’ONG franco-brésilienne Terr’Ativa depuis 6 ans. Preuve que l’action de l’association dans le quartier est nécessaire et continue d’attirer de plus en plus de monde.

Nous sommes au Moro do Fubá, dans le quartier de Cascadura, la Zone Nord de Rio de Janeiro - loin des plages et du Pain de Sucre, ce quartier est délaissé par les pouvoirs publics, mais aussi par les organisations humanitaires, qui, si elles se bousculent dans d’autres grandes favelas telles que Rocinha ou Vidigal, sont ici presque inexistantes. Terr’Ativa est en effet la seule ONG du quartier.

Implantée depuis 20 ans, cette association franco-brésilienne accueille des enfants, des adolescents, et, depuis peu, des femmes, dans des programmes ayant pour but de « promouvoir l’égalité des chances. » Les participants bénéficient, selon leurs âges, de cours de soutien scolaire, d’ateliers culturels ou de formations liées à l’actualité, telles qu’apprendre à reconnaître les fake news. Dans un contexte où l’Eglise évangélique a un pouvoir fort, l’association forme également les jeunes à l’éducation sexuelle, sujet tabou dans la cellule familiale.

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Cours de soutien scolaire pour enfants de 9 à 11 ans.

« S’approprier les espaces »

Mais un des piliers majeurs de Terr’Ativa, c’est surtout l’organisation d’une sortie culturelle par mois, dans une volonté de contrer l’éloignement, aussi bien géographique que culturel et social, qui existe entre le quartier et le reste de la ville. « Le but, c’est vraiment de s’approprier les espaces. On veut créer un sentiment d’appartenance à la ville, » nous explique Justine.

La plupart des jeunes pris en charge ne sont que peu, voire jamais sortis de la favela. Il faut dire que les transports en commun sont chers à Rio : le prix d’un ticket de bus représente 1h de travail au salaire minimum.
Alors l’association essaie de combler cette fracture : sortie au musée, au Corcovado, spectacle de danses, théâtre… Terr’Ativa permet à ses bénéficiaires de découvrir une « réalité autre celle du Moro, » de favoriser les échanges entre les différents quartiers, et, ainsi, de créer du lien.

Un contexte sécuritaire complexe

L’implantation ancienne de l’association lui permet de passer au travers de la milice, qui prélève une taxe auprès de chacune des familles du quartier. Mais le contexte sécuritaire instable de la favela rend l’avenir incertain, surtout depuis que la milice – des paramilitaires ou anciens policiers corrompus – a commencé à faire alliance avec les trafiquants de drogue.

C’est le caractère social et bénéfique de Terr’Ativa qui peut lui permettre de continuer à passer entre les mailles du filet. Les success story sont nombreuses, et les jeunes qui sont passés par l’association réussissent souvent à continuer leurs études ou à suivre des formations. C’est le cas de Clayton : après avoir été bénéficiaire de l’association, le jeune homme a réalisé son rêve de suivre une formation de maquillage. Désormais maquilleur, il s’occupe aussi de la communication de l’association.

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Justine et Dandara dans la bibliothèque.

Le futur et l’après-covid

Transportant d’un bâtiment à l’autre des tables, des cartons – et une console Wii, donnée récemment à l’association et qui sera offerte aux enfants à Noël – Justine semble ne pas arrêter une seconde. Il faut dire que diriger l’association est un travail prenant. Toujours à la recherche de nouvelles sources de financement, Justine est à la tête d’une ONG qui ne cesse de grandir – et où les nouveaux projets et défis sont nombreux.
« Déjà, il a fallu s’adapter au contexte de la pandémie », explique Justine. « Les cours sont passés pendant six mois en ligne, mais l’accès à Internet est très limité dans la communauté. » Depuis octobre, les activités en présentiel ont repris, mais tous les groupes ont été divisés par deux.

Malgré tout, le covid n’a pas mis un frein à l’agrandissement de l’ONG. Terr’Ativa dispose désormais d’un deuxième bâtiment, comportant bibliothèque, salle de classe et terrain de sport sur le toit. Ce week-end a lieu son inauguration officielle, lors de laquelle un artiste viendra peindre une fresque sur la façade.

Et les projets de développement sont nombreux : parmi eux, des partenariats avec les nombreuses écoles de samba de la région. « On aimerait former des étudiants, pour qu’ils soient maquilleurs ou costumiers, qu’ils puissent participer à l’art de la samba. Notre impact individuel est très fort. Nous aimerions maintenant augmenter l’impact communautaire, en étant toujours plus ouverts vers l’extérieur. » Toujours dans le but de créer du lien.

Plus d'infos sur le site de l'ONG Terr'Ativa.

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