Réunis à Astana ce mardi, les dirigeants de la Chine et des cinq républiques d’Asie Centrale que sont le Kazakhstan, le Kirghizstan, le Tadjikistan, le Turkménistan et l’Ouzbékistan, ont entériné un cadre de collaboration longue durée. Cet accord prend la forme d’un traité de “bon‑voisinage permanent et coopération amicale”, soutenu par des engagements budgétaires, des projets d’infrastructure et des mécanismes institutionnels renforcés.


Pourquoi ce rapprochement ?
Dans un contexte que de tensions tarifaires avec les États-Unis et de redéfinition des alliances internationales, la Chine cherche à sécuriser ses échanges et ses approvisionnements dans une région riche en énergie et minéraux, tout en diversifiant ses routes commerciales à travers les Nouvelles Routes de la Soie. Après une hausse de 10,4 % du commerce bilatéral avec la région et un total de 286,4 milliards de yuans entre janvier et mai 2025 , la Chine vise également à soutenir les ambitions de développement des pays centraux, notamment via un versement de 1,5 milliard de yuans en subventions cette année.
De leur côté, les États d’Asie Centrale, actifs dans les structures “Belt and Road”, s’appuient sur la Chine comme premier partenaire commercial : 58 accords pour 24 milliards de dollars signés lors du forum d’Astana, avec un portefeuille de 224 projets estimé à 66,5 milliards $ et plus de 50 000 emplois générés. Le Kazakhstan, notamment, ambitionne de porter à 100 milliards $ son commerce bilatéral avec la Chine.
Comment la Chine structure ce rapprochement ?
Depuis le premier sommet Chine-Asie Centrale tenu à Xi’an en 2023, un cycle bi-annuel de rencontre entre l’Empire du milieu et la région s’est instauré. Celui d’Astana a permis la naissance du traité de « bon-voisinage », accompagné du lancement de centres de coopération, notamment pour lutter contre la pauvreté, renforcer les échanges éducatifs, lutter contre la désertification et développer des outils de simplification des échanges commerciaux.
Sur le plan logistique, l’accent a été mis sur l’accélération de grands projets : modernisation des routes, des voies ferroviaires et des ports ; ouverture de nouveaux vols directs ; assouplissement des visas et création envisagée de consulats . Le projet phare reste la ligne ferroviaire Chine–Kirghizstan–Ouzbékistan, désormais lancée et financée conjointement, visant à réduire de 7 à 10 jours le trajet des marchandises chinoises vers l’Europe.
Quels enjeux pour l’avenir ?
Pour la Chine, ces avancées sécurisent un accès direct aux matières premières comme le gaz et les minéraux que sont l’uranium ou le cuivre entres autres, réduisant ainsi la dépendance de la Chine à la Russie. Traditionnellement, une grande partie des échanges commerciaux terrestres entre la Chine et l’Europe, ou entre la Chine et certains pays d’Asie Centrale, passent par le territoire russe, en grande partie via le corridor transsibérien. Multiplier ses voies d’accès terrestre permet à la Chine de réduire les risques de perturbations logistiques dans le contexte de la guerre Russo-ukrainienne. Cette coopération accrue avec les pays d’Asie Centrale lui permettent aussi de renforcer son poids diplomatique, notamment à travers la lutte coordonnée contre le terrorisme, l’extrémisme et la cybercriminalité .
Pour les cinq pays, ce rapprochement stratégique leur permet d’obtenir des financements dans des secteurs comme les énergies renouvelables, l’agriculture ou la haute technologie. En janvier dernier, la Banque Asiatique d’Investissement dans les Infrastructures (AIIB), largement financée et pilotée par la Chine, a approuvé un financement de 270 millions de dollars pour la première phase du projet hydroélectrique de Rogun au Tadjikistan, visant à fournir une électricité propre et abordable à environ 10 millions de personnes. En mai, un centre d’innovation en hydrogène a été établi à Kurchatov, en partenariat avec la China Energy Overseas Investment Co. et l’Université Jiaotong de Shanghai, dans le cadre de la stratégie énergétique nationale du Kazakhstan.
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