Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

EXPérience EXPatrié : le témoignage de Laurent Germes en Nouvelle-Calédonie

des valises dans un hall d'entréedes valises dans un hall d'entrée
Écrit par Lepetitjournal Nouvelle-Calédonie
Publié le 9 octobre 2021, mis à jour le 15 octobre 2021

La beauté du mot « expatrié » du grec : exo « en dehors de » et : patrida « le pays » est surtout qu’il dépasse une définition unique. Ce mot est propre à celui qui le vit et qui le fait sien. Et bien que la Nouvelle-Calédonie soit la France : elle est un bout de France qui nous transforme quand on la découvre la première fois, et qu'il faut apprivoiser pas à pas, au fil des mois et des années.

 

Aujourd’hui, c’est Laurent Germes qui nous partage son expérience d’expatrié en Nouvelle-Calédonie : 

 

Tellurique. C’est le mot qui me viendrait plus tard pour tenter d’expliquer ce sentiment d’alignement et de résonance quand je poserais le pied en Nouvelle Calédonie, contre toute attente, un jour d’aout 2016.  La raison doit être “tellurique”.

Deux ans plus tôt, j’ai créé ma petite société de services aux entreprises. J’alterne les voyages entre Paris et Milan pour un projet qui touche à sa fin et prépare doucement la suite …puis un coup de fil sorti de nulle part: on cherche quelqu’un avec mes compétences…à Nouméa. Connais pas, c’est où? Ah quand même… La directrice du projet est justement de passage à Paris, mais elle repart vite. La fenêtre de tir est étroite. On se voit et c’est le verdict: démarrage, mais idéalement mercredi de la semaine prochaine (on est mardi). Les choses s’enchaînent très vite: en sortant je croise quelqu’un qui cherche justement un appartement dans mon quartier pour un temps. Je lui sous-loue le mien illico, range tout ce que je peux dans des boîtes et une semaine plus tard me voici avec 3 valises, partant pour 26h de vol(s) direction Nouméa.

 

J’arriverai de nuit au Ramada. La chambre est un peu vieillotte mais confortable. Elle donne sur un hippodrome. C’est sympa.

Au gré des jours je découvre cette ville. La lumière du pays, la terre ocre, la végétation particulière, la mixité des habitants, la saisonnalité des fruits et légumes, la taille des insectes.

Des personnes que je ne connais pas me sourient et me disent bonjour… une expérience qui, en bon Parisien que je suis, me surprend et m’apaise. Au bureau, on fait attention à chaque déchet et on fait des “ petits samoussas” avec les sacs plastique, “qu’on ne jette pas bien entendu” : on prend soin de cette île qu’on aime beaucoup… et il y a de quoi: chaque levé de soleil est splendide et donne envie de se lever encore plus tôt, je n’ai jamais été aussi matinal. Les couchers de soleil le sont encore plus et marquent le début de soirées entre amis avec des gens bien dans leur peau, peau qu’ils n’ont pas peur de montrer, quand la tendance en métropole est plutôt à l’inverse et que la plupart de mes amies craignent désormais de mettre une jupe…si elles voyaient ça. Anse Vata, Paita, Uitoe, …je participe à divers événements.

Je découvre la vie sur la baie des citrons et comprends assez vite pourquoi on limite la vente d’alcool les week-end... Mais le pays est beau et vite sauvage. Le lagon encore plus. Plusieurs plongées me font découvrir ses occupants, dont certains un peu grands à mon goût. Sur la route ou en mer, en somme, tout est beau et brut, mais le danger jamais très loin. On compte d’ailleurs un nombre d’accidents élevés sur la route et des disparus en mer dont “le sort ne fait pas trop de doute vu la zone où ils sont tombés”. Je perds mes repères à chaque discussion. Mais je me sens là où je dois être. En phase. Sans explication. Bien sûr aux yeux de certains je suis un Zor, j’entends ici et là des accents communautaristes, mais dans l’ensemble il y a cette bonhommie, cette gentillesse des gens, cette ouverture placide à l’autre qui revêt une importance cruciale et bâtit une qualité de vie au quotidien. Et puis il y a Manon, avec ses deux billes bleues en guise d’yeux. Non pas qu’il y ait une idylle, on est visiblement tous les deux sensibles au genre féminin, mais cette bouille de 20 ans ma cadette m’a adressé la parole avec curiosité un soir et a une gaieté de vivre qui me fascine.  Tous en fait, à leur manière, ont une intensité spéciale.  C’est peut être mon regard, mais la sensation est là. Celle d’être vivant pour de vrai, avec d’autres chanceux qui le sont encore plus…et d’être au bon endroit.

 

La mission nécessite un retour en métropole. Massy-Palaiseau, autre ambiance. Une semaine plus tard, des kalachnikov dans Paris font se planquer les fêtards en terrasse, puis la vie continue. J’apprendrai quelques mois plus tard que je ne retournerai pas à Nouméa pour raisons budgétaires. Jamais vraiment parti dans ma tête, plutôt qu’expatrié de passage, je me sens désormais comme un calédonien exilé.

 

 

Si vous aussi vous voulez partager votre expérience d'expatrié en Nouvelle-Calédonie n'hésitez pas à contacter la rédaction à cette adresse : nouvelle.caledonie@lepetitjournal.com 

 

Flash infos