Success story, un ensemble de deux mots qui riment avec États-Unis. En partenariat avec USAFrance Financials, cabinet de gestion privée spécialiste des problématiques patrimoniales de la communauté française aux États-Unis, nous vous invitons à lire le parcours extraordinaire de ces femmes et de ces hommes installés aux États-Unis.
Aujourd’hui, nous avons rendez-vous avec Joachim Garraud qui signe un nouvel album avec Chris Willis et dont la sortie est toute proche. De Paris à Los Angeles, en passant par le Japon, portrait d’un DJ, d’un artiste, libre, « artisan » dans sa création, aux mille collaborations incroyables. Un homme tout en humilité. Au volant de son nouveau projet, LA Good Vibe.
Joachim Garraud, naissance d’un artiste
Il est tombé dedans quand il était enfant. Joachim Garraud grandit à Nantes, entouré de parents évoluant eux-même dans le milieu artistique. « Ma mère avait repéré que j’aimais bien la musique. Tout jeune, je tapais déjà le tempo, » explique Joachim Garraud. Très tôt, sa mère l’inscrit alors au Conservatoire de musique. Il évolue dans un élément qui ne le quittera jamais, la musique. Cet art majeur qui façonnera un homme libre.
« J’ai grandi, je suis devenu un ado, avec cette passion de la musique. J’ai commencé à collectionner les disques, je faisais du baby-sitting et je lavais les voitures des voisins pour gagner de l’argent et acheter du matériel. J’ai ainsi monté, petit à petit, ce que l’on appelait une disco mobile, une discothèque que l’on pouvait bouger avec trois spots qui clignotaient » sourit l’artiste. Si depuis le milieu des années 90, Joachim Garraud collabore avec les plus grands artistes, c’est en animant les boums des copains qu’il a commencé, sans le savoir, une brillante carrière internationale. « J’étais le garçon de 15 ans qui était le mieux équipé, donc je venais passer les disques dans les soirées et anniversaires des copains. J’ai basculé dans l’univers professionnel en 6e, » explique-t-il, très amusé, « j’avais deux copains, David et Nicolas, qui avaient leur anniversaire le même week-end. David est venu me voir en me demandant d’animer sa soirée, mais je lui ai expliqué que j’allais déjà animer l’anniversaire de Nicolas. Il a sorti une phrase qui a changé le cours de ma vie ‘Que te donne Nicolas ?’, ce à quoi j’ai répondu ‘rien’. Il m’a proposé 5 francs pour venir animer sa soirée. Du coup, Nicolas m’a proposé 8 francs, c’est ainsi que j’ai commencé ma première date professionnelle avec un rapport à l’argent ». Au final, le jeune Joachim anime les deux soirées et encaisse son premier cachet d’artiste. « Trente-cinq plus tard, tu te retrouves sur scène avec les Red Hot Chili Peppers ou Jamiroquai, et tu es payé des dizaines de milliers d’euros, pour faire exactement la même chose ». Si l’anecdote est amusante, elle a tracé la carrière de l’artiste.
Adolescent, Joachim Garraud se passionne pour la musique électronique, qui est alors à ses prémices. « Je n’ai jamais considéré cela comme un métier, mais comme une passion, quand tu fais quelque chose avec ton coeur, tu n’es jamais fatigué, tu peux le faire vingt heures par jour. »
Après avoir créé une radio pirate à Nantes , Joachim est embauché par NRJ qui vient d’ouvrir une fréquence dans la ville. Il est alors en 3e. « J’avais accepté le créneau que personne ne voulait, de 1 heure à 6 heures du matin et après, j’allais en cours où des professeurs me charriaient parce qu’ils m’avaient entendu le matin même sur l’antenne. Du coup, j’ai redoublé ma seconde à cause d’NRJ ». La chance de Joachim : des parents qui le laissent vivre sa passion. Il leur rend bien. « J’ai passé mon Bac B et j’ai obtenu un DEUG de Sociologie, parce que cela faisait plaisir à mes parents, mais l’école n’était pas mon cheval de bataille. Très rapidement, ma passion est devenue une source de revenu très importante ». L’été de ses 18 ans, il fait sa première saison de DJ, à savoir 90 nuits d’affilées, du 15 juin au 15 septembre. Le rythme est fou, Joachim est derrière les platines de 22 heures à 7 heures du matin, une autre expérience intense qui lui permet d’apprendre le métier, d’en tomber amoureux, mais aussi d’encaisser son premier gros cachet, « j’ai touché cet été-là ce que mon père gagnait en un an ». De quoi réaliser qu’il pourrait éventuellement vivre de sa passion.
À l’époque, Joachim n’imagine pas une seconde la carrière qui va s’ouvrir à lui, ou du moins, qu’il va se bâtir. Avec passion et conviction. Il n’imagine pas que quelques années plus tard, non seulement, il collaborera avec Jean-Michel Jarre — artiste qu’il vénère — mais que l’amitié prendra le dessus sur la relation professionnelle. Une amitié authentique et artistique. Il n’imagine pas un seul instant qu’il deviendra l’un des DJs les plus demandés au monde. Il sera parmi les plus grands artistes, mais toujours avec cette humilité qui le caractérise. Alors qu’il met des notes sur sa success story, il reste une personne authentique, sincère, humble. Et bourré d’humour.
Des rencontres marquantes
Sa vie est au-delà de ses rêves « tout est allé tellement vite, de manière fluide et naturelle. Je me suis toujours laissé porté par le vent. Ça m’a été profitable parce que pendant 25 ans, notre métier n’était pas très professionnalisé. Il n’y avait que des gens comme moi, comme Bob Sinclar ou David Guetta. On a tous commencé de la même manière, avec le même cheminement, mais aujourd’hui notre métier a énormément changé et nous nous retrouvons en compétition avec des jeunes qui ont fait des formations, qui ont des équipes, des tourneurs, nous sommes loin du parcours avec l’innocence et la fraîcheur que nous avons connus il y a quelques décennies » explique Joachim Garraud.
Parmi les meilleurs souvenirs de Joachim, des rencontres. « Les rencontres déclenchent des projets. En 1995, Jean-Michel Jarre vient dans mon petit studio parisien pour que j’ajuste des titres, cette rencontre a été un moment important de ma vie. Je pense que ce sont des artistes comme lui qui transmettent la passion auprès des jeunes générations. J’étais, et je suis toujours, un fan absolu. Quand il est venu dans mon petit studio, j’étais hyper excité. Il est venu me voir parce que j’étais le premier à utiliser des outils numériques, alors que tout le monde était en analogique. J’avais l’idée fixe de séduire le maître. Il a été, je pense, assez bluffé, il devait venir travailler trois heures et au final, il est resté quatre jours. Je devais assembler des morceaux et au final, j’ai créé des morceaux, » relate avec une passion palpable, Joachim Garraud.
Autre rencontre marquante, celle de David Guetta, rencontré dans un magasin de disques, rue de Rivoli, à deux pas du studio de Joachim. À ce moment-là, Guetta est DJ au Palace, un lieu VIP où résonne House et Garage, Joachim est au Boy, où tremble de la techno pour un public gay, avec très peu de VIP. Deux ambiances différentes pour deux hommes qui partagent énormément, sans le savoir quand ils se croisent dans un rayon de disques. « Je l’ai invité dans mon studio, on a fait un premier titre ensemble, chanté après par Chris Willis. Le titre est devenu numéro 1 à Ibiza, puis numéro 3 en Angleterre. On a décidé après cela de se voir chaque semaine, et au final, on se voyait presque tous les jours. » Une collaboration qui deviendra intense et durera presque une décennie.
Hors domaine artistique, lors d’une tournée au Japon, Joachim Garraud rencontre, lors d’une soirée organisée à Tokyo, le patron de Pioneer, Hirochi Yamaguchi. Marque essentielle pour les DJ, précurseure dans le développement de matériel pour ces artistes. « J’étais très fier de jouer devant quelqu’un qui avait créé les outils qui me permettaient de m’exprimer en tant que DJ. Il est devenu un ami ». Ensemble, ils travaillent au développement de nouvelles machines. « Ces rencontres, c’est comme se laisser porter par le vent, » raconte l’artiste. État d’esprit qui lui permet, en plus de sa casquette de DJ artiste, de travailler sur de nouveaux projets, comme avec Pioneer.
LA Good Vibe, le bus de Joachim Garraud
La liberté, tout simplement
Proche d’André Boudou, Joachim Garraud se prépare, en 2012, à une expatriation à Miami où son nouveau « bureau » ne sera autre que la célèbre boîte de nuit l’Amnesia. Une nouvelle vie pour lui, son épouse — enseignante — et leurs quatre enfants. Mais au dernier moment, c’est vers Los Angeles qu’ils mettent le cap. « J’adore cette ville, je ne regrette absolument rien, à Los Angeles, j’ai trouvé des gens avec qui j’ai les mêmes atomes crochus pour la musique, pour le développement artistique. En France, dans notre métier, nous sommes considérés comme des saltimbanques, sans trop de considération, à Los Angeles, c’est l’inverse, il y a une vraie reconnaissance, même si des gens comme moi, qui ont fait quarante métiers dans l’univers musical n’ont pas la même reconnaissance qu’un Américain qui sort d’une école de musique ».
Sur la Côte Ouest, il « apprend à travailler comme les Américains. J’ai eu la chance de travailler avec les équipes d’artistes comme Justin Bieber, Jay-Z ou Beyonce. J’ai appris à me fondre dans la masse et à rester spécialiste d’un seul échelon de la production d’un titre alors que globalement, quand je suis seul dans mon studio, je fais tous les métiers, je compose, j’enregistre, j’écris, je remixe, je fais le mastering… Ici, tout est fragmenté, » explique l’artiste avant de concéder « mais ce que j’aime le plus, c’est ma liberté. J’aime perdre du temps sur un album que je vais vendre à seulement 3,000 exemplaires, mais qui est pour moi très utile d’un point de vue artistique. J’aime aller développer de jeunes artistes français aux États-Unis. Pour moi, cela fait partie d’un équilibre global. J’aime le côté artisan de mon métier ».
Entre la liberté française et la fragmentation américaine du métier, Joachim Garraud trouve son équilibre. Il fait la balance entre l’euphorie d’équipe quand un titre remporte un prix prestigieux, tel qu’un Grammy Award, et ses projets personnels. À la française, presque à l’ancienne, comme il a toujours créé dans son studio du 1er arrondissement de Paris.
Et s’il ramenait son état d’esprit, sa conception de la création aux États-Unis ? Une autre idée — collaborative — de génie qui née dans l’esprit de l’artiste. Un bus solaire et studio d’enregistrement mobile qui sillonne le désert américain et d’autres décors à couper le souffle. Il le baptise LA Good Vibe. Depuis la fin du travel ban, il accueille, dans son bus, des artistes européens « on part dans le grand Ouest américain, dans mon bus solaire qui est en fait un studio d’enregistrement, c’est juste exceptionnel. Je suis très fier de ce projet que j’avais en arrivant aux États-Unis. Je suis tombé amoureux des grands espaces américains, de la diversité des décors. Depuis Los Angeles, dans un périmètre de trois heures de route, il y a la montagne, le désert ou l’océan. J’ai remarqué dans ma carrière que les voyages impactaient sur l’inspiration. C’est pour cela que la base line de LA Good Vibe est ‘Location is inspiration’ » explique avec enthousiasme l’artiste.
Emmener les artistes en plein désert, de jour et de nuit, des lieux sans aucun bruit, sans aucune présence humaine. Des lieux repérés aussi pendant la crise du Covid. Pendant que le monde est enfermé, pendant que le monde ne danse plus, Joachim Garraud explore, cherche, découvre. Il imagine de futures virées, musicales et sourdes à la fois. Avant que les États-Unis ne ferment leurs frontières à une large partie du monde, Joachim avait prévu d’accueillir Indochine. « Ils devaient venir pour fêter les 40 ans du groupe, malheureusement, avec le travel ban, nous n’avons pas pu faire ce que j’avais écrit pour eux », déplore Joachim.
Depuis la levée du travel ban, l’artiste réouvre le calendrier de production et sélectionne de nouveaux artistes européens pour des virées dans le désert. Au programme : l’enregistrement de nouveaux titres. Dans le bus. Loin de tout. Du son au milieu du silence. Là où le lieu inspire la création.
Un nouvel album de 8 titres en collaboration avec son ami Chris Willis s’apprête à sortir. Son nom Chris Willis & Joachim Garraud. Avec l’ancien chanteur de gospel américain et David Guetta, ils avaient déjà créé des titres qui ont fait danser la terre entière « Love is gone », « Just a little more love » ou encore « Let me go ». « Chris Willis est un artiste que j’affectionne. Ce sont des titres post-apocalyptiques, nous avons tous été touchés par le Covid et ne plus pouvoir faire danser les gens était juste impensable. Aussi, nous avons eu besoin d’écrire un album positif. Ce sont des titres fun, pop, funk. J’en suis très fier et je suis très heureux de sortir cet album avec Chris Willis, » se réjouit Joachim Garraud.
Joachim Garraud, cet artiste artisan, libre, curieux de rencontres, riche de collaborations. Un homme passionné. En toute simplicité.
Par Rachel Brunet