Success story, un ensemble de deux mots qui rime avec États-Unis. En notre qualité de premier média à destination des francophones expatriés, nous vous donnons rendez-vous mensuellement afin de découvrir ces francophones des États-Unis qui ont monté un empire et dont le parcours au pays de l’oncle Sam se résume à success story. En partenariat avec USAFrance Financials, le cabinet de gestion privée spécialiste des problématiques patrimoniales de la communauté française aux USA, nous vous invitons à lire, chaque mois, l’histoire de ces femmes et de ces hommes qui nous racontent leur aventure entrepreneuriale.
Aujourd’hui, nous partons à la rencontre de Lucie Basch, entrepreneure française installée à New York et fondatrice de l’application Too Good To Go.
Chaque année, un tiers de la production alimentaire mondiale finit à la poubelle. Face à cette aberration, Lucie Basch, s’est lancée, en 2016 dans une véritable croisade contre le gaspillage alimentaire en créant « Too Good To Go », une application pour smartphone qui connecte les consommateurs aux magasins et restaurants locaux proposant des invendus alimentaires. Grâce à cette application utilisée dans 15 pays, quelque 82 millions de repas n’ont pas fini à la poubelle.
Le gaspillage alimentaire est une aberration
Rachel Brunet, rédactrice en chef de Lepetitjournal.com New York : Racontez-nous l’histoire de Too Good to Go !
Lucie Basch : Personnellement, j’ai toujours été sensible au gaspillage alimentaire dont j’ai véritablement mesuré l’ampleur à la fin de mes études, quand j’ai commencé à travailler sur les chaînes de production d’un géant de l’alimentaire en Angleterre. J’ai démissionné en étant convaincue que je devais mettre mon énergie ailleurs, pour un projet qui ait du sens. De retour en France, je suis passée devant une boulangerie qui jetait de nombreux produits à la poubelle. Je me suis dit qu'on devait pouvoir faire quelque chose, en passant récupérer ces produits juste avant qu’ils ne soient jetés. J’ai donc décidé de créer une plateforme qui mettrait en relation les commerçants et des riverains qui rachèteraient ces produits à prix réduit.
Too Good To Go est donc né en 2016 du constat de l’aberration qu’est le gaspillage alimentaire, et se veut être une solution simple et efficace, qui permette à chacun de s’engager contre ce fléau. Depuis, en à peine cinq ans, nous avons bien grandi. Nous sommes aujourd’hui présents dans 14 pays en Europe et aux États-Unis et nous avons sauvé plus de 82 millions de paniers à travers le monde, grâce à nos 41 millions d’utilisateurs et 75 000 commerçants partenaires. Nous comptons également plus de 1000 « waste warriors » ( employés ) qui mettent chaque jour leur énergie dans la lutte anti-gaspi.
Aujourd’hui, Too Good to Go est une application utilisée par plus de 40 millions d’utilisateurs. Qu'est-ce qui, selon vous, les séduit ?
Je pense que le point fort de Too Good To Go est d’être un concept « gagnant-gagnant-gagnant » : gagnant pour le commerçant, car cela lui permet de dégager un petit revenu tout en générant un nouveau flux de clients grâce à la visibilité sur l’application ; gagnant pour l’utilisateur qui découvre de nouveaux commerces en récupérant de bons produits à petits prix et gagnant pour la planète ! La simplicité de l’application les séduit aussi, car elle leur permet facilement de lutter à leur échelle contre le gaspillage alimentaire.
Donner une solution simple, clé en main, pour permettre à chacun d’avoir un réel impact sur le gaspillage alimentaire
Comment touchez-vous les utilisateurs ? Quel est votre message pour les inciter à participer à la lutte contre le gaspillage alimentaire ?
Le but de Too Good To Go est de donner une solution simple, clé en main, pour permettre à chacun d’avoir un réel impact sur le gaspillage alimentaire. L’idée derrière est que chaque geste compte ! Quand on sait qu’aujourd’hui 30 % du gaspillage alimentaire a lieu chez le consommateur, il est important d’emmener les gens vers de nouvelles habitudes.
Il y a plein de gestes simples à mettre en place et qui au final font une réelle différence. Aussi, pour toucher un maximum d’utilisateurs, nous avons une vraie responsabilité de les sensibiliser et de les éduquer à la lutte anti-gaspi. Nous donnons notamment tout un tas d’astuces et de conseils sur notre blog ainsi que sur notre compte Instagram, pour ne rien gaspiller !
Vous êtes acteur majeur de la lutte contre le gaspillage alimentaire. Comment votre application met en relation foyers et entreprises ?
Géolocalisés sur l’application, les utilisateurs repèrent les commerçants partenaires autour d’eux, commandent un « panier surprise » composé des invendus du jour, payent un petit prix en ligne et se présentent sur place aux heures de collecte indiquées afin de récupérer leur panier.
Nous militons pour une meilleure compréhension des dates de consommation
Au-delà de l’application, quelles sont vos autres initiatives pour lutter activement contre le gaspillage alimentaire ?
En parallèle de l’application, nous avons lancé un véritable mouvement afin d’impliquer chaque acteur : producteurs, distributeurs, consommateurs, pouvoirs publics… Nos actions se basent sur 4 piliers : les entreprises, à travers notre marketplace ; les foyers avec nos actions de sensibilisation ; la politique avec notre pôle « Affaires publiques » ; et enfin les écoles, avec notre projet « Éducation ». Par exemple, nous avons lancé en janvier 2020 un Pacte sur les dates de consommation, signé aujourd’hui par une coalition de 60 acteurs de l’agroalimentaire, du producteur à l’industriel en passant par le distributeur. Avec ce Pacte, nous militons notamment pour une meilleure compréhension des dates de consommation, responsables de 20 % du gaspillage dans les foyers, avec entre autres l’insertion de pictogrammes « Observez, Sentez, Goûter » pour rendre plus lisibles ces dates et reconnecter les consommateurs à leur(s) ( bon ) sens !
Le gaspillage alimentaire représente 8 % des émissions de CO2 mondiales
Qui dit lutte contre le gaspillage alimentaire dit engagement pro-environnemental. Plus de 5 ans après le lancement de l’application, quel bilan faites-vous de votre action ?
Le gaspillage alimentaire a un impact environnemental énorme : à lui seul, il représente 8 % des émissions de CO2 mondiales. Si c’était un pays, il serait le 3e plus gros pollueur après la Chine et les États-Unis. Les experts du GIEC ont d’ailleurs défini la réduction du gaspillage alimentaire comme un des leviers prioritaires pour lutter contre le dérèglement climatique. Nous sommes donc très heureux d’avoir réussi en à peine 5 ans à sauver 82 millions paniers à travers le monde, soit l’équivalent en empreinte carbone de plus de 200 000 tonnes de CO2, soit les émissions annuelles de 11 500 citoyens américains. Mais il reste encore beaucoup à faire pour réaliser notre rêve, celui d’un monde sans gaspillage alimentaire !