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LYCEE MOLIERE – Comment analyser l’évolution des effectifs de l’établissement ?

Écrit par lepetitjournal.com Madrid
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 6 janvier 2018

Depuis 2008 le nombre d'élèves du Lycée Français de Villanueva de la Cañada a expérimenté des changements significatifs notamment dans la répartition des effectifs en fonction des nationalités. Explications et conséquences.

Le Lycée compte trois grandes catégories de nationalités :
- les élèves Français (les deux parents sont Français) et les binationaux (un des parents est Français),
- Les élèves nationaux (les deux parents sont Espagnols)
- les élèves  étrangers ou tiers (les parents ne sont ni Français ni Espagnols)

Premier constat : de moins en moins d'élèves espagnols
Sur ces 6 dernières années, le nombre d'effectifs des élèves français et binationaux a augmenté considérablement au détriment des élèves espagnols. En 2008, ils représentaient 39% des effectifs pour sauter à presque 46% pour l'année académique 2013/2014.  A l'inverse, pour la même période, les effectifs nationaux (Espagnols) chutent de 58% à 52%.
Cette tendance est particulièrement prononcée dans les classes élémentaires (CP, CE1, CE2, CM1 et CM2) où les enfants français et binationaux passent à représenter 14.6 % des effectifs totaux à 18.40% en 2013 alors que les élèves espagnols eux, chutent de 22% à 17%. Pour les effectifs du collège, s'il est vrai que l'on enregistre une hausse des enfants français et binationaux, de 8.80% à 12.5%, les Espagnols se maintiennent entre 15.5 et 16.5%. Même résultat pour le Lycée. Il est donc clair que la différence se joue dans le cycle élémentaire.
Selon la direction du Lycée Molière, le fait que "les  élèves entrent en PS et aillent jusqu'au Baccalauréat pourrait expliquer que les changements soient toujours observés à la base en premier lieu (Maternelle) puis en élémentaire puis au lycée, dix ans plus tard". Par ailleurs, la crise a éloigné les élèves espagnols des écoles privées. Mais, il existe une autre explication proposée par la Direction du Lycée : "Notre lycée n'est pas perçu à sa juste valeur concernant l'enseignement de l'anglais. L'enquête faite auprès des familles l'an dernier montrait clairement que l'une des raisons de la non inscription des enfants à l'école française était la faiblesse supposée de nos élèves dans cette matière.  Or, nos élèves sortent avec au minimum une certification B2 en anglais qui leur permet de poursuivre leur scolarité supérieure en pays anglophone. Il faut que nous communiquions mieux à ce sujet. Le slogan ?deux cultures, trois langues' est une réalité au Lycée Molière".
De son côté, le Président de l'APA, JN Pagnoux avance lui trois principales raisons. Il rejoint l'avis du Proviseur et du directeur du LM quant au durcissement des conditions de vie en Espagne, et en qui concerne la concurrence des établissements anglophones (la concurrence apparente exacerbée des écoles "bilingues" espagnol-anglais, en particulier en marketing avec l'avantage parfois d'un statut "concertado")  et il apporte un nouvel élément de discussion et doutes quant aux débouchés ; "Les multiples réformes de l'enseignement secondaire et de l'accès aux universités espagnoles couplées à l'habitude de notation plus ?sévère' et sur 20 du système français ont incité des familles à réintégrer le système espagnol dans la perspective de cursus universitaire en Espagne de leurs enfants".

Deuxième constat : il y a de moins en moins d'élèves inscrits dès les toutes petites classes  
Si dans les années 2008 à 2011 la tendance était légèrement à la hausse concernant les inscriptions aux classes pré-élémentaires, celle-ci s'est inversée pour les années 2012/2014. Une chute des inscriptions des enfants espagnols était déjà latente depuis 2008 mais le phénomène s'est étendu aux enfants français et binationaux.
Selon M. Javel et M. Silvestre, respectivement Proviseur et Directeur du Primaire, la crise est la principale cause des baisses d'effectifs  sans oublier que les cadres français expatriés quittent l'Espagne pour les mêmes raisons. Enfin, "Les bourses octroyées aux enfants de nationalité française ne sont plus données aussi facilement. Quand elles le sont, les pourcentages accordés sont inférieurs à ceux des années précédentes".
Le représentant de l'APAELM lui, explique ce phénomène en précisant : "avec l'existence de liste d'attente pour rentrer au Lycée Molière (et dans presque tous les autres établissements français de la péninsule ibérique dans les années 2005-2007), une entrée dès la Petite Section équivalait, pour les familles espagnoles, à un accès automatique en classe de CP et donc d'un cursus 'garanti' dans le système français. La disparition des problèmes d'accès dans les petites classes et le coût pour les familles ont réduit la demande de la part des Espagnols. Pour les familles bi-nationales, certaines ont probablement décidé d'inscrire leurs enfants dans le système espagnol en ?infantil' avant de les mettre dans le primaire français (jouissant d'un ?droit' -plutôt une priorité- puisque de nationalité française)".

Troisième constat : le Lycée est le moins affecté par les changements
Il n'y a pratiquement pas de variations concernant la représentation en pourcentage des adolescents des classes du Lycée (Seconde, Première, Terminale). La représentation des élèves français et binationaux ainsi que des ressortissants espagnols sur le total des effectifs du Lycée Molière est sensiblement la même depuis 2008.
Selon le Lycée Molière, "Il existe toujours une déperdition entre le collège et le lycée. Les craintes sont essentiellement liées au fait de ne pouvoir intégrer les universités espagnoles en ayant obtenu son Bac dans le système français. La baisse du nombre d'Espagnols  entre le collège et le lycée est clairement liée à la crainte de certains parents de ne pas pouvoir permettre, avec le Bac français, d'intégrer l'enseignement supérieur espagnol. Or, les chiffres des orientations post-Bac montrent le contraire, à savoir que les élèves espagnols ont, pour presque 100 %, obtenu leur premier v?u d'orientation". Une autre donnée à prendre en compte est peut-être "l'attrait de plus en plus fort (depuis deux ans seulement) des élèves vers l'enseignement français ou international". En juin 2013, près de la moitié des élèves, toutes nationalités confondues, a choisi la France. Cela plaide donc en faveur du système français qui permet aux jeunes Espagnols de diversifier leur orientation, quitte à revenir en Espagne pour faire un master, parfois après avoir fait un passage par un pays anglophone.

Quatrième constat : le collège n'est pas affecté par la tendance enregistrée dans les petites classes
Que ce soit pour les enfants français, binationaux ou espagnols, la tendance observée dans les petites classes pré-élémentaires et élémentaires n'est pas confirmée pour les classes du collège (de la 6ème à la 3ème), bien au contraire. Il s'agit du seul groupe d'enseignement qui enregistre une hausse des effectifs et ce toutes nationalités confondues, passant à représenter moins de 25% des effectifs globaux en 2008/2009 à presque 30% en 2013/2014.
Sur cette question, Lycée Molière et APAELM coïncident. Selon M Pagnoux, "Au fait de la bonne santé économique espagnole (1999-2004), il y a eu un 'baby boom' et les effectifs actuels du collège ne sont que le reflet des élèves rentrés au Lycée Molière entre 2002 et 2005".

En conclusion, même si la situation actuelle est sérieuse et qu'il existe, selon M Pagnoux, un effet "toupie" préoccupant où on observe "qu'il y a peu de Maternelle, beaucoup de Primaire et Collège et peu de Lycée. Le souci réside dans la situation dans 5-10 ans quand les ?peu de Maternelle' iront remplir les classes de Primaire-collège?
Ceci dit, les membres de la Direction du Lycée invitent à rester optimistes et rappellent que "le système français offre l'opportunité à toutes les nationalités, de par l'obtention d'un double diplôme (Baccalauréat et bachillerato) de pouvoir poursuivre des études dans le monde entier".
De plus, afin de rééquilibrer la balance et de relancer l'inscription des familles espagnoles au système d'enseignement offert par le Lycée Molière -et de façon plus globale par les établissements français à l'étranger-  il faut, selon M. Le Proviseur, bien expliquer à ces familles que : "la confrontation ou la juxtaposition de plusieurs nationalités dans un même établissement est une chance, une richesse : les élèves francophones apprennent très rapidement l'espagnol et les hispanophones, même s'ils n'ont pas de parents francophones, bénéficient d'une imprégnation linguistique dès leur plus jeune âge. Au lieu d'être un obstacle, le mélange des langues est un atout. Il débouche également sur une ouverture vers l'autre, vers celui qui a une culture différente". N'oublions pas que : "L'objectif du lycée Molière est bien de poursuivre une éducation 'à la française' tout en ouvrant les élèves à une vision européenne et internationale".

Marc DECLERCQ (www.lepetitjournal.com - Espagne) Mardi 12 novembre 2013
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Publié le 11 novembre 2013, mis à jour le 6 janvier 2018
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