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L’art de vivre espagnol à l’épreuve du Covid-19

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Écrit par Michel Yebenes
Publié le 22 juillet 2020, mis à jour le 23 juillet 2020

Les bouleversements engendrés par les effets du Covid-19 sur le mode de vie de l’Espagne, pays festif et de la convivialité par excellence, seront-ils passagers ou changeront-ils les habitudes outre-Pyrénées ?

 

À l’instar de ses voisins et de la plupart des pays de la planète, l’Espagne est durement frappée par le Covid-19. Les effets et les limitations imposés par cette pandémie s’enracinent dans notre quotidien, semblent s’inscrire dans la durée et touchent particulièrement les sorties, les événements festifs, la « sociabilité extérieure » qui caractérisent l’Espagne. Le Covid-19 semble de ce point de vue peser plus sur ce pays que sur d’autres Etats moins portés par les célébrations et la vie à l’extérieur.
La plupart des domaines qui structurent l’art de vivre espagnol, et qui font de l’Espagne un pays unique et attractif, sont en effet extrêmement touchés.


Le tourisme balnéaire de masse en plein désarroi

Même si cela est quelque peu réducteur, affirmer que l’Espagne est le pays de la plage et du soleil ne relève pas totalement du cliché. Le tourisme balnéaire estival reste en effet la forme de tourisme la plus répandue tant pour les Espagnols que pour les visiteurs étrangers depuis des décennies. C’est le tourisme de la baignade, du bronzage, des chiringuitos, des bars lounge et des établissements de nuit.
L’irruption du Covid-19 a bouleversé la donne : les touristes étrangers sont infiniment moins nombreux sur les plages de la communauté valencienne, de la costa Brava, del Sol, de la Luz ou encore aux Baléares. Peu d’hôtels affichent complet pour l’ensemble de la saison, les ressortissants nationaux éprouvent des réticences à opter pour ces destinations réputées à risques… La consternation règne chez les professionnels de ce secteur. Il semble plus aisé aujourd’hui de louer en Espagne une chambre d’hôtel ou un appartement à la mer qu’un gîte rural à la campagne. L’annonce ces derniers jours de la survenue de cas de Covid dans des hauts lieux de ce tourisme de masse comme Benidorm ou encore Peñiscola n’incite pas à l’optimisme. La possibilité d’une fermeture prochaine des frontières avec la France renforce ce sentiment d’inquiétude.


Les fêtes populaires annulées

Les fêtes populaires constituent un autre élément fort de l’identité et de la tradition espagnoles. Ces fêtes sont de natures variées. Chaque ville, chaque village espagnol dispose de sa fête votive organisée très sérieusement avec un cérémonial rigoureux. Il s’agit du moment fort de la commune qui réunit les habitants, des personnes des localités voisines mais également les « expatriés » qui tiennent en général à retrouver leurs racines et parents à ce moment. Il n’est pas rare de voir la population de certaines villes ou villages doubler à l’occasion de ces rassemblements. Certaines de ces fêtes sont connues mondialement et constituent une attraction touristique très importante : las Fallas de Valence, la Feria de Abril de Séville, los Sanfermines à Pampelune en sont la parfaite illustration.  
Toutes ces manifestations ont été annulées avec les mesures imposées par la pandémie. Il s’agit d’un choc pour les populations locales et les diverses entités organisatrices (les Fallas n’avaient par exemple plus connu d’annulation depuis la guerre civile espagnole).
Résisteront ces traditions festives à ces interruptions, se relèveront-elles d’une ou deux années d’inexistence ? Sûrement pour la très grande majorité mais peut-être pas sous la même forme, avec la même organisation et la même affluence. L’état de l’économie espagnole au sortir de la pandémie pourrait être un des facteurs déterminant en la matière.


Des milliers de bars ferment leurs portes

L’Espagne est le pays qui détient la plus grande densité de bars au monde avec un établissement pour 175 personnes (près de 260.000 débits de boissons comptés en 2016). Loin d’être des lieux marginalisés ou des espaces réservés à certaines catégories de la population, les bars outre-Pyrénées sont des endroits ouverts, des lieux de sociabilité importante où se côtoient toutes les classes sociales, âges et sexes. Il suffit de se rendre un dimanche vers 13h00 ou un vendredi vers 11h00 dans la grande majorité des bars espagnols pour entendre cela. Le fait de se retrouver entre amis, entre collègues de travail ou en famille dans un bar pour partager un verre et déguster une tapa, un pincho ou une ración est propre à la culture espagnole.
Les effets du Covid provoquent des ravages dans ce secteur d’activité. Le confinement, les limitations d’accès, la peur des clients, les difficultés économiques et la chute du tourisme ont généré et génèrent la fermeture définitive de milliers de cafés. Le mouvement devrait se poursuivre, les prévisions sont extrêmement préoccupantes. Le nombre de bars en Espagne à l’issue de cette crise devrait être infiniment plus bas.

Ces bouleversements seront-ils provisoires ou y aura-t-il un avant et un après Covid qui conduira l’Espagne vers une « triste normalité européenne » ? L’expérience de la crise de 2008 pourrait nous faire croire que ce ne pourrait être qu’un changement passager mais il ne faut pas négliger le « côté austère espagnol » qui existe également en contrepoids du caractère festif, extraverti et convivial. Ce trait, bien visible par exemple durant les années 1950 et 60 en Espagne, fait aussi partie de l’ADN de ce pays même s’il est nettement plus discret aujourd’hui.
 

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michel yebenes
Publié le 22 juillet 2020, mis à jour le 23 juillet 2020
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