Édition internationale

Festa do Cinema Francês : le prix du public récompense "A Bicyclette"

À l'occasion de la Festa do Cinema Francês qui s'est tenue du 2 au 12 octobre à Lisbonne, le film "À Bicyclette !" a été récompensé par le Prix du Public, salué pour son émotion et sa justesse.

Mathias MLEKUZ et Philippe RebbotMathias MLEKUZ et Philippe Rebbot
©Macia Monteiro
Écrit par Camille Ponsard
Publié le 29 octobre 2025

 "À Bicyclette !" est un road trip raconte l'histoire de Mathias, qui emmène son meilleur ami Philippe refaire le voyage que son fils Youri avait commencé avant de disparaître tragiquement. Entre tendresse, humour et émotion, cette aventure à vélo émeut par sa sincérité et sa chaleur humaine. Lepetitjournal de Lisbonne a eu l'occasion de rencontrer le réalisateur et les acteurs Mathias Mlekuz et Philippe Rebbot, pour une interview sur ce projet bouleversant.

Le film "À Bicyclette !" sera projeté dans plusieurs villes du Portugal où se poursuit la Festa do Cinema Francês jusqu´au 30 novembre et il sortira dans les salles de cinéma dans tout le pays le 4 décembre prochain. 

Lepetitjournal: Le film s'inspire de votre propre histoire. Comment avez-vous eu l'idée de faire un film ?

Mathias MLEKUZ : C'est Philippe qui a eu l'idée de faire un film. Après le décès de mon fils, j'ai cherché à être en contact avec lui.  J'ai commencé par faire le clown, comme mon fils était clown, j'avais l'impression d'être en lien avec lui. J'ai aussi fait un voyage avec Joseph, mon second fils. On est partis pendant sept semaines au Brésil. Là aussi, il y a une espèce de magie qui a opéré. Un sentiment d'être avec lui, de sentir sa présence. Du coup, il y avait ce voyage qu'avait fait mon fils cinq ans auparavant. Il était parti de La Rochelle jusqu'à Istanbul en vélo.Il était parti pendant un an. Il a erré sur les routes d'Europe. Donc, j'ai proposé à Philippe de faire la même chose, pour lui rendre hommage.  Mais ce n'est pas moi qui ai eu l'idée du film.

Philippe Rebbot : Évidemment, j'avais accepté l'idée de refaire ce voyage. Mais en quelques heures, mon esprit avait réalisé qu'on ne pourrait pas le faire.
On se perdrait à tout point de vue psychologiquement et physiquement. Si on partait tous les deux à vélo, même l'hommage, on n'arriverait pas à le faire. Je dis ça maintenant avec le recul mais j'ai surtout pensé à échapper à six mois de vélo pour deux vieux gars au milieu des pays de l'Est (rires). Je me suis dit, qu'est-ce qu'on peut faire, nous, avec ce qu'on sait faire, pour rendre hommage à Youri ? La réponse m'est venue naturellement, faisons un film. J'en ai parlé à Matthias, qui avait déjà tourné son premier long-métrage. On se connaît depuis longtemps, et puis, notre univers commun, c'est le cinéma. C'est notre langage, notre manière d'exprimer les choses. Alors, faisons ce que nous savons faire, c'est-à-dire un film. Un film sur un père qui reprend la route de son fils, accompagné de son meilleur ami. On ne savait pas exactement où cela nous mènerait, mais on s'est lancés. Et le fait de filmer, d'avoir les caméras autour de nous, c'était aussi une forme de protection, une façon d'encadrer l'émotion. J'ai pensé ce projet comme un atelier de cinéma, à la fois pour aider Matthias dans ce voyage qu'il voulait entreprendre, et pour que, tous ensemble, on avance dans quelque chose de construit, de maîtrisé, malgré la douleur.


Votre relation dure depuis plus de vingt ans. Comment avez-vous réussi à garder cette dimension de comédie, même au cœur d'un sujet aussi tragique ?

P.Rebbot : Jusqu'à la tragédie, notre relation de vingt ans a toujours été une relation de comédie. Quel que soit le sujet qu'on abordait, avant la mort de Youri, on finissait toujours par en rire. Les gosses qui grandissent, les gosses qui font des conneries, le cinéma... peu importe le sujet, il y avait toujours un moment où ça se transformait en rigolade. Donc là, forcément, nos personnalités ont repris le dessus. Même au milieu de toute cette tristesse, au milieu de ces paysages, de cette route, il y avait encore de la rigolade. On était sept types un peu paumés dans des campings, alors évidemment, tout était nourri de petites anecdotes.


Ce projet a évolué différemment de ce que vous imaginiez ?

M. Mlekuz : Oui, complètement. Ce voyage est resté comme une base symbolique, mais le film est devenu une autre manière de raconter ce lien, cette quête, cette façon de continuer à vivre malgré la perte. Il y a toujours cette idée de chemin, de mouvement, mais elle prend une forme plus cinématographique.

P.Rebbot : Ce qu'on voulait avant tout, c'était que le film soit sincère. Qu'il parle de deuil, bien sûr, mais aussi de vie, de reconstruction, d'amitié. On voulait éviter le pathos, faire un film vrai, humain.


Tourner une histoire aussi intime a-t-il été difficile ?

M. Mlekuz : Oui, c'était un mélange d'émotion et de pudeur. Il fallait trouver la bonne distance. Mais en même temps, tourner ce film a été une forme de thérapie. C'était une façon d'apaiser quelque chose en moi.

P.Rebbot : On a tourné avec beaucoup de sincérité. Il n'y avait pas de faux-semblants, pas de rôle joué à moitié. Tout est venu naturellement, avec beaucoup d'émotion, mais aussi de rires. Parce que même dans les moments durs, il y a toujours eu de la lumière.


Vous disiez que tout s'est fait très naturellement pendant le tournage. Est-ce que cette authenticité s'est aussi retrouvée dans certaines scènes comme la fameuse dispute au milieu du champ de "PQ" ? Était-ce joué ou improvisé ?

M. Mlekuz : Oui, complètement ! (rires) C'est une scène qui est née d'un vrai moment de tension pendant le tournage. On était fatigués, un peu à bout, et cette dispute est sortie toute seule. On l'a gardée, parce qu'elle est authentique. C'est ça aussi, l'amitié, on s'engueule, on rit, on se réconcilie.

P. Rebbot : Ce moment résume bien le film, deux types perdus dans leur voyage, entre émotion et absurdité. Et au milieu, ce décor improbable, des rouleaux de PQ partout, comme si la vie se moquait un peu de nous. (sourire)


Dans le film, il y a aussi un chien qui accompagne l'équipe. Était-ce le vôtre ? Comment s'est passée cette expérience de tournage avec lui ?

M. Mlekuz : Oui, c'est mon chien, Lucky. Il adore le vélo ! Depuis qu'il est petit, je l'emmenais dans la caisse du vélo pour les balades, alors pour lui, le vélo, c'est la promenade. Pendant le tournage, on s'est demandé quoi faire de lui, et finalement je me suis dit autant qu'il soit dans le film ! Il a une vraie présence à l'écran, silencieuse mais marquante. Finalement, le succès du film vient peut-être de lui !

P. Rebbot : On ne pensait pas qu'il prendrait autant de place, mais il est devenu presque un personnage à part entière. Il apporte de la tendresse, un souffle de vie. Dans un film où il est beaucoup question de deuil, ce chien, c'est un peu la présence joyeuse, celle qui rappelle que la vie continue, même dans le chaos.

Commentaires

Votre email ne sera jamais publié sur le site.

Flash infos