Dans la majorité des pays du monde, chaque deuxième dimanche du mois de mai sont mises à l’honneur les mères, à travers des célébrations, cadeaux et hommages. Mais qu’en est-il du Pérou ?


Pour ce dimanche 11 mai 2025, les rayons de supermarchés se remplissent de cadeaux et d’offres promotionnelles, les écoles et collèges mettent en place des activités dédiées à célébrer les mères, et leur importance dans tous les aspects de la société. Mais avant de prendre cette tournure commerciale et de devenir une fête officielle, le Día de la Madre était déjà célébré de manière informelle dans diverses régions du Pérou.
Des écoles, des paroisses et des communautés organisaient des hommages aux mères, incluant des messes, des récitations et des cadeaux symboliques. La mère occupe une place centrale dans la vie de famille, il semble donc naturel d’obtenir cette forme de reconnaissance.
Pour autant, c’est l’influence étrangère qui a poussé à une inscription officielle de cette journée dans le calendrier péruvien.
La fête des mères a été officialisée en 1914 aux États-Unis, et ces célébrations ont trouvé un écho à travers tout le continent, notamment au Pérou, où les mères étaient déjà mises à l’honneur.
Des acteurs de la société civile, des figures culturelles et des étudiants de l’Université Nationale Majeure de San Marcos par exemple, sont ceux qui ont contribué à l’installation de cette date comme fête des mères.
« Les femmes au Pérou ont su se frayer un chemin, car une chose qui nous caractérise, c’est que nous ne baissons pas les bras, nous ne laissons pas qu’on nous enlève l’envie de faire les choses. Dans ce sens, nous cherchons à développer nos capacités, à nous affirmer comme leaders et comme successeurs dans les entreprises familiales ».
Comme l’exprime Gelián Mustafá, porte-parole du Comité des Femmes de l’Association des Entreprises Familiales du Pérou (AEF), être mère au Pérou n’est pas une simple tâche. Paradoxalement, elles sont érigées en tant que pilier de la famille, voire du village, mais subissent des inégalités de genre, que ce soit d’un point de vue d'opportunités de travail, de reconnaissance, d’horaires et de salaires.

L’histoire de Lucy Pacompia : un exemple marquant
Lors d’un voyage sur l’île d’Amantaní sur le lac Titicaca, j’ai eu l’occasion de faire la rencontre et de loger chez Lucy, une femme au parcours inspirant. Abandonnée par son mari lorsque sa fille était encore en bas âge, elle s’est retrouvée exclue du système touristique de son village et de participation à la vie citoyenne pour cette raison. Malgré ça, elle finit ses études à 32 ans, construit de ses propres mains sa maison, et se fixe deux objectifs : encourager sa fille à suivre des études supérieures et créer des opportunités pour sa communauté grâce au tourisme rural communautaire.
Ainsi, elle crée son réseau indépendant de tourisme, en utilisant intelligemment les réseaux sociaux et sites de réservation, et construit peu à peu son affaire. Au fil des ans, elle réussit à réintégrer la communauté qui l’avait exclue quelques années auparavant. Si son exemple est inspirant dans beaucoup d’aspects, cela reflète encore trop la réalité des mères dans le pays, qui peinent à s’en sortir, particulièrement dans des milieux ruraux isolés.
Un mini-documentaire a été réalisé sur elle, puis diffusé sur la chaîne nationale du Pérou. Nous ne pouvons que vous recommander de le visionner, en ce qu’il permet de se rendre compte réellement de son quotidien, et de ses épreuves surmontées.
Une fête des mères, oui, mais pourquoi pas plus ?
Célébrer les mères passerait aussi par une révolution totale de la société péruvienne, encore trop marquée par les stéréotypes de genre, menant à des pressions sociales et économiques sur les mères de famille.
A ce titre, de nombreuses associations œuvrent pour une meilleure reconnaissance des droits des femmes, un accès à la santé, à l’éducation, à la vie du village.
Par exemple, le Centro de la Mujer Peruana Flora Tristán est reconnu pour ses publications et recherches sur les féminicides. Autour de la Fête des Mères, l’association met en lumière les tensions entre la célébration idéalisée de la maternité et les conditions de vie souvent précaires et violentes dans lesquelles vivent de nombreuses mères au Pérou.
Derrière les fleurs et les poèmes, nombre de femmes subissent des violences domestiques, l’abandon parental ou la surcharge mentale, et que ces réalités sont encore trop invisibilisées dans le discours public. Elena Villanueva, la responsable de publication, déclare ainsi :
« Les femmes rurales du Pérou vivent dans leur chair la crise climatique, hydrique, alimentaire et environnementale. Et dans ce contexte d’injustice et d’inégalités, elles continuent de défendre la Pachamama, la terre dont l’humanité a besoin pour survivre »
Loin des célébrations symboliques, de nombreux combats restent à être menés, et cela passe d’abord par une prise de conscience des réalités difficiles.

Offrir à la fête des mères en tant qu’expatrié
Sur une note plus positive, pour celles et ceux qui vivent loin, la fête des mères reste une belle occasion de faire sentir leur présence malgré la distance. Les idées de cadeaux à offrir en tant qu’expatrié sont nombreuses : un bouquet de fleurs livré à domicile, une carte écrite à la main, une vidéo de souvenirs, objets faits main d’un artisan local, ou encore un appel surprise en visio avec la famille.
Finalement, à quoi ressemble la fête des mères au Pérou ?
Qu’il s’agisse de lutter pour leurs droits ou simplement de recevoir un appel de leurs enfants partis à l’étranger, les mères péruviennes – comme tant d’autres dans le monde – méritent bien plus qu’une journée d’hommages. Au-delà de ses symboles, la fête des mères pourrait devenir un moment de réflexion, et d’engagement pour une société plus juste.
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