Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

Emmanuelle Marqui : Le Lycée Jules Verne à un tournant de son histoire

emmanuelle marqui, lycée Jules verne, agence pour l'enseignement français à l'étranger, johannesburgemmanuelle marqui, lycée Jules verne, agence pour l'enseignement français à l'étranger, johannesburg
Écrit par Lepetitjournal Johannesbourg
Publié le 11 décembre 2017, mis à jour le 11 décembre 2017

Arrivée pour la rentrée 2017-2018 en provenance de Kinshasa, Emmanuelle Marqui, la nouvelle proviseure du Lycée Jules Verne, parle de son poste en Afrique du Sud, des enjeux du Lycée Jules Verne, de la réforme qui touche le réseau de l’Agence pour l'Enseignement Français à l'Etranger (AEFE), des projets phares du lycée ainsi que les aspects du système anglo-saxon à prendre en compte et la diversité des lycées français dans le monde. Rencontre.

 

Qu’est-ce qui vous a amené en Afrique du Sud ?

 

A l’origine je suis Professeure certifiée de lettres classiques, puis je me suis tournée vers l’enseignement en France et à La Réunion. Je suis, ensuite, devenue personnel de Direction en 2001 à La Réunion tout d’abord, puis en Guyane Française et ensuite un retour en France métropolitaine. C’est il y a trois ans, en 2014, que j’ai intégré le réseau de l'AEFE. Je réalise que la dernière rentrée a été ma 16e rentrée !  Avant de prendre mes fonctions à Johannesburg, j’étais Proviseure du Lycée Français de Kinshasa. Je dois avouer que j’ai un attachement tout particulier pour l’Afrique. J’avais déjà eu une première expérience de l’Afrique de l’Ouest et du Sud lors de voyages touristiques mais les rencontres et le regard que l’on porte sur un pays sont très différents lorsque l’on y vit. On découvre davantage la culture du pays d’accueil en y travaillant, contraint d’appréhender la culture de l’autre, c’est une bonne chose ! Après le lingala, je me mets maintenant au zoulou ! Je suis ravie d’être ici.

 

Quels sont les enjeux du Lycée Jules Verne ?
 

 

J’ai intégré un établissement qui fonctionne bien mais qui se trouve à un tournant de son histoire : le campus de Joburg est à capacité maximale avec 1.200 élèves scolarisés ; il reste cependant de la place sur celui de Pretoria. La question qui se pose est de savoir si nous allons plus loin ou non, tout en prenant en compte les conséquences que cela engendrent. C’est un des éléments de réflexion importants sur les années à venir sur lesquels nous devrons nous pencher avec le Conseil d’Etablissement et le Conseil d’Administration. Si nous choisissons de nous agrandir, la question du public se posera. Il y aura une vraie réflexion à faire sur le public cible : les français ou une ouverture plus importante sur l’Afrique du Sud. 

 

Cela nous mène au prochain grand chantier : la réécriture du projet d’établissement 2018-2021 qui définit la politique que nous allons mener dans l’établissement au cours des trois prochaines années. Nous commencerons en janvier avec une phase « diagnostic » donc d’évaluation où nous allons fusionner les points forts et les points faibles en vue d’améliorer la réussite de nos élèves qui est l’un des objectifs essentiels de l’établissement évidemment, mais nous allons aussi nous pencher sur notre image, il est encore difficile pour nous d’être visible à l’extérieur. C’est sans doute ce sur quoi nous devrons travailler dans la réflexion de l’agrandissement du lycée. Pour revenir à la réussite de nos élèves, nous travaillons sur notre capacité à faire réussir nos élèves, à contribuer à leur épanouissement. 

 

Un point important est la question autour de l’enseignement des langues qui reste un sujet sensible : c’est un vrai questionnement. Il faut rappeler que la priorité d’un lycée français reste évidemment la maitrise du français. La langue française doit rester la langue de référence, c’est un vecteur universel de la petite section à la terminale. L’anglais reste très présent avec 30% au primaire ainsi que l’option internationale pour le baccalauréat (OIB). C’est une langue d’enrichissement et d’apprentissage culturel. Le français est cependant notre image, notre identité et notre cœur de métier, c’est ce qui fait notre richesse. 

 

Un petit point sur les réformes l’AEFE qui toucheront prochainement le réseau et le Lycée Jules Verne ?

 

La réalité c’est qu’il y aura en effet la suppression d’un certain nombre de postes à la rentrée 2018. Il faut garder en tête que l’AEFE est touchée par la politique budgétaire de la France et doit travailler avec un budget plus contraint que les années antérieures. Le réseau est cependant bien structuré avec des formations de personnels de droit local développées. Au Lycée Jules Verne, nous perdons deux postes de titulaires de l’Education Nationale, qui seront tenus par des agents de droits locaux. L’un des enjeux majeurs des années à venir va se situer dans la formation des agents de droits locaux. D’ailleurs, le Lycée Jules Verne est responsable des formations au sein de l’Afrique australe et orientale. Nous avons une équipe dynamique ainsi qu’un Conseil d’Administration, composé de 12 parents élus, actifs et engagés qui accompagnent la gestion financière de l’établissement. En revanche les questions liées à la pédagogie et à l’éducation sont menées par l’équipe de Direction. Mais l’un ne va pas sans l’autre, nous travaillons main dans la main. Je suis ravie des bonnes relations que nous entretenons, de confiance et de respect mutuels des prérogatives de chacun. Pour revenir à la question initiale de l’agrandissement du campus, le Conseil d’Administration est pleinement concerné par le sujet. 

 

Les projets phares du Lycée pour les mois à venir ?

 

Difficile à dire, il y en a tellement ici ! Les enseignants ont tout particulièrement mis le pays d’accueil au cœur de l’apprentissage, comme par exemple avec la mise en place du projet « Rhino » avec une réflexion sur la sauvegarde et la protection de ces animaux menacés ou encore le projet « Djembe » pour l’école primaire qui donnera lieu à un grand concert avec 180 Djembes fabriqués par les élèves. On peut dire que l’établissement est réellement intégré dans la culture locale, ce qui est vraiment intéressant. Nous avons aussi 23 enseignants et des membres du personnel sud-africains qui véhiculent les aspects de leur culture. 

 

Il y aura évidemment le projet annuel « Trophée Jules Verne », une sorte de triathlon alliant natation, VTT et course à pied. Nous sommes déjà en pleins préparatifs de la fête de l’école qui aura lieu en fin d’année scolaire, nous avons pour projet de mettre les apprentissages des élèves au cœur de la fête, comme une vitrine de ce qu’ils ont appris durant l’année. Il y aura aussi une petite expo à Morningside Mall en avril. 

 

Nous avons a aussi des projets solidaires notamment avec Alexandra, récemment nos élèves ont participé à une session d’initiation au rugby dans le township – c’est une façon d’être présent dans le quotidien du pays.

 

Le projet « ambassadeurs en herbe » attendu chaque année rassemble des jeunes des lycées français du réseau AEFE pour participer à des débats sur un thème donné.  Il reste encore beaucoup d’autres projets sportifs et culturels, avec toujours l’ouverture sur le pays d’accueil.

 

Le Lycée Jules Verne vs le système sud-africain ?

 

Si nous devons confronter le système éducatif français contre celui anglo-saxon, le système français pousse moins à l’autonomie des élèves, à la notion de responsabilisation dans les mêmes proportions, ou encore à la prise de risque. La dimension du bien-être des enfants doit aussi passer avec des activités extracurriculaires culturelles et sportives. Tous ces aspects sont des axes sur lesquels nous devons travailler pour conjuguer l’excellence à la française et l’épanouissement des élèves - c’est d’ailleurs une demande des familles. 

 

Les étrangers choisissent le système français pour cette excellence académique qui est spécifique à la France. Pour se faire, nous essayons d’associer la communauté éducative, les parents qui le souhaitent ainsi que les élèves des niveaux supérieurs : c’est une réflexion commune pour construire notre politique d’établissement. Nous essayons aussi de renforcer les échanges avec les écoles aux alentours, pour le moment c’est essentiellement sportifs avec le rugby, le basket, et le Trophée Jules Verne entre autres.

 

Ce qui est magique, c’est la présence de 55 nationalités dans notre établissement. On retrouve ce « melting pot » dans le monde entier même si ça n’est pas en aussi grand nombre partout. C’est aussi le plus grand réseau scolaire au monde. Je trouve cette universalité dans nos établissements particulièrement enrichissante. D'ailleurs, nous souhaitons mettre en place le projet ADN AEFE qui facilitera des échanges à double sens d’un semestre des élèves de seconde du réseau dans le monde entier.

 

Nous devons travailler sur le sentiment d’appartenance, notamment avec les anciens élèves des lycées français. Que sont-ils devenus ? Comment les mettre en lien avec les élèves scolarisés dans le réseau ? Dans ce cadre, une nouvelle plateforme de type réseaux sociaux appelée Agora va être lancée pour mettre en lien tous ces anciens élèves. L’AEFE attend beaucoup de cette plateforme, avec des temps de rencontres annuels. Au bout du compte, quelle que soit leur nationalité, ce que ces élèves et anciens élèves ont en commun, c’est le français, l’amour de la langue et de la culture. Il faut rendre ce sentiment d’appartenance concret, tout en mobilisant les anciens élèves. 

Sujets du moment

Flash infos