Cette semaine est sorti aux éditions Sabine Wespiser, le dernier roman de l’écrivain indonésien Eka Kurniawan, “les belles de Halimunda”.
Eka Kurniawan est né en 1975 à Tasikmalaya dans la partie occidentale de Java. Rien ne prédestinait ce jeune garçon à devenir écrivain. Né de parents pauvres il a grandit dans un village de pêcheurs où les occasions sont rares pour s’ouvrir au monde de la lecture. Le développement de la région apporte son lot de touristes qui abandonnent bien souvent des livres derrière eux. Le père d’Eka a pris l'habitude de récupérer les ouvrages délaissés et de les offrir à son fils qui découvre ainsi la lecture. C’est aussi grâce à l'ONG Taman Bacaan Pelangi, Les jardins de la lecture, située sur le chemin de l’école que le destin du jeune Eka va s’orienter vers le monde de la littérature.
En grandissant il poursuit des études de philosophie à l’université de Gajah Mada de Yogyakarta puis devient journaliste et écrivain. Ses livres sont présentés en 2015 à la foire du livre de Francfort. C'est pour lui le moment de la reconnaissance. Les maisons d’éditions pensent tenir leur nouveau talent de la culture indonésienne un digne successeur de Pramoedya Ananta Toer, écrivain et dissident Indonésien décédé en 2006.
Les livres d’Eka Kurniwan sont aujourd'hui traduits dans huit langues. En France la maison d'édition Sabine Wespiser assure la diffusion des oeuvres de l'écrivain depuis la sortie de L'homme-tigre en 2015. Cette semaine elle présente son dernier roman Les belles de Halimunda.
Eka Kurniawan est pour l'occasion l'invité de l’émission Par les temps qui courent le 5 octobre sur France Culture.
Dans Les belles de Halimunda Eka Kurniawan convoque les légendes, les contes de l’Indonésie mais aussi les esprits avec en fond l’histoire de l’Indonésie.
Fondée par une princesse à la beauté fatale, Halimunda est une ville imaginaire de la côte sud de Java. Eka Kurniawan y déploie l’histoire d’une lignée de femmes marquée par une malédiction dont l’origine remonte à la fin de l’occupation néerlandaise. Le livre s’ouvre au moment où Dewi Ayu, la prostituée la plus célèbre de la ville, sort de sa tombe vingt et un ans après sa mort. Couverte de son linceul, sa très longue chevelure flottant au vent, elle traverse Halimunda pour rentrer chez elle. Dans la véranda est assise une jeune fille d’une insoutenable laideur. Dewi Ayu comprend que son vœu a été exaucé : épouvantée par la succession de catastrophes qui s’étaient abattues sur ses trois filles aînées, aussi séduisantes que leur mère, sur leurs familles et sur la région entière, elle avait tout mis en œuvre pour que la quatrième fût laide. La repoussante jeune femme reçoit pourtant la nuit les visites d’un mystérieux prince charmant. L’identité du visiteur nocturne, et la raison pour laquelle Dewi Ayu est revenue parmi les vivants seront élucidées à la faveur d’une époustouflante plongée dans le passé. La difficile conquête de l’indépendance, les massacres des communistes en 1965 et la dictature de Soeharto constituent la toile de fond de cette tragédie de la vengeance où destinées individuelles et collectives sont intimement liées.
Eka Kurniawan impressionne par la diversité de ses registres et la maîtrise narrative avec laquelle il mène au pas de charge son lecteur éberlué vers le dénouement qui l’inscrit d’emblée parmi les grandes voix de la littérature mondiale.