

Le Centre culturel Anatolie, créé à Paris en 1984, rassemble des Turcs et des Français désireux de faire mieux connaître la Turquie en France au travers de nombreuses rencontres et activités culturelles. A l'occasion des 30 ans du centre, lepetitjournal.com d'Istanbul a rencontré son président, Demir Onger.
Lepetitjournal.com d'Istanbul : Pourriez-vous nous parler de l'histoire du Centre culturel Anatolie?
Demir Onger (photo AEA) : Le centre a été créé il y a exactement 30 ans par un groupe de Turcs et de Français intéressés par la Turquie. Cette création partait du constat que la Turquie était un pays mal connu ou plutôt méconnu (?) C'était l'époque de la terreur d'ASALA (Armée secrète arménienne de libération de l'Arménie), pendant laquelle sept diplomates turcs ont été assassinés. Nous étions arrivés à un stade où nous avions peur de dire que nous étions Turcs. Il y avait un ?terrorisme intellectuel? assez puissant. C'est ce qui m'a poussé à créer le Centre Culturel Anatolie, bien sûr sans but politique, loin de là, mais plutôt pour faire connaître la culture turque. Comme disait André Malraux: ?le chemin le plus court de l'homme à l'homme, c'est la culture.?
Quelles sont vos relations avec les institutions turques et françaises ? Qui sont vos membres ?
Notre centre est un centre laïc et 100% privé, qui ne touche aucun centime ni de l'Etat turc ni de l'Etat français. Le local m'appartient, nous ne payons donc pas de loyer. Les cours s'autofinancent avec les cotisations des membres, nous arrivons donc à payer les professeurs et le secrétariat. Il est important de préciser que nous sommes indépendants financièrement. (?) Nous sommes en contact avec l'ambassade et le consulat de Turquie mais nous ne recevons aucun financement ou subvention. Il existe peu de centres culturels à proprement parler, ce sont surtout des associations de mosquées avec un objectif religieux.
L'association De la Seine au Bosphore a été créée dans le but d'obtenir l'agrégation du ministère de la Formation professionnelle. Elle a pour but l'enseignement de la langue turque. Actuellement, nous comptons 2.200 adhérents français mais aussi une élite culturelle turque. Enfin, depuis un an et demi, nous avons créé l'Association Turcs de France, qui réunit des Turcs de plusieurs villes françaises. C'est une association purement et uniquement culturelle. Nous essayons aussi de créer un conseil représentatif de la communauté turque en France.

Notre communauté est composée de 650.000 à 700.000 Turcs, dont 240.000 dans Paris et en région parisienne. La communauté turque en France est la plus importante à l'étranger, après celle qui vit en Allemagne. L'immigration vers la France a commencé entre 1965 et 1970 avec des artisans, tailleurs etc. Ils venaient surtout du sud et sud-est du pays, donc la majorité était d'origine rurale et kurde. (..) Pour ce qui est de la deuxième et troisième génération, entre 2.850 et 3.000 jeunes Turcs font des études universitaires supérieures. Il y a un manque de sensibilité des parents à l'importance des études supérieures.
Sur le plan économique, les trois activités principales de la communauté sont : premièrement, la confection. Mais avec l'arrivée des Chinois, les Turcs ont été évincés, d'où l'apparition du métier de retoucheur. Rien qu'à Paris et en région parisienne, ils sont au nombre de 4.000. Deuxième secteur, le bâtiment : mais avec l'entrée de la Bulgarie et de la Roumanie dans l'Union européenne, une main d'?uvre à bas coût s'est imposée. Troisièmement, la restauration rapide : les dönerci sont les plus répandus. Il y en a 8.400 à Paris et en région parisienne mais malheureusement, il y a un réel problème d'hygiène chez certains. Suite à une réunion que j'ai organisée, ils n'ont pas pu se mettre d'accord sur une charte d'hygiène. Economiquement, donc, je dirais que la communauté turque n'est pas la plus prospère.
Avez-vous recours à des partenariats, publicité ou autre, pour vous faire connaître ?
Nous sommes présent dans le 9ème arrondissement de Paris depuis 30 ans. Nous sommes un de ses acteurs culturels importants. Nous aurons des partenariats avec la mairie, qui nous prêtera des salles pour y organiser des récitals. Avec le maire actuel, nous allons pouvoir collaborer, ce qui n'était pas le cas avec l'ancien.
Quels sont vos projets pour la nouvelle saison, mais aussi à long terme ?

Quel est votre public ?
Notre public est constitué d'habitués ainsi que de ceux qui découvrent. La majorité sont des Français intéressés par la culture turque. Il y a aussi des Turcs sensibles à l'art et à la culture en général. Nous allons continuer à faire connaître notre culture, même si je ne prétendrai pas que nous menons des projets grandioses? Nous avons ouvert des classes d'apprentissage de la langue française pour les nouveaux arrivants turcs. Une classe a été réservée à l'apprentissage de la langue turque par les enfants des couples mixtes? Elle a connu un réel succès.
Pensez-vous avoir atteint vos objectifs de promotion de la culture turque et de l'image de la Turquie?
Malheureusement, à cause de la crise économique, des agissements de groupes terroristes au nom de l'Islam et avec de l'islamophobie montante, on met tout le monde dans le même panier. L'Européen ?moyen? pense que c'est ça, l'Islam. Cela nuit à l'image des pays musulmans. Nous traversons une période difficile. En ce qui concerne nos objectifs, nous en avons encore. Mais les atteindre, c'est autre chose ! Nous espérons, in?allah !
Propos recueillis par Anissa El Amrani (www.lepetitjournal.com/istanbul) vendredi 26 septembre 2014
Plus d'informations sur le site www.cca-anatolie.com











































