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RAPPORT – Amnesty accuse la Turquie de purges "arbitraires"

erdoganerdogan
Écrit par Lepetitjournal Istanbul
Publié le 23 mai 2017, mis à jour le 23 mai 2017

Dans son rapport intitulé "Pas de fin en vue", publié lundi, l’ONG Amnesty international dénonce les licenciements de milliers de fonctionnaires et accuse les autorités turques d’"anéantissement professionnel". Pendant ce temps, deux professeurs turcs grévistes de la faim ont été arrêtés par la police.

Plus de 100.000 limogeages ont été ordonnés en Turquie depuis la tentative de putsch en juillet 2016, en vertu de l’état d’urgence déjà prolongé à trois reprises. Persuadé que les institutions de l’Etat sont infiltrées par des fidèles de Fethullah Gülen, le gouvernement ratisse au plus large, par crainte d’une nouvelle tentative de putsch et de fuites parmi les suspects. L’organisation non-gouvernementale Amnesty international juge ces limogeages "politiques et arbitraires" dans un rapport intitulé "Pas de fin en vue" publié lundi. Il est basé sur 61 entretiens –dont 33 fonctionnaires limogés, des avocats, des syndicats et des autorités turques- menés à Ankara, Istanbul et Diyarbakır.

L’organisation pointe du doigt la vague de licenciement qui touche tout le secteur public sur des motivations décrites comme "abusives et discriminatoires", sous couvert de lutte contre le terrorisme. Au total, selon Amnesty international, 33.000 enseignants et employés du ministère de l’Education ont notamment été limogés, 24.000 policiers et employés du ministère de l’Intérieur, 8.000 membres de l’armée, 5.000 universitaires et employés de l’éducation supérieure, et quelque 4.000 juges, procureurs, et autres membres du ministère de la Justice.

Annulation des passeports

L’ONG s’inquiète aussi des conséquences "catastrophiques" sur la vie des licenciés et dénonce un "anéantissement professionnel". En cause notamment : l’interdiction pour de nombreux fonctionnaires de travailler à titre privé dans des professions réglementées par l’Etat, comme le droit et l’enseignement. Et l’annulation des passeports des fonctionnaires renvoyés du secteur public, soit une interdiction tacite de quitter le territoire. "L'onde de choc de la répression qui a suivi la tentative de coup d'État en Turquie continue de ruiner la vie de nombreuses personnes qui ont perdu leur emploi et ont vu leur vie professionnelle et familiale anéantie, a déclaré Andrew Gardner, chercheur sur la Turquie à Amnesty international. Déshonorés par le qualificatif de ‘terroristes’ et privés de leurs moyens de subsistance, de nombreux citoyens en Turquie ne peuvent plus poursuivre leurs carrières et leurs perspectives de retrouver un autre emploi sont bloquées."

Le point commun des personnes limogées interrogées par Amnesty international est qu’aucun "n'a obtenu d'explication, hormis l'accusation collective d'entretenir des liens avec des organisations terroristes". Selon des témoignages recueillis par l'organisation, il suffit d'avoir été signalé par quelqu'un comme partisan de Fethullah Gülen pour se voir banni de la fonction publique, sans possibilité de se défendre. Face à la commission censée évaluer les cas de recours, qui n’est "toujours pas opérationnelle" selon Amnesty international, l’organisation appelle Ankara à mettre en place "un mécanisme d’appel réellement indépendant, impartial, transparent et efficace".

Lundi, jour de publication du rapport d’Amnesty international, s’est ouvert le procès de plus de 200 instigateurs présumés du putsch manqué. Le même jour, les autorités turques ont arrêté deux professeurs turcs qui observent une grève de la faim depuis plus de deux mois, pour protester contre  leur licenciement. Nuriye Gülmen, universitaire, et Semih Özakça, instituteur à l’école primaire, en grève de la faim depuis le 9 mars avaient choisi comme lieu de sit-in le monument des droits de l'homme à Ankara. Plus de 260 nouveaux mandats d'arrêt ont été émis hier par les autorités turques dans le cadre d'enquêtes contre les réseaux gulénistes. 

Solène Permanne (http://lepetitjournal.com/istanbul) mercredi 24 mai 2017

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Publié le 23 mai 2017, mis à jour le 23 mai 2017

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