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PAS LE RAKI NI LA BIÈRE – La boisson nationale des Turcs est …

Écrit par Lepetitjournal Istanbul
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 9 février 2018

Le rakı ou la bière ne seraient pas la “boisson nationale” des Turcs, comme on l’entend souvent. Selon le Premier ministre Erdoğan, l'ayran à base de yaourt, de sel et d’eau mérite seul le titre de “boisson nationale”. Cette affirmation coïncide avec l'annonce de nouvelles mesures contre la vente et la promotion de l'alcool.

"Dans les premières années de la République, certains livres présentaient la bière comme la boisson nationale. Alors qu’en réalité, notre boisson nationale est l'ayran", a déclaré Recep Tayyip Erdoğan vendredi lors d’un symposium consacré aux politiques sur l'alcool.

Photo Robin Lee/Flickr/CC

Le Premier ministre a profité de l'occasion pour annoncer de nouvelles règles sur la consommation et la vente de boissons alcoolisées. Une série de mesures devraient donc s'ajouter à celles adoptées en janvier 2011 (relire ici notre article sur le sujet), qui prévoyaient notamment l'interdiction d'associer une marque d'alcool ou de tabac au sport ou à un événement.

Le gouvernement s’apprêterait à décréter une nouvelle augmentation des taxes sur les boissons alcoolisées, nécessaire à l'économie du pays selon le Premier ministre. "Si les prix augmentent, excusez-nous, mais nous y sommes contraints, a-t-il expliqué. Les taxes sur la consommation sont notre plus importante source de revenus, étant donné que nous n'avons pas de puits de pétrole".

La lutte contre l'alcool au volant et dans la publicité est une autre priorité du gouvernement, qui souhaite mettre en place le même type d'avertissements dissuasifs que sur les paquets de cigarettes. Objectif : protéger les jeunes de l'alcoolisme, en limitant également la publicité pour les boissons alcoolisées dans les journaux, en vertu de l'article 58 de la Constitution. Dans son étude* sur la consommation d'alcool dans la Turquie contemporaine, Sylvie Gangloff note que le gouvernement "invoque constamment l’article 58 de la Constitution, au nom de la protection de la famille et des enfants, en renvoyant la consommation d’alcool à la sphère privée".

L'usage politique de l'alcool
Dans son discours de vendredi, Recep Tayyip Erdoğan s’est défendu de toute atteinte à la laïcité ou de toute tentative de changer les modes de vie d’une partie des Turcs, invoquant la "santé des citoyens". D'après l'étude de Sylvie Gangloff, près de huit Turcs sur dix ne boivent pas d'alcool : "C’est un pays où l’abstinence est la règle pour près de 8 personnes sur 10 (78,4% de la population) contre à peine 0,3 personne sur 10 (2,6%) en France". Selon cette étude, l'alcool fait l'objet d'un usage politique et identitaire : "Boire ou ne pas boire a toujours été un acte et un discours politique, et cela l’est de plus en plus. Et cela ne date pas de l’arrivée de l’AKP (Parti de la justice et du développement, ndlr) au pouvoir. Boire ou pas est depuis longtemps déjà une question d’identité et de classe en Turquie", assure-t-elle.

La consommation d'alcool aurait également baissé ces dernières années en Turquie, du fait de "l'augmentation graduelle et considérable des taxes" par l'AKP, souligne la chercheuse. La directrice générale de l'OMS (Organisation mondiale de la santé), Margaret Chan, a quant à elle récemment salué les efforts de la Turquie pour réduire la consommation d'alcool et de tabac.

Marlène Alibert (http://www.lepetitjournal.com/istanbul) lundi 29 avril 2013

(*) Etude sur les pratiques et représentations de l'alcool dans la Turquie contemporaine menée par  Sylvie Gangloff (Inalco/EHESS).

lepetitjournal.com istanbul
Publié le 28 avril 2013, mis à jour le 9 février 2018
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