A l'occasion de la Journée internationale des droits des femmes et du mois de la francophonie, le lycée francophone Notre Dame de Sion a inauguré samedi une exposition consacrée aux portraits de femmes : Femmes ottomanes et dames turques. Une collection de plus de 200 cartes postales de 1880 à 1930 retrace l'évolution de la place de la femme dans l'Empire ottoman et au c?ur d'une toute nouvelle République. Des portraits de femmes dans leur quotidien, qui livrent une certaine réflexion sur la condition féminine de l'époque, loin des visions stéréotypées...
L'exposition Femmes ottomanes et dames turques se base sur les propos du livre éponyme écrit par Christine Peltre, historienne et spécialiste de l'orientalisme, paru aux éditions Bleu autour en 2014. Dans ce livre, l'auteur contextualise 200 portraits de femmes ottomanes, qu'elles soient juives, musulmanes ou chrétiennes, ancrées dans leur quotidien.
La période 1880-1930 correspondant à l'âge d'or de la carte postale et de la photographie timbrée, quel meilleur support pour témoigner du statut de la femme à cette époque, de sa place sociale et de sa progressive émancipation ? L'inauguration de l'exposition a été précédée d'une conférence, où sont intervenues Christine Peltre et Lizi Behmoaras, écrivaine et journaliste qui signe la postface du livre. Yann de Lansalut, directeur du lycée, ainsi que la directrice adjointe, Suzan Sevgi, étaient aussi présents.
Portraits de femmes : célébration et recontextualisation
Ce 7 mars, Lizi Behmoaras commence avec ces mots : "En cette veille de la Journée internationale de la femme, je ne peux que vous parler d'elle, de son parcours émancipatoire de l'Empire ottoman à la République". C'est l'envie de célébrer la femme et de montrer un tout autre visage de celle-ci sous l'Empire ottoman et le début de la République qui a motivé l'événement. L'exposition présente essentiellement la collection de cartes postales de Pierre de Gigord ainsi que les acquisitions de Notre Dame de Sion, qui offrent aux visiteurs un formidable éventail ethnique et historique de la femme ottomane et, plus tard, turque.
Le cadre est secondaire : sur ces photographies timbrées, ce sont les visages et les vêtements qui accrochent le regard. Plus on avance dans l'exposition, plus l'image de l'orientalisme à la Théophile Gautier ? avec ses "odalisques" ?s'évapore pour laisser place à une réalité photographiée, les femmes du quotidien. "C'est un hommage aux femmes qui ont joué un rôle dans la conquête de l'indépendance de leur pays, dont la silhouette est ici magnifiée bien que usée, abîmée dans une réinterprétation de la peinture orientaliste d'autant plus efficace qu'elle en reprend les accessoires" souligne Christine Peltre. Une partie des cartes postales font aussi référence à ces "Pénélopes", occupées encore et encore aux activités de tisseuse, couseuse, brodeuse? "activités exclusivement dédiées aux femmes, comme on le voit sur les cartes postales orientales", poursuit Christine Peltre.
Des cartes postales qui parlent d'Histoire...
En se promenant dans la galerie, on croise les portraits de femmes de Césarée, Palestine, Crète, Macédoine et bien plus encore, qui ouvrent sur une vision multiconfessionnelle et multiethnique de l'Empire avant sa disparition. Ces cartes postales, anciennes publicités et photographies timbrées, témoignent aussi de l'émancipation féminine et de la modernité dans laquelle entre l'Empire au début du XXème siècle. On ne découvre pas seulement des scènes de harems, ou des femmes en costume traditionnel, mais aussi des femmes en train de lire ou sur des affiches lors du rétablissement de la Constitution en 1908, appelant leurs congénères a jouer un rôle actif dans la société.
Lizi Behmoaras évoque une ?prise de conscience? des femmes vis-à-vis de leurs droits dès la moitié du XIXème siècle : "le portrait de la femme turque en elle-même se transforme, elle acquiert une forme d'identité sociale, devient capable d'orienter son avenir et celui de son pays" C'est ce que met en exergue toute l'exposition.
Femmes ottomanes et dames turques est une belle occasion de découvrir l'Histoire de la fin l'Empire ottoman et du début de la République, à travers les portraits de celles qui ont participé à ces changements. Elle amène aussi, évidemment, à réfléchir sur la femme turque dans la société d'aujourd'hui? ?Journée internationale? ou non.
Morgane Cruzel (www.lepetitjournal.com/istanbul) lundi 9 mars 2015
L'exposition est à voir à la galerie Notre Dame de Sion près de la place Taksim. Elle sera ouverte à partir d'aujourd'hui tous les jours, sauf le dimanche, de 11h à 18h et jusqu'à 20h les soirs de spectacles et concerts jusqu'au 22 mai 2015.
Adresse : Notre Dame de Sion Frans?z lisesi, Cumhuriyet Cad. 127, Harbiye, Istanbul











































