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Covid-19 : comment le centre de LP4Y de Bombay a traversé la crise ?

LP4Y Mumbai coronavirus indeLP4Y Mumbai coronavirus inde
Écrit par Johana Burloux
Publié le 24 novembre 2020, mis à jour le 19 décembre 2023

La crise de la Covid-19 a eu un impact sur chaque communauté, chaque famille. Bien sûr, chez les plus démunis, les enjeux ont pris des proportions d’autant plus importantes . Alors que le déconfinement commence à redonner du souffle aux différents secteurs de l'économie et aux rues de Bombay, nous avons eu des nouvelles du centre de formation LP4Y, au nord de Bombay, cette ONG qui soutient les jeunes actifs défavorisés. Voici comment ils ont traversé la crise, entre conditions difficiles, adaptabilité, mais aussi, grandes victoires.

 

lp4y coronavirus mumbai malwani


En Inde, LP4Y est présente dans 6 villes. Les Life Project Centers accueillent en moyenne 34 jeunes qui y reçoivent une formation continue assez intense de neuf mois pour les lancer sur le marché de l’emploi. Les jeunes qui bénéficient de ce programme s’autonomisent et gagnent confiance en eux, jusqu'à franchir des portes et briguer des postes qui leur semblaient jusque-là hors de portée. Ils sont encadrés par des volontaires, souvent français, qui vivent sur place, en mission pour une année, parfois plus. ;epetitjournal.com de Bombay a plusieurs fois rendu visite au centre local de LP4Y qui se situe dans le nord-est de la ville. (Le Life Project Center de LP4Y à Mumbai)

Le bidonville de Malwani est une enclave, en bord de mangrove, accrochée au quartier de Malad et particulièrement isolée. La population y est principalement musulmane, une population plus susceptible d'être stigmatisée en Inde.

 

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L’impact du confinement sur le bidonville de Malwani

Alors que Bombay se fermait, qu’il n’y avait plus de transport, dans cette période très particulière et assez brutale du début de confinement en Inde, Gaëlle a réussi à arriver à Bombay, puis jusqu'à Malwani, le 24 mars. C’est elle qui tiendra le centre pendant cette période de crise.

Volontaire aguerrie de LP4Y pour laquelle elle travaille depuis 5 ans, Gaëlle ne connaît néanmoins ni la ville, ni le centre. Le défi sera d’abord de prendre en main le lieu, puis de renouer le lien avec les jeunes, en faisant vivre la communauté et en identifiant les problèmes nouveaux qu’ils rencontrent alors.

Et les difficultés pour ces jeunes sont nombreuses ! Tout d’abord, chez toutes les familles, les membres qui travaillent sont privés de leur emploi (taxi et chauffeur de rickshaws, repasseur, couturière…) et la question de la subsistance devient centrale.

 

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L’aide financière qu’offre LP4Y (entre 1 250 roupies et 1 550 roupies par semaine selon le niveau des jeunes, somme qu’ils épargnent en partie et qui a juste vocation à les aider à suivre la formation et aller aux entretiens) constitue alors presque leur seule source de revenus. Cette somme va donc être exceptionnellement ajustée en ‘crisis funds’, les jeunes peuvent utiliser les économies qu’ils ont déjà réalisé grâce au centre et reçoivent parfois de l’argent en plus selon les besoins. Très isolé et souvent oublié des institutions locales,le quartier de Malwani n’a bénéficié d’aucune distribution gouvernementale de nourriture lors du confinement. Et, seulement 4 jeunes sur l’ensemble des alumnis avaient une carte de rationnement, car ils viennent la plupart du temps de villages extérieurs et n'étaient pas déclarés à Bombay.


Avec le confinement, apparaît une kyrielle d’autres problèmes pratiques : l'accès à l’eau est restreint car les personnes qui actionnent les pompes ne viennent plus comme à l'accoutumée. Il a parfois été réduit à 5 à 7 minutes par jour ce qui ne suffit pas à remplir les seaux dont une famille a besoin pour l'hygiène et la cuisine. La promiscuité est aussi problématique, les familles doivent passer plus de temps ensemble sous un même toit… Or, une habitation fait au mieux 20m2, et quand la mousson est arrivée après trois mois de confinement, les maisons ont pris l’eau de toutes parts car, cette année, les familles n’ont pas pu acheter les fameuses bâches en plastique bleu qui colorent Bombay de juin à octobre, et protègent de la pluie… Le manque d’argent impacte tous les aspects de leur vie quotidienne… jusqu'à leurs besoins corporels. Comme dans beaucoup de bidonvilles, l'accès aux toilettes est extérieur et payant.

 

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Enfin, une autre des conséquences sérieuses pour ces jeunes est sanitaire, non en raison du coronavirus lui-même… mais du fait de la saturation des hôpitaux, ils n’ont plus accès aux soins ni aux médicaments. Or, ces jeunes et leurs familles ont souffert d’autres maladies : typhoïde, problèmes cardiaques, tuberculose, pneumonie, infections… Une des jeunes filles est enceinte et elle ne peut plus assurer son suivi. Dans de nombreux cas, LP4Y intervient financièrement de façon ponctuelle pour aider ces familles.

 

 

L’action de LP4Y au coeur de la crise 

Dans ce contexte, Gaëlle redouble d'efforts pour venir en aide aux jeunes et réorienter l’action du centre. Elle continue d'assurer des formations à distance (deux activités par jour) via les téléphones mobiles ou des feuilles de papier distribuées une fois par semaine, pour maintenir le niveau d’anglais et continuer d’affiner les projets. Elle maintient un contact, constate le moral de chacun et fait vivre le réseau LP4Y des anciens jeunes ayant suivi la formation. 

 

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Une autre partie de son travail est de nouer des partenariats avec d’autres associations sur place. Ils organisent des distributions de nourriture (pendant 1 mois et demi pour 70 à 80 familles) avec les anciens jeunes. 

 

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Enfin, elle anticipe la fin du confinement en les préparant à la recherche d’emploi, réalise des simulations d’entretien, les met en condition. Puis, dès mi-juin, les coachs reviennent, et le centre rouvre finalement officiellement ses portes progressivement à l'automne.

Gaelle le dit, ça n'a pas toujours été facile. Elle a eu le réflexe de beaucoup partager avec ses proches pour traverser au mieux cette période. Un de ses plus grands ressorts reste les jeunes eux-mêmes : leur façon de mettre de la distance et de garder le sourire est un moteur important pour elle.

Et, les efforts payent ! Au sortir du confinement, ce sont 6 jeunes qui trouvent un travail "décent" au mois d'août ! Dans la majeure partie des cas, pour des call centers ou des boutiques d'électronique.



Les perspectives du centre de Malwani

Depuis, le centre a repris son rythme habituel, avec toujours de nouveaux défis.

Le public est en passe de devenir uniquement féminin. Les filles rencontrent encore plus d’obstacles pour l'accès au marché de l’emploi. Le centre de Malwani a donc décidé de se concentrer sur la formation des filles en espérant que leur réussite fera des émules dans leur famille et servira de modèle à leurs petites sœurs.

 

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Certains jeunes du centre ont également commencé à tester une plateforme de cours en ligne mise en place par LP4Y : Digital Inc. La sortie officielle est prévue pour le mois de décembre et elle viendra compléter la formation donnée en présentiel.

 

Aujourd’hui, le centre a besoin de nouveaux “trainers”, des personnes extérieures qui pourraient donner de leur temps pour effectuer 1 ou 2 formations spécialisées par semaine… en communication professionnelle, aide à la recherche d’emploi, maîtrise des outils informatiques.

 

Enfin, le réseau d’entreprises-partenaires que tisse LP4Y est déterminant dans l’aide apportée aux jeunes. En plus, d’une potentielle aide financière, les visites d’entreprises ou les interventions des professionnels dans le centre, réelles ou virtuelles, sont, pour les jeunes, une expérience sans précédent ! Tant par ce qu’ils apprennent, que par l’attention qui leur est accordée.

Des entreprises comme Capgemini, Roquette, Decathlon, BNP Paribas et Michael Page sont déjà investies à différents niveaux. Si vous pensez que vous pouvez apporter votre aide en tant que “traîner” ou en tant qu’entreprise, n'hésitez pas à contacter Alexia :

alexia.guillier@lp4y.org
Whatsapp : +33678540137

 

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LP4Y, association française présente dans sept pays d’Asie et du Proche Orient, a pour but de lancer des jeunes des bidonvilles sur le marché du travail, en les accompagnant sur plusieurs mois. Recherche d’emploi, outils informatiques, anglais, mais aussi projets professionnels, sensibilisation au monde de l’entreprise, aides financières en soutien au suivi de la formation… L’un des plus grands acquis de cette formation est de donner confiance à ces jeunes. Ils prétendent ensuite à des postes qui leur semblaient inaccessibles. Des avancées individuelles qui, bien souvent, créent une synergie. Ces jeunes ouvrent la voie à d'autres, dans leur famille et leur quartier. Cette ONG déploie donc une action ciblée, à l'échelle locale, mais cruciale si l’on croit que changer la vie d’une personne est déjà un progrès en soi.


 

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