La vérité sort elle du crayon des enfants ? C’est en tout cas ce qu’a voulu découvrir lepetitjournal.com à travers un appel à témoignages auquel des enfants ont accepté de répondre à travers des dessins.
4 murs et 1 toit
Sans se lancer dans une analyse psychologique des enfants (nous n’en avons absolument pas la compétence !), nous pouvons remarquer que le confinement a été souvent illustré par une maison, parfois colorée, parfois non mais surtout…bien hermétique. C’est le cas d’Adèle et Adrien qui ont participé à un concours « Your world during lockdown ». Adèle a dessiné Amelie, une de ses amies et elle-même, séparées par un mur (mais qui semblent garder le sourire). Adrien, quant à lui, a dessine sa maison confinée au milieu des poissons qui nagent librement. Cette maison quadrillée montre-t-elle l’envie d’en sortir vite, au même titre que les poissons ?
Du côté de Jules, 6 ans, une chose est sûre, le confinement c’est une maison, avec une cuisine et des lits. Dehors, un jardin et une piscine, essentiels à ses yeux ? Que dire des nuages noirs au-dessus de la maison, est-ce comme cela qu’il perçoit le virus ?
Chez Anne-Loïse, l’école a proposé aux enfants d’écrire un poème, accompagné d’illustrations. Pour Léa-Marie, 7 ans, cette maison est au cœur de ses mots : elle ne lui permet plus de voir ses amis, ni de faire de la balançoire et cela la rend triste.
On avance quelques années pour arriver à Camille, 17 ans, qui réalise divers œuvres suite à un défi lancé par sa professeure d’art sur le thème du confinement. Voici « Rigidity from the Inside ». Elle nous l’explique : « mon interprétation de ce que je vois à l'intérieur avec ce morceau de papier géométrique. Pour Moi, l'Inde est toujours un grand chaos avec du bruit, le mouvement, les personnes, etc. Mais, pour l'instant, en raison de l'isolement l'extérieur est vide, il n'y a plus le mouvement ou le bruit (…) »
Pour aller plus loin, nous avons demandé l’avis de Sandie Langellier, psychologue clinicienne, contributrice au petitjournal.com : Concernant la notion du dehors et du dedans, Le confinement est bien embêtant pour le petit qui commence à s'aventurer hors des bras du parent. A ce stade de compétence, la découverte du monde s'apprend au travers des règles qui le régissent. Aussi, il faudra s'armer de tolérance face à l'énervement du petit qui va trouver un excès de limites dans ce confinement, surtout si l'habitat est privé de parties extérieures. Pour contrecarrer l'angoisse et la frustration, offrez-lui une variété de stimuli qui vont contribuer à l'amuser et le contenir : bain, musique, espace moelleux, espace coloré... Libre à vos idées.
Concernant la notion de séparation, faire l'expérience de la différence ou du changement renvoie à la question du lien. Dans nos sociétés où les enfants sont confiés dès leur plus jeune âge, ils sont très habitués aux cérémoniels ponctuant les passages d'un espace à un autre ou d'une activité à une autre. L'arrêt brutal de leur course quotidienne et imposé par le confinement a forcément une résonance. Comment se séparer des copains (par exemple) sans se perdre de vue ? Comment poursuivre le calendrier sans perdre le fil ? C'est un jeu de coucou que l'individu, y compris adulte, explore sans fin.
Du temps avec sa famille
Pas tous les jours facile de comprendre que Papa est présent sans être présent pour eux, que Maman va leur faire la classe, que le meilleur copain est derrière un écran d’ordinateur, ou encore qu’il n’est plus possible d’aller faire du vélo au parc…Alors ils s’évadent parfois par le dessin ou la peinture.
Thomas, 7 ans, apprécie avoir le temps et le passer avec sa maman, il l’écrit et l’illustre ci-dessous :
Revenons à Camille. Voici Family Bond : « Tout d'abord, j'ai commencé à prendre des photos sur la façon dont ma famille partageait le lieu et l'espace pendant la quarantaine. Parfois, nous nous réunissons tous dans un l'espace et chacun fait son truc ou parfois nous essayons de prendre des habitudes saines. Ce sont des moments que nous passent indépendamment mais la plupart du temps nous sommes ensemble. Pour représenter ce lien familial, j'ai fait un dessin où les gens sont mélangés et connectés les uns aux autres. Pour montrer que même s'il y a de l'espace autour d'eux ils restent liés et proches les uns des autres. Cette pièce est appelé "lien familial". »
Pour aller plus loin, nous avons demandé l’avis de Sandie Langellier, psychologue clinicienne, contributrice au petitjournal.com : Petits enfants petits soucis. Grands enfants, grands soucis. L'adolescence désigne une zone de transition. Durant cette période, le jeune naturellement va se tourner vers l'extérieur et investir le collectif. Comment faire vivre cet espace indispensable à leur processus d'individuation durant le confinement ? Notre société moderne ne manque pas de moyens. Mais attention aux sirènes du virtuel. Attention aux déconvenues vécues dans l'intimité de la chambre. Certains auront trouvé une zone de repli peut-être aidante. Il faudra alors être vigilant à l'après et les aider à réinvestir l'extérieur de manière apaisante.
Le confinement est synonyme d’isolement
Une autre Camille , 11 ans, pense au Petit Prince et nous fait part d’une œuvre réalisée par ordinateur. Elle nous raconte son dessin : « Je pense aux personnes qui sont seuls dans ce confinement Nous nous sommes tous les 5 et c est déjà parfois dur ..mais ceux qui sont seuls comme nos grands-parents..Cela me fait beaucoup de peine. Le Petit Prince est seul sur sa planète ..et il est debout, il attend..c est un message pour eux ! »
Camille, 17 ans, a réalisé deux œuvres autour de la notion d’isolement : « Car je n'étais pas sûr de savoir comment représenter ce que j'avais en tête. Pour ma première, l'idée était de faire une comparaison entre la vie normale et le passage àl'isolement, le jaune faisant référence aux personnes et l'espace bleu. Ma deuxième oeuvre portait davantage sur la façon dont l'isolement est différent selon les parties du monde. »
Et après ?
Les enfants ont-il conscience de l’après confinement ? Difficile à dire pour les très jeunes. En revanche, Alice, 11 ans, nous partage l’histoire de 3 personnages qui n’ont pas respecté la planète : ils coupent des arbres, jettent des papiers par terre, ne pensent qu’au profit et à l’argent. Un jour ils se retrouvent en confinement et lorsqu’ils sortent de celui-ci, la nature « se venge » et l’Homme qui a coupé l’arbre a les pieds qui deviennent racine par exemple.
Pour aller plus loin, nous avons demandé l’avis de Sandie Langellier, psychologue clinicienne, contributrice au petitjournal.com : A défaut de maîtriser les mécanismes de la pensée, les enfants sont doués d'intuition. Ils savent parler des sujets les plus graves en toute simplicité de moyens et de sens. Mais gare à l'interprétation ! Simple ne veut pas dire facile. De plus, ils n'aiment pas se sentir figés dans le marbre. Ils ne demandent qu'à s'ouvrir au monde. A ce propos, le confinement est bien embêtant.
En conclusion, ce confinement n'est décidément pas une période de vacances pour les parents. En mots, en dessin ou en image, ils seront mobilisés dans l'accompagnement du travail d'élaboration de tous ces sujets révélés par le coronavirus : la séparation, l'amitié, la pauvreté, la richesse, l'isolement, l'entraide, la vieillesse, la santé, la mort, l'environnement etc... Bref, confinés mais pas en bernes !