Deux évènements du week-end ont permis aux médias Mumbaikar de parler de la communauté LGBT : la Gay Pride samedi et la sortie de la comédie romantique Ek Ladki Ko Dekha Toh Aisa Laga vendredi.
La Gay Pride de Mumbai s'est déroulé samedi 2 février. Contrairement aux années précédentes, la marche de 2019 a pris un accent festif suite à la dépénalisation de l’homosexualité votée en septembre 2018 par la Cour Suprême (section 377 du Code Pénal). Les “prides” précédentes revendiquaient la suppression de cette loi qui date du temps de l’empire britannique.
“L’objectif de la pride est de revendiquer des droits égaux pour tous sans considération de genre, race, caste ou sexualité. Bravo à la Cour Suprême pour cette décision qui représente le premier pas vers la liberté. Notre voyage commence à peine”, a déclaré au Asian Age Saurabh Bondre, membre du comité organisateur de la Queer Azadi Mumbai.
Les couleurs de l’arc en ciel flottaient dans les rues autour du carrefour August Kranti Maiden près du quartier de Grant Road quand, environ 15 000 personnes, selon les journaux locaux, ont défilé pour célébrer leurs droits en musique. Beaucoup d’entre elles ont affirmé qu’elles se sentaient maintenant en sécurité mais certains ont indiqué aux journalistes présents qu’ils attendaient plus du gouvernement et notamment, en ce qui concerne le droit au mariage et à l’adoption ainsi que l’insertion professionnelle. “Nous sommes contents qu’il y ait moins de tensions envers nous mais nous devons encore travailler sur les aspects légaux du mariage, de l’adoption et de l’emploi si nous voulons pouvoir vivre une vie meilleure et “normale””, confie un des participants.
Parallèlement à la Gay Pride, sortait vendredi un film évoquant un sujet encore tabou dans la société indienne : la reconnaissance par les parents et la famille de l’homosexualité d’un enfant.
La bande annonce soigneusement préparée par les producteurs commence par la scène traditionnelle de tout film Bollywood dans laquelle un père essaie en vain de marier sa fille avec un beau célibataire. Chansons et danses se succèdent et c’est seulement à la fin qu’un indice apparait laissant à penser que le sujet n’est pas aussi classique qu’il n’y parait.
Ek Ladki Ko Dekha Toh Aisa Laga (Ce que j’ai ressenti lorsque j’ai rencontré cette fille) est considéré par les journalistes et les critiques de cinéma comme un film pionnier en Inde : c’est le premier mettant en scène des stars et abordant le sujet de la reconnaissance et de l’acceptation de l’homosexualité d’une fille dans une famille.
La promotion du long métrage a été minutieusement orchestrée afin de ne pas mettre en avant le sujet principal pour éviter la controverse : à titre d’exemple, lors de la sortie en salle de Fire en 1996, qui mettait en scène une relation lesbienne, des foules de fanatiques hindous ont saccagé les cinémas qui le projetaient.
Plusieurs acteurs de Ek Ladki Ko Dekha Toh Aisa Laga (ELKDTAL) sont des stars de Bollywood. Le père et la fille de la légendaire famille Kapoor (Anil et Sonam) y jouent pour la première fois ensemble. Rajkumar Rao, une autre figure du cinéma de Bombay, y incarne un des seconds rôles.
Le scénario romantique, les décors et la musique sont tous des classiques de Bollywood, la seule différence étant que l’intrigue tourne autour d’un couple de femmes. Le réalisateur, Shelly Chopra Dhar, avoue : “la Cour Suprême a aboli la section 377, c’est bien, mais la prochaine étape est de changer l’attitude des gens. Cependant, elle ajoute : “Raconter des histoires est quelque chose de profondément ancrée dans la culture indienne et le cinéma indien remplit ce rôle. Je ne veux pas donner de leçon à mes spectateurs mais je préfère leur faire vivre une situation à travers mes personnages.”
Comme toujours, le succès du film dépendra de la réaction de son audience. Le réalisateur a déclaré aux journalistes juste avant la sortie : “La règle d’or du cinéma est de divertir, si vous ne la suivez pas, ce n’est pas du cinéma.”
Malheureusement pour ELKDTAL, selon boxofficeindia.com, le film a connu un démarrage très lent samedi alors que c’était la seule sortie de la semaine. Il n’aurait rapporté qu’environ 3 crores roupies (environ 370 000 euros) ce qui est faible pour le marché local : à titre de comparaison, Thugs of Hindustan a engrangé 5,7 millions d’euros lors de son premier jour de sortie en novembre 2018, c’est la plus grosse recette pour le premier jour de projection.