La Fondation Croucher, qui participe au financement des études scientifiques de jeunes Hongkongais à l'étranger, s'est intéréssée à la politique de gestion de la population des sangliers à Hong Kong à partir d'une étude établissant une comparaison avec d'autres endroits dans le monde.
L'abattage des sangliers à Hong Kong
En novembre 2021, le Département de l'agriculture, de la pêche et de la conservation de Hong Kong a annoncé qu'il annulerait sa politique de longue date sur le piégeage et la stérilisation des sangliers dans la ville. Le gouvernement a mis en œuvre sa nouvelle politique d'appâtage et de mise à mort dans le but de gérer la population animale et de contrôler ce qui était un problème de nuisance de plus en plus visible.
Avant la décision, les médias avaient largement rendu compte de plusieurs attaques de sangliers cette année-là, y compris un incident impliquant la mère d'une pop star de 83 ans qui s'est fracturé la hanche et s'est brisé le coude après une rencontre près de chez elle. Avec une attention croissante portée au nombre de personnes blessées par des sangliers, l'incident déclencheur du changement de politique du gouvernement s'est produit plus tôt dans le mois, le 9 novembre, lorsqu'un sanglier blessé aperçu à North Point avait renversé et mordu un agent de police auxiliaire de Hong Kong. qui avait été appelé sur les lieux pour prêter main-forte.
Les sangliers de Hong Kong comparables aux éléphants en Afrique
Au cours des 14 mois qui ont suivi la décision, 320 sangliers ont été tués en décembre 2022. L'abattage de Hong Kong de sa population de sangliers a suscité un débat féroce, pesant la question de la tolérance et du risque en ce qui concerne la sécurité humaine, alors que les personnes et la faune partagent le même espace.
Il n'y a jamais de solution simple au problème, selon le Dr Hannah Mumby, professeure adjointe à l'École des sciences biologiques de l'Université de Hong Kong, qui a partagé son point de vue dans une interview. Mumby étudie les interactions comportementales entre les éléphants et les humains sur le terrain depuis des années en Afrique, en Inde et dans les pays d'Asie du Sud-Est. Cela a des parallèles avec la question des sangliers, car une telle compréhension de la co-adaptation de l'homme et de la faune pourrait être extrapolée.
Les interactions avec les humains peuvent au fil du temps modifier la personnalité, les préférences ou même les traits physiques des animaux, dit Mumby. Par exemple, la récolte sélective de l'ivoire en Afrique a entraîné une diminution globale de la taille des défenses pour de nombreux clans d'éléphants. Les éléphants ont également développé un goût pour les cultures agricoles et les déchets alimentaires des ménages et, par conséquent, ils rechercheront ces sources de nourriture. Les groupes itinérants d'éléphants affamés causent souvent des dommages aux biens des agriculteurs et sont considérés comme une nuisance pour les communautés humaines qui entourent les habitats naturels.
Etude des interactions entre hommes et sangliers
Les similitudes sont claires à Hong Kong et sa population de sangliers. En 2019, Mumby a lancé le «Hong Kong Wild Boar Project», qui a commencé comme un moyen d'enquêter sur les divers modèles et incidents d'interaction homme-sanglier. Elle s'est lancée dans ce projet avec les encouragements du professeur David Dudgeon, professeur émérite d'écologie et de biodiversité à l'université. L'objectif était de comprendre la relation entre la faune et les gens dans un contexte local.
"Comment les sangliers se comportent autour des gens et comment les gens se comportent autour d'eux sont la paire de questions en cours ici", a expliqué Mumby. "Il n'y a pas non plus de solutions faciles, car de nombreux facteurs interdépendants contribuent aux problèmes, tels que la gestion des déchets alimentaires, l'urbanisme, l'intérêt des médias et la perception des gens envers la faune."
En 2022, Mumby et l'équipe ont publié un article dans la revue Human Dimensions of Wildlife. Leur travail a étudié les différences dans les rapports sur les interactions homme-sanglier dans les médias d'information en chinois et en anglais. Ils ont constaté que les premiers citent généralement les sentiments des résidents locaux tandis que les seconds mettent l'accent sur les opinions d'organisations non gouvernementales, d'organisations caritatives ou de groupes de pression, provoquant une grande divergence dans les perceptions envers les sangliers. Cette étude souligne l'importance d'intégrer les attitudes des gens et d'impliquer les humains dans les études écologiques et leur application.
Comment organiser la co-existence avec les sangliers à Hong Kong ?
Le langage est révélateur de la façon dont les gens se représentent les relations entre l'homme et la faune et pourrait être un obstacle au succès de la co-adaptation. "Je ne pense pas que le "conflit" qui est généralement utilisé pour discuter du problème des sangliers soit approprié, car le mot lui-même a déjà une implication négative", a déclaré Mumby. « Je préfère utiliser le terme « coexistence » ; c'est plus neutre.
Bien plus que la sémantique, ces termes renvoient aux attitudes dominantes. Ce n'est vraiment que le début, selon Mumby. Une solution globale nécessiterait des conversations approfondies et une réflexion nuancée sur la façon de façonner le paysage polyvalent de Hong Kong. « Pour commencer, nous devons nous demander : quel est le nombre acceptable de sangliers en ville ? Quels sont les comportements acceptables ? Nous devons garder à l'esprit qu'il s'agit d'un espace partagé pour les humains et d'autres animaux sauvages comme les sangliers. »
On en voit des échos ailleurs dans la ville et au-delà de ses frontières. L'année dernière, les législateurs de Hong Kong ont porté leur attention sur l'interdiction de nourrir la faune, l'étendant aux oiseaux tels que les pigeons sauvages. Des scientifiques et des experts de la faune ont également observé la croissance de la population de sangliers dans toute l'Europe, avec une statistique estimant jusqu'à 1 million de sangliers errant dans la campagne italienne uniquement et causant environ 22 millions de dollars de dégâts agricoles par an. Ces rapports soulignent le défi de protéger nos communautés tout en soutenant la faune.
Une planification urbaine adaptée aux sangliers
Le travail de Mumby met en lumière les conséquences involontaires des interactions homme-faune et les dangers de considérer notre paysage comme une dichotomie stricte entre nous et eux. L'objectif n'est peut-être pas simplement d'éliminer les accidents humains ou les dommages matériels. Apprendre de nouvelles interventions et une gestion réussie de la coexistence impliquerait une compréhension intégrée des impacts que les interactions ont également sur la faune.
"Nous avons déjà vu de nombreux sangliers en surpoids par rapport à ceux qui ne sont pas nourris par les randonneurs", a déclaré Mumby. "Nous avons également constaté une augmentation de la quantité de plastique dans l'estomac des sangliers morts car ils trouvent de la nourriture dans les poubelles. C'est juste leur nature, bien sûr ils utilisent ce qu'ils ont, bien sûr ils se comportent comme ils le feraient.
"Le point est que nous devrions avoir une planification urbaine inclusive avec nos meilleures connaissances afin d'intégrer les choses autour de manière pacifique."
Article original en anglais publié le 5 février 2023 sur le site de la Fondation Croucher
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