Satire du Hong Kong d’aujourd’hui, Three Husbands est le dernier volet d’une trilogie sur la prostitution et se déroule sur fond de Greater Bay Area. Sacré meilleur film au Festival International de Tokyo et Chloe Maayan meilleure actrice aux Golden Horse Awards, c'est tout sauf un film commercial.
Depuis Made in Hong Kong en 1997, Fruit Chan s’est imposé comme l’un des rares le cinéastes indépendants de Hong Kong. En 2000, il signait Durian Durian, film sur la prostitution de jeunes Chinoises venues du continent vers Hong Kong. Premier volet d’une trilogie, il était suivi de Hollywood Hong Kong en 2001 mais il a fallu attendre près de 18 ans pour voir l’ultime chapitre, l’histoire inhabituelle de Mui, une fille de pêcheur handicapée qui se prostitue avec entrain.
Propos recueillis par Arnaud Lanuque
Qu’est-ce qui vous a motivé à signer ce dernier épisode, près de 18 ans après Durian Durian?
En fait, j’avais déjà l’idée en tête un petit peu après avoir réalisé Durian Durian. Mais c’était très difficile de trouver l’actrice pour jouer le rôle principal. Il fallait qu’elle soit capable de jouer la comédie et des scènes de sexe. Cette recherche a pris des années.
Three Husbands est différent stylistiquement des deux précédents volets de la trilogie. Pourquoi une telle approche?
Durian Durian était assez réaliste et Hollywood Hong Kong était bourré d’humour noir et très cinématique. Alors, pour ce troisième film, j’ai voulu faire encore quelque chose d’autre, en plaçant l’action sur la mer, ce qui est inhabituel dans le cinéma hongkongais. Il semble qu’on ait oublié que Hong Kong était autrefois un village de pêcheurs.
Pourquoi inclure une sous-intrigue avec une prostituée hongkongaise travaillant en Chine?
Il y a 20 ans, c’était les chinoises du continent qui venaient travailler à Hong Kong mais depuis, les choses ont complètement changé. Ce n’est pas facile de vivre à Hong Kong et certaines filles préfèrent tenter leur chance en Chine. Les flux se sont inversés. C’est donc un clin d’œil ironique à Durian Durian.
Pourquoi avoir altéré les couleurs durant la dernière partie du film?
Cela tient à la manière dont nous avons organisé le film, en trois chapitres distincts: la terre, l’eau et le vide. Le concept de vide est très important pour les Chinois. Cette décoloration était un moyen pour moi de l’illustrer visuellement et de relier le début et la fin du film.
Etant donné les sujets extrêmement locaux, avez-vous craint que le public étranger ne puisse pas apprécier?
En effet. Dans la version originale du script, j’avais essayé de rendre la situation politique et sociale plus facilement abordable pour ce public. J’avais peur qu’ils ne comprennent pas la relation qu’il y a entre Hong Kong, Macao et Zhuhai. Mais en fait quand je regarde des films étrangers, je suis capable d’apprécier l’histoire qui m’est racontée, même si je ne suis pas au courant de toute la situation du pays concerné. Aussi, ce n’est pas un soucis.
Remerciements: Tiffin Shing
Note de la rédaction: Depuis la parution de cet article, Chloe Maayan a remporté le titre de meilleure actrice aux Hong Kong Film Awards