Depuis que l’actuelle Chief Executive Carrie Lam a annoncé sa démission ce lundi 4 avril, l’attention de la sphère politique Hong Kongaise se porte sur son second, John Lee, qui, ce 6 avril, a officialisé sa candidature. Si les autres candidats ont jusqu’à dimanche pour se faire connaître, l’ancien Chief Secretary semble être l’unique postulant bénéficiant de l’amont de Pékin pour l'élection du 8 mai. C’est lors d’une conférence de presse virtuelle intitulée « Commençons ensemble un nouveau chapitre pour Hong Kong », qu’il a présenté son projet de gouverner la région dans une approche "axée vers les résultats".
L'approche de John Lee rompt avec le "laxisme" de Carrie Lam.
Son discours d’ouverture ne contenait aucune proposition de loi concrète. L’ancien policier de 63 ans n’a toujours pas officialisé son manifeste politique, qui ne devrait être rendu publique qu’à la fin du mois d’avril, soit une ou deux semaines avant le vote, pour laisser un temps pour le Comité d’Élections de l’étudier en profondeur.
La promesse sortante de la conférence de presse est une « approche axée vers les résultats ». Cette doctrine est l’incarnation du mécontentement de Pékin vis-à-vis de ce qu’il qualifie « d’inefficacité » dont aurait fait preuve Carrie Lam dans sa tentative de régler la crise à sa source.
John Lee, insista, que bien que faisant partie de la même administration, il voyait sa fonction le priver de véritable pouvoir d’action, jusqu’à sa nomination en tant que Chief Secretary il y a de ça moins d’un an.
« Le gouvernement de Hong Kong a toujours insisté sur la quantité d’efforts et de procédures nécessaires à la résolution de problèmes tels que le logement et la pauvreté. Mais ces problèmes n’ont pas encore été résolus, et cela mécontente Pékin » a-t-il déclaré. C’est cette « inefficacité » à répondre concrètement à des problèmes que John Lee condamne.
Cependant, il prône une conservation des lois qui prouvèrent par le passé leur pertinence. En effet, il a ajouté que « le changement ne doit pas se faire pour changer : les bonnes politiques et les bonnes pratiques doivent rester ». Globalement, la candidature de Lee se veut être une incarnation concrète et pragmatique de la résolution des problèmes déjà reconnus, mais encore trop délaissés.
Le désir de John Lee de corriger son image de policier
John Lee qui commença sa carrière en tant que membre influent de la police en 1977, et fut secrétaire à la sécurité sous C.Y Leung, joua un rôle clé dans les révoltes de 2019. Considéré comme la représentation de la force policière, c’est à travers cette campagne qu’il cherchera à adoucir son image.
Il qualifia sa future gouvernance de « symphonie », ne voulant plus seulement se préoccuper de la sécurité, mais diversifier harmonieusement son champ d’action. « Ceci est une nouvelle symphonie, dont je suis le nouveau chef d’orchestre. Nous créerons une synergie dans laquelle un plus un fait plus que deux ». À travers cette analogie, l’ancien policier, jouant au chef d’orchestre politique, souhaite adoucir son image et faire de lui un pragmatique polyvalent.
Pour ce faire, il insista sur la nécessité de s’entourer de ministres talentueux bénéficiant de leur expertise individuelle. S’entourer d’experts est une attitude qu’il a également adopté lors du recrutement de son équipe de campagne. Cette dernière est dirigée par le pro-Beijing Tam-Yiu-chung, et inclus également entre autres Raymond Tam Chi-yuen (le responsable des affaires étrangères avec la Chine continentale), Johnny Mok Shiu-luen (un avocat) et Kenneth Fok Kai-kong (le vice-président de la Fédération des Sports et du comité olympique de Hong Kong). Son équipe est composée de 17 experts en domaines variés, spécialisés dans la finance, le commerce, les lois, le bien-être social, l’éducation ou encore la culture… aucun d’eux n’étant directement lié aux forces disciplinaires. John Lee désire donc réellement rompre avec son image stricte et restrictive d’ancien chef de police.
La volonté de rendre Hong Kong plus compétitive
M. Lee fut aussi très critiqué quant à son manque d’expérience commerciale. Mais son divorce avec son ancienne image s’incarne d’autant plus par son désir de se placer en dirigeant pro-commerce. Il transforma son manque d’expertise en force, insistant sur son impartialité vis-à-vis de toute décision économique qu’il sera amené à prendre. Cependant, il a confirmé être conscient des inquiétudes envers les enjeux commerciaux évoquées lors de la conférence, et a insisté sur la nécessité de booster l’économie par l’implantation et le développement de nouvelles industries.
« Hong Kong doit conserver son caractère de métropole internationale », a-t-il déclaré, priorisant son rôle de portail entre le reste du monde et la Chine continentale
Favoriser le rapprochement avec Pékin
Lors de sa conférence de presse, M. Lee a été amené à concrétiser par un exemple pratique ce qu’il entendait par une « approche axée vers les résultats ». Il a alors insisté sur la réouverture des frontières avec la Chine continentale, témoignant que lorsqu’il fut responsable des négociations avec ses homologues continentaux l’an dernier, si ce n’était pour le variant Omicron, il aurait déjà commencé une réouverture complète.
La bonne entente entre les deux partenaires est au cœur de la politique de John Lee. « Nous devrions considérer « leurs problèmes » comme « nos problèmes » et vice versa », a-t-il déclaré, prônant une mise de côté des différences et une nécessité de penser à leur place.
C’est à travers un renforcement des relations avec Pékin que la compétitivité Hong Kongaise pourra pleinement bénéficier sa population et durablement construire de solides bases pour un développement futur.
La campagne de John Lee gagnée d’avance
Unique candidat, soutenu par Pékin, John Lee aurait déjà obtenu la nomination de 786 membres du Comité d’Élection. Pour référence, “seulement” 188 nominations sont nécessaires pour pouvoir concourir lors de l’élection du 8 mai. Lee a donc déjà convaincu quatre fois plus d’électeurs que requis, à une semaine seulement de l’annonce de sa candidature et son ascension populaire semble loin d’être finie.
S’il reste encore trois jours à d’autres postulants pour se présenter, les résultats des toutes premières élections depuis la réforme du système électoral ne connaissent pas un grand suspense.
L’avenir politique de Hong Kong semble tout tracé, avec John Lee comme nouveau Chief Executive.