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Devenir chercheur à Hong Kong, mode d'emploi

Hong Kong, carrefour stratégique entre l’Asie et le reste du monde, séduit de nombreux chercheurs. Avec ses universités bien classées, ses infrastructures modernes et son accès unique à la biodiversité régionale, la ville offre un terrain parfait pour la recherche. Mais que signifie réellement être chercheur à Hong Kong ? Témoignages croisés de Benoît Guénard, chercheur à HKU, et Camélia Aissat, adjointe du conseiller culturel et attachée de coopération universitaire et scientifique au consulat général de France.

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Écrit par Véronique Baudier
Publié le 9 décembre 2024, mis à jour le 11 décembre 2024

De l’université aux laboratoires de Hong Kong

Originaire de France, Benoît n’a pas toujours été convaincu que la recherche serait son chemin. Aujourd’hui professeur titulaire à l’Université de Hong Kong (HKU), un poste qu’il occupe depuis 2020, il revient avec honnêteté sur ses débuts : « Ce n'était pas quelque chose qui allait de soi. »

En France, son amour pour l’écologie avait du mal à s’épanouir dans un système académique rigide. « Trois ans de cours magistraux, ça m’a vraiment déprimé, » confie-t-il. L’écologie l’intéressait, mais la pédagogie, très passive, avait fini par lui ôter l’envie d’en apprendre davantage.

C’est alors qu’une opportunité au Canada change tout. Là-bas, il découvre une manière d’enseigner et de travailler radicalement différente. « J’ai découvert un programme totalement différent, qui était beaucoup moins descendant, où on privilégiait les échanges, où on créait des contenus. Ça a été une révélation. » Ce nouveau cadre académique le pousse à s’approprier les sujets qu’il explore et à s’investir pleinement.

C’est aussi au Canada qu’il rencontre pour la première fois les fourmis, qui deviendront son sujet de prédilection. « Plus j’apprenais, plus je voulais en savoir. Cette passion ne s’est jamais éteinte. » Ce projet, débuté presque par hasard, se transforme en véritable obsession. Il passe des heures à observer, analyser et comprendre ces fascinants insectes, qui lui ouvrent les portes d’une carrière scientifique : « J'avais de la boulimie de savoir, je voulais tout connaître. »

Après un doctorat en Amérique du Nord, il poursuit son parcours avec un post-doctorat au Japon. Ce passage en Asie lui permet non seulement d’affiner ses recherches, mais aussi de s’immerger dans une nouvelle culture académique.

La position géographique et la biodiversité m'ont convaincu

En 2014, Benoît postule à HKU pour un poste d’assistant professor. « J’ai postulé un peu par hasard. » Ce qu’il ne sait pas encore, c’est que Hong Kong s’apprête à devenir son nouveau foyer et un tremplin pour sa carrière. « La position géographique, l’accès à la biodiversité régionale et l’excellence académique m’ont convaincu. »

Depuis son arrivée, il s’est non seulement imposé comme un chercheur respecté, mais il s’est aussi ouvert à de nouveaux défis. Aujourd’hui, il s’implique activement dans la vulgarisation scientifique, un domaine qui lui tient à cœur : « J’essaie de montrer pourquoi c’est important de protéger les organismes, les plantes, les animaux. Partager le savoir, c’est essentiel. ».

Son parcours, ponctué de remises en question et de découvertes, montre qu’un chemin non linéaire peut mener à des accomplissements remarquables. À Hong Kong, Benoît a trouvé le parfait équilibre entre passion, recherche et transmission.

équipe benoit guénard

Pourquoi choisir Hong Kong ?

Pour Benoît, Hong Kong est avant tout une porte ouverte sur l’Asie. « On est au cœur de la région, avec un accès facile à l’Asie du Sud-Est. C’est un avantage incroyable pour un écologue. En quelques heures, je peux être dans un des écosystèmes les plus riches au monde. »

Camélia Aissat, qui travaille à promouvoir les liens scientifiques entre la France et Hong Kong, abonde : « Il existe de nombreuses opportunités à Hong Kong, un territoire qui offre des infrastructures et des laboratoires de pointe et où le gouvernement investit massivement dans l’innovation et la technologie . Mener des projets de recherche conjoints dans des domaines d’intérêts communs permet de profiter d’une certaine complémentarité : les chercheurs peuvent mener à bien leur recherche en utilisant les bénéfices et les avantages de chaque côté. Donc, l’objectif de la coopération scientifique est de mettre en commun des ressources propres à chaque pays. »

Un environnement académique stimulant

Hong Kong est également réputée pour ses universités, notamment The University of Hong Kong (HKU) et The Chinese University of Hong Kong (CUHK), classées parmi les meilleures d’Asie et du monde.
Benoît apprécie aussi l’accès aux financements : « Les montants peuvent être plus faibles qu’aux États-Unis, mais les taux de succès sont bien plus élevés. Ça nous permet de mener des projets sur le long terme. »

Avec des investissements récents dans des secteurs comme l’intelligence artificielle, les biotechnologies ou l’épidémiologie, Hong Kong est en plein essor. Camélia souligne : « Le gouvernement a lancé à l’époque ce qu’on appelle les InnoClusters à Science Park,  pour promouvoir l’innovation : il s’agit de centres de recherche et des financements dédiés pour la recherche. Il y a là aussi des opportunités pour les chercheurs internationaux de travailler avec Hong Kong, car des moyens importants sont mis à disposition. »

Les défis de la recherche à Hong Kong

La compétition

L’environnement académique hongkongais est exigeant. « C’est extrêmement compétitif, » admet Benoît. « Ici, tout se joue sur les publications. Pas seulement le nombre, mais aussi dans quelles revues vous publiez. Ça peut être intense, mais ça pousse à se dépasser. »

Le coût de la vie

Camélia rappelle que le coût de la vie à Hong Kong peut être un frein, notamment pour les jeunes chercheurs.

L'adaptation culturelle

Benoît évoque également les différences culturelles dans le monde académique : « Même si le milieu scientifique est globalisé, les façons de travailler changent selon les pays. En Asie, par exemple, le respect de la hiérarchie est très marqué, ce qui peut être déstabilisant au début. Mais on apprend à s’adapter, et ça enrichit nos perspectives. »

étudiant salle

Quels outils pour réussir ?

Pour soutenir la coopération entre les chercheurs français et hongkongais, le consulat général de France propose plusieurs programmes :

  • PHC Procore : ce programme facilite depuis plus de 20 ans la mobilité des chercheurs pour initier des projets collaboratifs entre la France et Hong Kong.
  • La bourse HKU-Pasteur : elle permet aux étudiants en Master et Doctorat aux et post-doctorants locaux d’effectuer trois à quatre mois de stage à l’Institut Pasteur à Paris.
  • Make Our Planet Great Again : ce programme proposé par le gouvernement français favorise l'accueil de jeunes chercheurs internationaux en France. sur les jeunes chercheurs travaillant sur le développement durable.La Bourse Anita Conti : qui permet à des jeunes chercheurs de l’Université des Sciences et Technologie de Hong Kong (HKUST) d’effectuer un séjour de 3 mois au sein d’un laboratoire en France sur des thématiques liées au développement durable.
  • Le programme French +  Sciences : une immersion combinant apprentissage du français et visites de laboratoires pour découvrir l’écosystème scientifique hexagonal à destination des plus jeunes (niveau Licence ou Master) désireux de poursuivre des études ou mener de la recherche en France par la suite.

Une communauté française solidaire

« Hong Kong, c'est un petit territoire qui compte quand même quatre centres de recherche français ou français-franco-hongkongais, » souligne Camélia.

La France est bien représentée à Hong Kong grâce à :

  • Le pôle de recherche HKU-Pasteur, un laboratoire de recherche médicale..
  • Le C2i, ou le Center for Immunology and Infection qui travaille sur la recherche appliquée et la commercialisation.
  • Le CEFC, ou le Centre d'études français sur la Chine contemporaine, spécialisé dans les dynamiques sociales et politiques en Chine.
  • L’EFEO, ou l'École française d'Extrême-Orient, un acteur majeur des études sinologiques.

Camélia conclut : « Nous faisons le constat aussi qu'en France, il y a de moins en moins de doctorants en sciences humaines et sociales spécialisés sur la Chine. Il nous parait important de remédier à cela pour favoriser la compréhension mutuelle de nos pays. Aussi, la part des étudiants internationaux parmi les doctorants en France est en recule ces dernières années et c’est pourquoi nous souhaitons renforcer la promotion des études doctorales en France et encourager les échanges scientifiques et universitaires pour les jeunes chercheurs grâce à la mise à disposition de plusieurs programmes de bourses ».  

Les liens des chercheurs avec les lycées

Bien sûr, les vocations peuvent commencer tôt, même pour nos étudiants français et hongkongais déjà sur place !
« Nous travaillons aussi avec les lycées, et notamment avec le lycée français.. Généralement, nous essayons d’organiser des présentations et faciliter les échanges avec les élèves pour éventuellement créer des vocations. Se sont par exemple rendus au lycée français l’année dernière, l’astrophysicienne, Françoise Combes, Professeur au Collège de France et Serge Haroche, prix Nobel de physique 2012, tous les deux membres de l’Académie des Sciences. »

Françoise combes city u

A Hong Kong, les opportunités sont immenses

Pour Benoît, la passion reste le moteur principal : « Si vous êtes curieux et motivé, Hong Kong est une expérience incroyable. L’environnement est exigeant, mais les opportunités sont immenses. ». Hong Kong, avec ses défis et ses opportunités, s’impose comme un acteur clé de la recherche internationale. Pour les chercheurs, c’est une aventure exigeante mais profondément enrichissante, où chaque jour apporte son lot de découvertes.

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