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Ambassadeur de France en Chine: "Nous préparons l’après-coronavirus"

Laurent Bili Ambassadeur coronavirusLaurent Bili Ambassadeur coronavirus
Laurent Bili, ambassadeur de France en Chine, entre Jean-Marc Fenet du Service Economique et Thibault Fabre de Business France
Écrit par Lepetitjournal Hong Kong
Publié le 4 mars 2020, mis à jour le 13 mars 2020

Organisé le 28 février à l’initiative de la Chambre de Commerce et d’Industrie France-Chine, des Conseillers du Commerce Extérieur, la French Tech, Business France et les services économiques de l’Ambassade, un webinaire s’est tenu en présence de Laurent Bili, ambassadeur de France en Chine, réunissant plus de 500 personnes. Lepetitjournal.com Hong Kong y a participé et est heureux de vous communiquer une synthèse.

“Préparer l’après coronavirus”

Christophe Lauras, CCIFC: Premier d’une série de webinaires, cet échange est destiné à faire un point sur la situation liée au Covid-19 après que la CCIFC vient juste de publier une enquête auprès des entreprises française sur les anticipations de reprise. Nous préparons déjà une enquête post-crise par secteur sur les leçons apprises et qui sera lancée au moment opportun.

Laurent Bili: Depuis le début de l'épidémie, c’est une ambassade de crise que je dirige, une partie des personnels étant restés en France. Au mois de janvier, une grande partie de notre travail a porté sur la gestion de la communauté française à Wuhan avec le consul général Olivier Guyonvarch. Nous avons pu organiser 4 vols entre le 30 janvier et le 8 février et profité d’un avion en provenance de France pour livrer 70 tonnes de matériel médical à la Chine. Ce geste a été très apprécié des autorités chinoises. Aujourd’hui la situation n’a plus rien à voir avec la phase chaotique des premières semaines: l’épidémie semble sous contrôle et nous pouvons commencer à anticiper la suite. 

 

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Un A340 TLRA de l'Armée Française similaire à ceux qui ont ramené les Français de Wuhan Photo@Armée Française

 

Conseils aux voyageurs

Concernant les conseils aux voyageurs, nous avons décidé de décourager les personnes n’ayant pas de raison évidente d’être en Chine de ne pas s’y rendre ou y retourner. Côté écoles, nous ne pouvons faire moins que les différentes municipalités chinoises en terme de période de fermeture. Les désinscriptions à Pékin sont passées de 20 à 68 avec des craintes sur une rentrée décalée que l’on ne peut pas exclure. Sur le volet des quarantaines, l’évolution de l’épidémie en Europe rend désormais la stricte application de la quarantaine évidente. 

Jean-Marc Fenet, Service Economique Ambassade de France

Nous partageons toute l’information disponible au plan micro et macro-économique, sectoriel etc… et la diffusons largement grâce au réseau de la Chambre de Commerce France-Chine et des Conseillers du Commerce Extérieur. Nous publions un bulletin quotidien sur la maladie, les indicateurs de reprise et les questions logistiques. Par ailleurs, une synthèse hebdomadaire des mesures prises par les autorités chinoises en matière de déplacement dans 10 provinces ainsi que les mesures de soutien économique est disponible.

 

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Suite à l'épidémie de coronavirus, Sanofi a rapatrié une partie de sa production en France Photo@Sanofi Aventis

Impact économique 

Concernant l’impact économique, la reprise, dans le discours officiel, serait à partir de mi-mars avec un rattrapage après la mi-avril. Cependant la priorité va vers les grosses entreprises industrielles sur le secteur côtier avec un taux de reprise entre 80 et 90% comme pour les charbons et la sidérurgie. Pour les PME nous sommes seulement à 33% de reprise dont 43 % pour l’industrie et 33% pour les secteur côtiers. Les secteurs qui souffrent sont les petites entreprises de la restauration et du retail du fait du manque de main-d’œuvre (au Guandong 1/3 des migrants seulement sont rentrés).  Nous constatons un déficit de voyageurs entrants et la fréquentation des transports dans les grandes villes entre 50 et 88%. Selon une étude de l’Université de Pékin auprès de 1000 PME chinoises, 1/3 de celles-ci pensent pouvoir survivre un mois sans revenu et 2/3 au-delà de deux mois. Cette étude corrobore l'enquête de la CCIFC sur les entreprises françaises.

L’impact global sur la croissance serait en théorie de 0.5 point de croissance qui reste compatible avec l’objectif officiel du doublement du PIB par tête conditionné par une croissance annuelle minimum de 5.5%. Cependant cela ne prend pas en compte l’effet retour sur la croissance du développement constaté récemment de l’épidémie hors de Chine qui si elle persiste dans le monde jusqu’à l’été ferait baisser cette prévision en de ça de 5%. Pour l’impact hors de Chine, l’hypothèse d’une crise uniquement chinoise au premier quarter est modifiée du fait de l’expansion de l’épidémie et la place tenue par la Chine dans l’économie mondiale. Aujourd’hui 18% du PIB mondial, 25% du secteur industriel manufacturier et 17% du commerce mondial, soit 3 fois plus qu’en 2003 à l’époque du SARS. De plus l’économie s’est mondialisée, pour le tourisme, l’automobile, l’électronique ou encore le secteur pharmaceutique dont 40% des principes actifs sont produits en Chine. Donc l’onde de choc récessive chinoise a plus d’impact que par le passé, vers l’ASEAN et l’Europe avec un risque de choc en retour en Chine.

 

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Agnès Pannier-Runacher et Bruno Lemaire le 21 février Photo@La Croix

Mesures de soutien

Côté chinois, il y a eu des injections massives de liquidités de la part de la Banque Centrale vers le secteur bancaire en recommandant d’arroser d’abord les secteurs prioritaires puis les PME avec des intérêts bonifiés. On sait néanmoins d’expérience que le secteur bancaire favorise les entreprises prioritaires au détriment des PME. Côté français, des mesures ont été annoncées par Bruno Lemaire comprenant l’étalement des charges sociales et fiscales, le recours aux heures supplémentaires pour les entreprises qui ont des filiales orientées vers la Chine. Par ailleurs, on recommande aux donneurs d'ordres de faire preuve de flexibilité vis-à-vis des fournisseurs basés en Chine ainsi que le recours éventuel à la force majeure pour les contrats en retard.

De plus, une réflexion est en cours pour les entreprises françaises dont les productions sont très dépendantes de la Chine comme la pharma ou l’électronique. Ainsi Sanofi a-t-elle décidé de rapatrier une partie de ses activités vers la France. Pour les entreprises de droit chinois créés par des Français, elles sont éligibles aux mesures chinoises. La CCIFC ou les CCE peuvent les aider pour dénouer d'éventuelles problèmes en s'appuyant sur le corps diplomatique. La "team France" travaille également avec la Chambre Européenne, d'autres chambre et l’équivalent chinois CCPIT (Chinese Council for the Promotion of International Trade) qui délivre les certificats de force majeure pour aider les entreprises à obtenir ces certificats.

 

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Christophe Lauras, président de la CCI France-Chine entouré de Caroline Pénard, Directrice et de l’équipe de la Chambre de Commerce et d’Industrie France-Chine

 

Thibault Fabre, Business France: On nous pose régulièrement la question de savoir quant aura lieu la reprise. Or, nous constatons que les grands événements n'ont pas été annulés mais reportés à des dates proches. C’est le cas du Salon de l’Elevage de Changsha repositionné en septembre ou encore du salon sur la plasturgie de Shanghai qui aura lieu en août. Cela constitue des signes encourageants pour toutes les activiés induites que sont l'hôtellerie et les voyages. Le mois de mai est encore une charnière entre maintien et report. Les entreprises qui prospectent ne sont plus non plus dans l’émotion mais dans une stratégie de reprise. De même, les opérateurs chinois cherchent à reprendre le dialogue avec leurs contreparties françaises. Un message vis-à vis des VIE: les nouvelles arrivées sont reportées de mars à avril. Pour ceux déjà présents en Chine qui ne peuvent assurer leur mission du fait des déplacements limités, ils ont le choix entre se repositionner sur d’autres pays, prendre des congés ou encore rentrer en France.

Questions

Quelles sera la situation des entreprises françaises après cette crise?

Jean-Marc Fenet: S’agissant de la suite, gardons en mémoire que le marché prioritaire des entreprises françaises présentes ici est la Chine, contrairement à la crise du SARS où la Chine servait d'atelier. Du coup, il n’y a aucune raison de partir.

L'attitude de la Chine vis-à-vis de la France va-t-elle évoluer?

Laurent Billi: Sur les relations entre la France et la Chine, elles sortent plutôt renforcées de cet épisode du fait de l'aide apportée par la France à Wuhan. Nous continuons de relayer dans les média des messages de soutien à Wuhan et à la Chine. 

Que prévoit la CCIFC pour continuer d’accompagner les entreprises?

Christophe Lauras: L’étude menée auprès de entreprises françaises en Chine indique des résultats optimistes malgré le caractère sérieux de la situation. D’autres webinaires sectoriels et juridiques sont prévus. Par ailleurs, pour les entreprises qui souhaiteraient bénéficier de nos installations de télétravail ou de vidéo-conférence c’est avec plaisir que nous les accueillerons.

 

Etude de la CCIFC: ici

 

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