Ce mercredi 10 septembre, Source of Asia - une société d'accompagnement à l'international basée à HCMV - organisait un webinaire ayant pour objectif de déterminer les raisons de l'attractivité croissante du Vietnam à travers les témoignages de quatre experts.
Lors de cet événement en ligne, quatre thématiques ont été abordées successivement : l'attractivité du Vietnam pour la production industrielle, l'accord de libre-échange entre le Vietnam et l'Union Européenne (EVFTA), quelques conseils pour choisir le lieu d'implantation de son usine de production et le témoignage d'une entreprise française produisant au Vietnam depuis 2016.
Les avantages compétitifs du Vietnam pour la production industrielle
Thierry Mermet, fondateur et CEO de la société Source of Asia, a détaillé les raisons de l'engouement croissant suscité par le Vietnam sur le plan industriel. Au cours des dernières années, une centaine d'entreprises internationales ont délocalisé tout ou partie de leur production de la Chine vers un autre pays. Ce phénomène est notamment lié à la guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis, à la hausse des coûts de production en Chine (augmentation annuelle moyenne des salaires de 12 % depuis 2003) et à la crise du Covid-19 qui y démarra et qui fit réaliser à certains de ses partenaires commerciaux leur dépendance vis-à-vis du géant asiatique lorsque les frontières se fermèrent.
Parmi les grands gagnants de cette désertion de masse, le Vietnam, qui a accueilli environ un quart de ces sociétés internationales, pour beaucoup américaines, dont Samsung, Google et prochainement Apple. Au-delà de la proximité géographique entre les deux pays (de nombreuses entreprises conservant une partie de leur production en Chine), le Vietnam séduit également par son emplacement central au cœur de l'ASEAN. Il est une porte d'entrée vers ce groupement de dix pays d'Asie du Sud-Est qui, s'il en était un seul, représenterait la 5ème économie mondiale. Ouvert sur le monde économiquement, le Vietnam est membre de l'ASEAN depuis 1995, de l'OMC depuis 2007 et a implémenté un accord de libre-échange avec l'Union Européenne en août 2020. Par ailleurs, le Vietnam en lui-même intéresse les entreprises manufacturières, fort de son économie en plein boom et de sa population nombreuse (97 millions d'habitants), dynamique (46 % de cette population a entre 25 et 54 ans) et bon marché (les salaires des travailleurs de l'industrie manufacturière sont 63 % inférieurs à ceux appliqués en Chine).
L'accord de libre-échange entre l'Union Européenne et le Vietnam (EVFTA)
Succédant à Thierry Mermet, Jean-Jacques Bouflet, vice-président de l'EUROCHAM, a pris la parole pour parler de l'EVFTA, l'accord de libre-échange entre l'UE et le Vietnam entré en vigueur en août 2020. Ayant lui-même participé aux négociations, il en a rappelé l'histoire chaotique qui mena finalement à l'accord historique. A l'origine, le traité devait concerner l'ASEAN et l'UE, mais les disparités au sein des deux zones firent avorter les négociations en 2009, un an après leur démarrage. Les négociations reprirent en 2012, exclusivement entre l'UE et le Vietnam cette fois, et s'achevèrent avec succès trois ans plus tard.
Effectif depuis le 1er août 2020, l'EVFTA vise à supprimer la totalité des droits de douane sur plus de 3000 types de produits au cours des dix prochaines années. Dès l'adoption du traité, 71 % des taxes sur les exportations du Vietnam vers l'UE et 65 % des taxes sur les exportations de l'UE vers le Vietnam ont été levées. A cet objectif de libéralisation des échanges commerciaux s'ajoute celui de leur sécurisation, l'EVFTA permettant notamment de réduire les barrières techniques, institutionnelles et administratives à l'entrée. L'UE considère l'EVFTA comme « l'accord de libre-échange le plus ambitieux jamais conclu avec un pays en voie de développement ».
Initialement intégré à cet accord, l'EVIPA, accord sur l'investissement, a été ratifié séparément par les institutions de l'UE et du Vietnam, mais il est en attente de ratification par chacun des pays de l'UE, ce qui pourrait prendre deux à trois ans selon Jean-Jacques Bouflet.
Comment choisir l'emplacement de son site de production au Vietnam ?
Se basant sur son expérience de directeur des ventes et du marketing chez BW Industrial, société spécialisée dans la location de sites industriels, Michael Chan a listé trois conseils pour implanter une usine de production au Vietnam de façon optimale :
- Privilégier l'implantation au sein d'un des 256 parcs industriels du pays. L'obtention de licences d'exploitation et de commerce y est facilitée et des avantages fiscaux y sont appliqués (notamment l'exonération totale de l'impôt sur les sociétés au cours des deux premières années et de moitié au cours des quatre années suivantes).
- Choisir un emplacement géographique à proximité des grands ports (Hai Phong au nord et Hô Chi Minh-Ville au sud), aéroports et routes nationales afin de limiter les coûts logistiques. Ce choix est d'autant plus important que seules 20 % des routes vietnamiennes sont goudronnées et que la côte s'étale sur 3444 kilomètres.
- Prendre en compte le coût du travail, le salaire minimum étant par exemple de $132 par mois en région 4 et de $190 par mois en région 1. A noter qu'au Vietnam, sur une population totale de 97 millions d'habitants, on dénombre plus de 60 millions de travailleurs, dont près de 95 % sont lettrés et plus de 88 % sont allés à l'école secondaire.
Etude de l'implantation réussie d'une entreprise d'emballages alimentaires
Pour illustrer cette profusion de données sur le dynamisme industriel vietnamien, Romain Berion, l'actuel directeur général d'IML Containers Vietnam, raconte l'histoire de l'implantation de la société française d'emballages alimentaires dans le pays.
En 2014, Romain et son patron regardent la carte des filiales et sites de production d'IML Containers dans le monde. L'Europe et les Amériques concentrent alors la totalité des implantations. Rien en Asie. Romain est chargé d'une mission : trouver l'emplacement idéal en Asie pour y créer une filiale. Il a un an pour y parvenir. La Chine et l'Inde nécessitant des investissements trop importants, il voyage à travers sept pays de l'ASEAN pour analyser le potentiel de chacun de ces marchés en termes de population (taille, habitudes de consommation, main d'œuvre, etc.), de besoins locaux d'emballages alimentaires et de conditions d'installation (contraintes légales, évaluation des coûts, etc.).
Au moment du bilan, Romain a repéré les atouts suivants pour le Vietnam :
- Il n'est pas obligatoire d'y avoir un partenaire local.
- Le Vietnam occupe une position centrale dans l'ASEAN, ce qui limite les coûts du transport dans la région.
- Le marché intérieur est prometteur, avec ses 97 millions d'habitants et ses habitudes de consommation vis-à-vis des emballages alimentaires.
- La main d'œuvre disponible est nombreuse et bon marché.
Nuançant son explication, Romain cite les trois difficultés d'implantation qu'il a anticipées :
- Les ports et aéroports du pays sont congestionnés, car les infrastructures locales ont du mal à suivre le rythme du développement économique.
- Les terrains ne peuvent pas être achetés mais seulement loués, pour une durée maximale de 50 ans.
- Les formalités administratives sont parfois fastidieuses.
Pesant le pour et le contre de chacun des sept pays, IML Containers s'implante finalement au Vietnam en 2016. Quatre ans plus tard, ce choix s'avère gagnant. Ayant étendu la surface de ses locaux de 7000 m² en 2020 pour répondre à la croissance des ventes, Romain a aussi été agréablement surpris par le niveau de qualification de la main d'œuvre locale, en particulier des ingénieurs. Par ailleurs, il explique que l'implantation de l'usine au sein d'un parc industriel a permis de sécuriser la pérennité de l'entreprise au niveau légal, de sécuriser l'approvisionnement en eau et en électricité et de faciliter l'accès aux infrastructures du pays.
Le Vietnam possède de sérieux atouts pour les entreprises internationales à la recherche d'une porte d'entrée stratégique en Asie du Sud-Est. Position géographique centrale, multiplication des accords commerciaux internationaux, taille du marché intérieur, dynamisme de la population active (qui s'accroît au rythme d'environ un million par an), hausse de la compétitivité par rapport à ses voisins asiatiques, etc. : cette attractivité va en s'accélérant. Rançon du succès, elle engendre aussi de multiples défis pour le Vietnam qui doit s'adapter afin d'accueillir toutes ces nouvelles industries. L'un de ces défis repose dans le développement des infrastructures, qui ne suivent pas toujours le rythme effréné du boom économique et industriel local, mais qui peu à peu, comblent leur retard. Près de 6 % du PIB leur est consacré annuellement.
La vidéo du webinaire et le support complet de la présentation (qui apporte de nombreuses données chiffrées complémentaires), tous deux en anglais, sont accessibles sur demande à l’adresse : hello@sourceofasia.com