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Ánh Tuyết porte la voix des invisibles en jazz et en poésie

Originaire de Da Nang, Ánh Tuyết, 24 ans, mêle jazz et poésie pour raconter des histoires empreintes de mélancolie et de conscience sociale. De ses débuts dans un club de guitare à son exploration d’un univers musical singulier, la jeune artiste compose des chansons inspirées de la nature et des anonymes qui façonnent notre quotidien.

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Écrit par Guillaume Marchal
Publié le 28 novembre 2024

Originaire de Da Nang, le sourire d'Ánh Tuyết est contagieux. À 24 ans, la jeune femme donne des cours d’anglais à Hanoï, après avoir suivi un cursus littéraire à Saigon. Ses premiers pas dans la musique ont débuté au son des mélodies chantées par ses parents lors de karaokés, populaires au Vietnam. Lorsqu’elle entre au collège, son père lui apprend à plaquer quelques accords à la guitare, et c’est avec son premier copain qu’elle commence à composer ses premiers titres. « Je l’ai rencontré au club de guitare de l’établissement, ça a vraiment réveillé en moi cette envie de créer », se souvient-elle. Friande de littérature, elle commence à écrire des paroles influencées par le jazz pour accompagner son ancien compagnon.

 

 

 

 

"Les paroles sont très stéréotypées autour d’émotions que tout le monde peut ressentir. Après ça, j’avais besoin d’aller plus loin."

 

« J’ai appris toute seule après que mon père m’a expliqué les bases. J’expérimentais en jouant des accords sur la guitare et en créant des mélodies. Je ne savais pas ce que c’étaient comme progressions d’accords, mais ça sonnait bien. Ensuite, j’écrivais des poèmes, souvent sur l’amour et la tristesse, et ça a donné naissance à ma première chanson », explique Tuyết. Ayant publié quelques titres sur des plateformes comme SoundCloud, elle se fait repérer par un collectif indé vietnamien. Une fois la connexion établie, elle coproduit le titre Amour et Jours de Tristesse, qui atteint rapidement le million de vues en 2019. « C’est l’un de mes titres les plus commerciaux, si j’ose dire. Les paroles sont très stéréotypées autour d’émotions que tout le monde peut ressentir. Après ça, j’avais besoin d’aller plus loin, d’expérimenter, et de me rapprocher de quelque chose qui me ressemblait plus. »

 

Dimension sociale traduite en poésie

 

jazz vietnam artist hanoi da nang

 

Franchissant la vingtaine, la jeune artiste se met alors à composer des titres jazz avec son nouveau compagnon. « Je voulais raconter des histoires avec des aspects sociétaux à travers des images se référant à la nature, aux animaux. On y pense peu, mais les animaux, les insectes, les êtres vivants sont comme nous. Une de mes histoires parle des lucioles autour d’un lac. Ces insectes ont une espérance de vie très courte et brillent autour des points d’eau. Lorsque la lune est masquée par les nuages, j’ai pensé à elles, qui s’efforcent d’apporter des points de lumière dans l’obscurité, sans que personne ne prête attention à elles », explique la chanteuse. Tuyết fait en fait une allégorie, voulant mettre en perspective le travail de ceux qu’on oublie. « À travers cette chanson, j’essaie de passer un message. Autour de nous, on ne parle que peu de toutes ces personnes invisibles qui contribuent à notre bien-être, souvent en effectuant un travail pénible. Cette histoire des lucioles qui meurent à petit feu fait référence à toutes ces femmes de ménage ou celles qui nettoient nos rues. Quand j’étais à l’université, je me levais très tôt ou, quand je rentrais d’une fête au petit matin, j’observais toutes ces femmes ranger les ordures. Grâce à elles, tous les matins, les gens retrouvent des rues propres », précise Tuyết.

 

 

 

Le titre fait partie de l’un de ses projets qui abordent les relations entre le monde animal et l’humain, qui font de notre univers un tout. « Je préfère chanter sur du jazz, car contrairement à la musique pop où les suites d’accords sont prévisibles – ce qui fait qu’elle reste facilement en tête du grand public –, le jazz est plus surprenant », soutient Tuyết. Après s’être séparée de son deuxième compagnon, Tuyết a eu du mal à retrouver une osmose avec des artistes jazz. « Cette envie est toujours en moi, c’est juste que toute seule je n’arriverai pas à créer les mêmes contenus que quand j’étais chaperonnée », conclut-elle.

Pour retrouver les titres de Tuyết et son ancien groupe, voici son Spotify.

 

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