Édition Francfort

MICRO-TROTTOIR – « La loi en faveur du mariage pour tous, je trouve ça super, mais trop tard ! »

Écrit par Lepetitjournal Francfort
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 12 juillet 2017

Le 30 juin dernier, le Parlement allemand a voté à la majorité une loi en faveur du mariage pour tous. Un vote historique pour la communauté LGBT en Allemagne, qui rejoint les 20 autres pays occidentaux ayant déjà adopté la loi, dont 14 rien qu'en Europe. Lepetitjournal.com/francfort est allé à la rencontre d'Allemands afin de connaitre leur opinion sur le sujet.

La loi devrait encore être validée par la chambre haute du Parlement en fin d'année, mais vendredi 30 juin, c'est tout de même un vote historique qui a eu lieu. En effet, les députés ont voté à la majorité une loi permettant aux personnes de même sexe de se marier, mais également d'adopter des enfants, et d'avoir certains avantages fiscaux. La France avait déjà franchi le pas en 2013, sous la gouvernance de François Hollande.

Quelques jours avant la « Christopher Street Day » à Francfort, une manifestation rassemblant la communauté LGBT qui aura lieu le 15 juillet prochain, nous sommes allés à la rencontre d'Allemands, afin de connaître leur opinion sur cette loi. Si Andreas, Anne, Lena, Edwin et Sinthu ont accepté de répondre à nos questions, ce n'est pas le cas de plusieurs Allemands, souvent âgés, catégoriquement opposés au mariage pour tous, mais n'ayant pas souhaité s'exprimer sur le sujet. 

Une loi votée trop tard pour certains

En haut : Lena ; en bas : Andreas (Photo JV lepetitjournal.com/francfort)

Le mariage pour tous ? « Je trouve ça super, mais vraiment trop tard, ça aurait dû avoir lieu depuis longtemps », nous confie Lena, une jeune femme de 27 ans travaillant dans une librairie. Pour elle, si la loi a mis autant de temps avant d'être votée, c'est parce que les Allemands restent encore très fermés sur certains points : « Je pense que l'Allemagne reste un pays très conservateur, je ne m'y connais pas très bien en politique, mais je pense que la société reste assez fermée, notamment sur les questions de genre, même si l'homosexualité existe depuis toujours ». Encore aujourd'hui, elle pense que les mentalités n'ont pas changé, malgré la loi votée le 30 juin. Assise devant son stand de livres, elle reste assez fataliste : « Malheureusement, je trouve que les mentalités n'ont pas évolué, ou en tout cas je n'en ai pas le sentiment. Certes, au niveau des intellectuels, elles évoluent, mais au niveau des classes populaires, malheureusement, non. Il existe encore beaucoup d'homophobie ».

Pour Andreas, cinquantenaire et francophile à ses heures perdues, si l'Allemagne a mis autant de temps avant de voter en faveur du mariage pour tous, c'est notamment à cause de ses « traditions, voulant qu'un homme se marie avec une femme ». Il argumente en ajoutant que l'union entre deux personnes de même sexe existait déjà, à travers le contrat de vie commune, mais il pense que « si ça n'a pas été plus loin, c'est parce que l'on a peur, et notamment du SIDA. On reproche souvent aux homosexuels de changer régulièrement de partenaires sexuels, même s'ils sont en couple ». Changer la vision des Allemands face aux couples homosexuels sera donc un « processus de longue durée », même si pour lui, « la question ne se pose pas », chacun peut faire ce qu'il veut « pour être heureux ». 

Le mariage pour tous, oui, mais après ? 

En haut : Edwin ; en bas : Anne (Photo JV lepetitjournal.com/francfort)

Anne, étudiante de 27 ans en littérature, langue et culture, se dit optimiste concernant le mariage pour tous. Pour elle, cette loi était « essentielle », « ceux qui veulent se marier doivent pouvoir le faire », mais elle reste nuancée. « Nous avons lutté pendant des années pour le mariage pour tous, mais cette loi n'est qu'une première étape. Il reste en effet le problème de l'adoption, tout n'est pas encore clarifié mais cela devrait venir ». 

Concernant l'adoption justement, incluse dans la loi votée le 30 juin, les avis sont très partagés. Pour Edwin, jeune retraité homosexuel de 70 ans, il est essentiel que les personnes issues de la communauté LGBT puissent devenir des parents reconnus par la loi. « Auparavant, les homosexuels ne pouvaient pas adopter d'enfants. J'ai des amies lesbiennes qui ont des enfants, qu'elles éduquent avec amour, et désormais, elles vont enfin être reconnues. Je trouve ça très bien », nous confie-t-il. 

Sinthu, 21 ans, n'est pourtant pas du même avis. Selon elle, même si la loi en faveur du mariage pour tous est « une bonne chose », il faut « aller plus loin et penser à d'autres thèmes très importants », tels que « les enfants ». Pour la jeune femme, « ensemble, ça ne fonctionne pas ». Elle poursuit d'un air agacé : « Par exemple, si deux homosexuels adoptent un enfant, que va-t-il se passer avec lui ? Il va être persécuté, victime de moqueries ! Ce n'est pas simple pour les enfants, il faut penser à eux ».

La « Christopher Street Day », un événement particulier cette année, mais qui ne fait pas l'unanimité

(Photo © Pixabay) 

Malgré les différentes controverses, tous les Allemands que nous avons rencontrés sont unanimes : cette année, la « Christopher Street Day » à Francfort promet d'être d'autant plus grandiose. Andreas ne la manquerait en aucun cas. « J'y participe chaque année, je ne la manquerais pour rien au monde. Parfois, il fait trop chaud, et la musique est vraiment trop forte », dit-il en rigolant, « mais je pense que c'est très important d'y participer, même pour les personnes qui ne sont pas homosexuelles », ajoute-t-il en français.

Pourtant, Lena et Edwin restent nuancés sur cet événement. « Je ne suis pas trop pour cet événement, car les enfants hermaphrodites, nés avec les deux sexes, ne sont pas invités à la « Christopher Street Day », alors que je pense que c'est très important qu'ils soient présents. En plus de cela, c'est un événement très capitaliste, mais j'y serai tout de même », nous confie Lena en souriant. Ce n'est pas le cas d'Edwin, qui ne participe jamais à l'événement, car il n'aime tout simplement pas « les grands rassemblements ».

Pour ou contre le mariage pour tous, ce septuagénaire pense tout de même qu'il est « toujours très important de s'écouter mutuellement ». Ainsi, « notre opinion peut changer, et ce n'est jamais une mauvaise chose de changer d'avis, bien au contraire », poursuit-il. Parfois, lorsque deux opinions se rencontrent, il arrive même selon lui qu'« une nouvelle opinion complètement différente des deux premières voit le jour ». Pour ce philosophe, il faut donc désormais « trouver un accord avec l'État, afin de poursuivre dans une voie commune », car « tout n'est pas encore fait ».  

JV (www.lepetitjournal.com/francfort), mardi 11 juillet 2017

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Publié le 10 juillet 2017, mis à jour le 12 juillet 2017

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