L'armée israélienne multiplie mercredi les frappes sur la bande de Gaza dans le cadre de son opération contre le Hamas qui pourrait selon elle durer encore de "nombreux mois" en dépit des vives préoccupations humanitaires.
L'armée israélienne a poursuivi mercredi ses frappes dans la bande de Gaza assiégée, après avoir prévenu que la guerre contre le Hamas pourrait durer encore de "nombreux mois", malgré les pertes civiles qui ne cessent de s'alourdir dans le territoire palestinien.
Plus de deux mois et demi après le début de la guerre, déclenchée par l'attaque sanglante lancée le 7 octobre par le mouvement islamiste palestinien contre Israël, le ministère de la Santé du Hamas a annoncé mercredi que 21.110 personnes, dont une majorité de civils, avaient été tuées à Gaza par les opérations militaires israéliennes.
En Israël, l'attaque a fait environ 1.140 morts, la plupart des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir des derniers chiffres officiels israéliens. Environ 250 personnes ont été enlevées par le Hamas, dont 129 restent détenues à Gaza, selon Israël.
Sur le terrain, les combats ne connaissent aucun répit.
Des témoins ont fait état de frappes israéliennes et de combats au sol à Khan Younès, la grande ville du sud de Gaza considérée par Israël comme un important bastion du Hamas, mais aussi de bombardements intenses sur les camps de réfugiés d'al-Maghazi et d'al-Boureij, dans le centre.
Israël a juré de détruire le Hamas, au pouvoir depuis 2007 dans la bande de Gaza, en représailles à l'attaque du 7 octobre, et pilonne le petit territoire où son armée a lancé le 27 octobre une offensive terrestre. Selon l'armée, 164 soldats sont morts au combat à Gaza.
La guerre a provoqué d'immenses destructions et un désastre humanitaire dans la bande de Gaza, placée par Israël en état de siège total depuis le 9 octobre, où la famine menace et où la plupart des hôpitaux sont hors service. Environ 1,9 million d'habitants, soit 85% de la population, ont fui leur foyer, selon l'ONU.
Malgré l'adoption, le 22 décembre, par le Conseil de sécurité de l'ONU d'une résolution exigeant l'acheminement "à grande échelle" d'aide humanitaire, la quantité d'aide entrant dans le territoire, contrôlée par Israël, n'a pas augmenté de manière significative.
- "Un cessez-le-feu" -
"Notre peuple n'a pas connu une telle guerre, même lors de la +Nakba+ de 1948", a déclaré mardi le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, en référence à la "catastrophe" que les Palestiniens associent à la création de l'Etat d'Israël en 1948, après laquelle 760.000 d'entre eux ont été contraints à l'exode.
"Ce qui se passe sur le sol palestinien ces jours-ci va au-delà d'une catastrophe et d'un génocide", a-t-il ajouté sur la chaîne de télévision égyptienne ON, affirmant que "le plan" du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu "est de se débarrasser des Palestiniens et de l'Autorité palestinienne".
Selon le ministère de la Santé du Hamas, 195 personnes ont été tuées en 24 heures à Gaza par les forces israéliennes. Le ministère a affirmé que l'armée avait notamment visé une maison voisine de l'hôpital Al-Amal de Khan Younès, faisant 22 morts et 34 blessés.
L'armée "vise de manière croissante les environs de l'hôpital Nasser" de Khan Younès, le plus important du sud du territoire, a déclaré le porte-parole du ministère, Ashraf al-Qudra, disant "redouter que ne se répète le même scénario qu'à l'hôpital al-Chifa", dans la ville de Gaza, qui avait été pris d'assaut par les soldats israéliens malgré la présence de milliers de civils, malades, personnel et déplacés.
Plusieurs hôpitaux de Gaza ont été bombardés, assiégés ou pris d'assaut par l'armée depuis le début de la guerre. Israël affirme que le Hamas a installé des bases dans ces hôpitaux, comme dans d'autres installations civiles dont des écoles et des mosquées, utilisant la population comme des "boucliers humains", ce que le mouvement islamiste dément.
Mercredi, des Palestiniens qui avaient trouvé refuge dans une école de l'ONU dans le camp de Nuseirat, dans le centre de Gaza, fuyaient une nouvelle fois vers le sud pour échapper aux bombardements incessants.
Ils chargeaient des matelas, des couvertures, des bagages et des sacs de provisions sur des charrettes ou sur le toit des voitures, selon des images de l'AFP.
"Même les écoles de l'ONU ne sont plus sûres", "d'abord nous avons été déplacés à Nuseirat, puis à Rafah. Les gens ne savent plus où aller", lançait un homme, sans donner son nom. "Notre message au monde entier: mettez en place un cessez-le-feu".
- Efforts diplomatiques -
Le conflit "durera encore de nombreux mois", a prévenu mardi le chef d'état-major de l'armée Herzi Halevi, soulignant que ses objectifs n'étaient "pas faciles à atteindre" face au Hamas, classé organisation terroriste par les Etats-Unis, l'Union européenne et Israël.
Le ministre israélien des Affaires stratégiques Ron Dermer s'est entretenu mardi soir avec Jake Sullivan, le conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche, de la libération d'otages, ainsi que d'une "différente phase" de la guerre, plus ciblée contre des chefs du Hamas, et du déploiement de l'aide à Gaza.
De son côté, l'émir du Qatar Cheikh Tamim ben Hamad al-Thani, dont le pays avait mené une médiation ayant permis une trêve fin novembre, s'est entretenu avec le président américain Joe Biden.
Cette trêve avait permis la libération de 105 otages et de 240 prisonniers palestiniens détenus par Israël, ainsi que l'entrée à Gaza d'un important volume d'aide humanitaire.
Les deux dirigeants ont discuté des efforts nécessaires pour "arriver à un cessez-le-feu permanent", a affirmé la diplomatie qatarie.
Mais les efforts des médiateurs, surtout égyptiens et qataris, n'ont jusque là pas permis de parvenir à une nouvelle pause humanitaire.
Au-delà de Gaza, la guerre a ravivé les tensions à travers le Moyen-Orient.
En Cisjordanie occupée, un raid israélien a fait mercredi six morts dans le secteur de Tulkarem, selon le ministère palestinien de la Santé.
Israël est aussi confronté à des groupes proches de l'Iran, soutien du Hamas, comme le Hezbollah au Liban ou les rebelles Houthis au Yémen.
Mercredi, l'Iran a menacé Israël "d'actions directes et d'autres menées par le front de la résistance", après la mort lundi dans une frappe en Syrie, qu'il impute à Israël, de Razi Moussavi, un de ses hauts-gradés.
L'armée israélienne n'a pas confirmé l'information.
Elle a par ailleurs indiqué mercredi avoir frappé, dans la nuit, un site militaire du Hezbollah au Liban et intercepté plusieurs roquettes tirées depuis ce pays après que des sirènes d'alerte ont retenti dans le kibboutz Rosh Hanikra, dans le nord d'Israël.
Les Etats-Unis, qui patrouillent en mer Rouge pour protéger le trafic maritime des attaques des Houthis, ont annoncé avoir détruit mardi douze drones et cinq missiles tirés par ces rebelles qui disent agir en "solidarité" avec les Palestiniens de Gaza.