Édition internationale

SOPHEA OUM - Une femme au service des femmes

Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 14 novembre 2012

Sophea Oum a reçu le 13 mars dernier le Indradevi Hope Awards dans la catégorie Leadership Award. Le Women's International Group of Cambodia a récompensé son action pour l'éducation et la formation des femmes cambodgiennes.

(crédit photo : Sophea Oum)

Tour à Tour, fille de diplomate, réfugiée politique en France, fondatrice d'orphelinat et chef d'entreprise, cette « alsacienne d'adoption », comme elle se décrit, n'a jamais oublié ses origines khmères. Entretien avec une femme qui n'a qu'une marotte, faire évoluer le Cambodge dans la bonne direction.

Pourquoi être allée dans les camps de réfugiés thaïs et être revenue au Cambodge, alors que vous et votre famille étaient réfugiés en France pendant 15 ans ?

J'avais terminé des études de Technique de commercialisation en 1986. Je suis partie un an aux Etats-Unis et puis en revenant j'avais une possibilité de partir pour la Thaïlande. J'avais échappé à la barbarie du régime des Khmers Rouges. Je voulais aider ces enfants qui pour certains avaient perdu toute leur famille sous Pol Pot. Je voulais compatir avec eux, partager leur douleur, moi j'avais échappé à cette souffrance. J'ai écouté mon c?ur, il était plus fort. J'étais prédestinée à revenir. Je ne pouvais enlever cette idée de ma tête. En principe, je ne devais venir que pour six mois. Au final, je suis restée. Puis au milieu des années 1990, maman, papa et mes frères et s?urs aussi m'ont rejoint. Une raison de plus pour rester.

Vous qui avez ouvert un orphelinat et qui vous occupez de la formation des enfants, comment voyez-vous le système éducatif au Cambodge ?

C'est une question à laquelle il est difficile de répondre. Au Cambodge, les enfants ont du mal à s'adapter au système éducatif qui leur est proposé. Pour la plupart, les professeurs n'arrivent pas à faire passer leur message pédagogique. Je ne dis pas que les enseignants sont mauvais. Mais c'est un constat. Ça crée une forme de démotivation chez eux. Pour certains enfants dont on s'occupe à l'orphelinat, à la sortie des cours, on en remet une couche pour qu'ils comprennent bien les leçons qu'on leur donne à l'école. Quand j'étais dans les camps de réfugiés c'était différent. Il y avait une proximité plus grande entre les enseignants et les enfants, une plus grande interaction. C'est beaucoup moins le cas dans le système éducatif cambodgien.

Vous vous préoccupez beaucoup de la condition des femmes cambodgiennes. Êtes-vous optimiste quant à leur rôle futur dans la société cambodgienne ? Il y a-t-il une évolution possible ?

Les femmes souffrent beaucoup au Cambodge. Elles ne sont pas vraiment considérées dans la société cambodgienne. Elles travaillent pourtant beaucoup. À la campagne, d'expérience, j'ai pu voir des femmes travailler toute la journée. Elles vont chercher l'eau, préparent à manger, s'occupent des enfant, vont travailler dans les rizières et ramènent de quoi vivre pour la famille. Alors oui, pour moi, les femmes ont une place importante dans la société khmère. Une place qu'elles doivent occuper pleinement. « Il ne faut pas seulement être une salariée, il faut aussi être épouse, mère, et surtout être femme, s'occuper de soi. Vous êtes capable d'influencer les changements au Cambodge ! », c'est ce que je dis aux filles dont je m'occupe et dont je me suis occupé. Elles doivent apporter quelque chose pour la société future. Elles sont la base du changement au Cambodge.

Vous avez reçu le prix de la dirigeante pour le Indradevi Hope Awards qui récompense l'action des femmes au Cambodge en mars dernier. Quelle a été votre réaction ?

J'étais la dernière à être annoncée. Quand on a prononcé mon nom, j'étais très émue et étonnée, je n'arrivais pas à me lever de ma chaise. Je n'arrivais pas à parler alors qu'il fallait que je fasse un discours devant le millier de personnes qui étaient présentes ce jour-là. C'était aussi émouvant pour les enfants qu'on a pu aider. Ils étaient tous devant la télévision, le poste radio ou ont acheté les journaux le lendemain.

Et comment vivez-vous cette reconnaissance aujourd'hui ?

Il y a de plus en plus de gens qui viennent me voir. Ils sont curieux, ils me posent beaucoup de questions. En ce qui concerne les actions de mécénat et les investissements, ça commence tout juste. Mais c'est clair que cette distinction va permettre de booster mon travail.

propos recueillis par Eric Kuoch (www.lepetitjournal.com) Mercredi 25 mai 2011

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Publié le 25 mai 2011, mis à jour le 14 novembre 2012
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