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ESCAPADE - Il était une fois… la formidable odyssée du Khmer Magic Bus

Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 7 avril 2014, mis à jour le 9 avril 2014

 

 

C'est sur une idée originale d'Arn Chorn Pond, fondateur de l'association Cambodian Living Arts qui s'adonne à promouvoir et défendre les arts traditionnels au Cambodge qu'est né le Khmer Magic Bus. En Mai 2013, 350 personnes se sont réunies pour monter ce projet, avec toujours en ligne de mire le slogan : « Restoring Cambodia's rich musical heritage, one village at a time ». 

Steve Riege, un Américain, ami de longue date d'Arn Chorn Pond* est parvenu à lever 36 000$, somme qui a permis d'acheter le bus et entre autre, de payer les musiciens professionnels et de leur assurer un revenu. Dans ce bus, véritable véhicule d'art et de talents, 20 artistes, chanteurs ou musiciens rares sillonnent 6 fois par an pendant plusieurs jours les provinces reculées, afin de partager, faire connaître ou redécouvrir aux habitants en marge des grandes villes tout leur héritage artistique. En effet, 90% des « maîtres » ont disparu lors du génocide des Khmers Rouges, et c'est sur ce triste constat qu'Arn Chorn Pond se bat pour restituer auprès de tous ce qui demeure de ces arts vivants, véritable fierté autant que facette heureuse et lumineuse du Cambodge.

 

Arn Chorn Pond témoigne ainsi : « Les gens sont toujours heureux d'entendre de la musique, tro, chapei, la harpe khmère : la plupart n'a jamais entendu ni vu ce genre d'instruments ; imaginez un peu l'effet que peut produire en eux l'arrivée d' une cinquantaine d'artistes dans leur village reculé : ils se sentent privilégiés, ils se sentent comme des dieux. » Dans ces zones rurales, où 70% de la population a moins de 30 ans, il est vrai que la majorité ignore ce pan de leur héritage culturel, comme ces étranges instruments ancestraux que l'on retrouve dessinés sur les bas-reliefs des temples d'Angkor, et dont il ne reste que 5 ou 6 exemplaires dans tout le pays. Symbole de résilience, il s'agit, après les sombres heures du génocide de « tapisser le Cambodge de musique, et non de bombes » (« carpet Cambodia with music, not bombs »). Dans le bus Arn Chorn Pond partage son histoire : « On m'a appris à haïr les Khmers Rouges quand j'étais enfant. C'est épuisant de vivre dans la haine. Aujourd'hui, je pense amour, communauté, et comme cela fait du bien ! »

Ton Seyma, charmante jeune chanteuse, grâce au soutien de Waterek Production créé en 2007 et de Cambodian Living Arts dirige aujourd'hui d'une main de velours et de sourires la troupe d'artistes. Née à Kampot, elle arrête l'école à 15 ans, quitte Kampot avec sa tante pour gagner de l'argent à Phnom Penh. Là, elle se marie à 16 avec un homme qu'elle n'a encore jamais rencontré, puis tous les soirs,  elle est chanteuse dans le restaurant Lovea Em près du Pont japonais. Elle évoque des conditions difficiles, dues au harcèlement masculin qui suit ses performances. Le jour, en autodidacte, elle pratique son chant à l'aide de cassettes. C'est Arn Chorn Pond qui la repère, la débauche, et depuis, Seyma suit sa bonne étoile : elle écrit de la musique enregistre des CD pour Waterek Production, part en tournée aux Etats-Unis où elle chante au Lincoln Center pour le festival Season of Cambodia** en Avril 2013, et continue avec le Magic Bus sa « Cambodian success story ».

Le Petit Journal a accompagné le Khmer Magic Bus pour une joyeuse épopée conduite par Arn Chorn Pond dans la province de Kandal au village de Tbaung Damrei. Le tour que nous avons suivi a été sponsorisé par une famille du New Jersey aux Etats-Unis ­?le KMB ne vivant encore que pas des dons­­?, famille qui a beaucoup contribué au développement de cette école de près de 700 élèves. Sur place, les enfants, enjoués, intrigués, ravis, accueillent le bus dans une fanfare de joie et d'applaudissements. La performance commence, les enfants sont émerveillés, et Arn Chorn Pond en digne pédagogue leur enseigne les origines de chaque instrument. Puis, Seyma et ses artistes dansent en cercle sur fond de musique, et chaque enfant est invité à rejoindre la ronde. Des airs de fête suivent le sillage de ce bus, il fait bon de le suivre à la trace.

                                                   

Ce 25 Février dernier, dans les locaux du centre de l'association Cambodian Living Arts sur Sothearos Boulevard à Phnom Penh, après une conférence de presse, Bayon, TV5, CNC, TVK et Hang Meas étaient présents pour filmer et diffuser sur leurs chaînes les performances des artistes du Khmer Magic Bus. Superbe couverture médiatique donc pour ce jeune bus audacieux, et réussite d'autant plus flagrante que la chaussée ayant tenu lieu de modeste scène pour les humbles artistes, plusieurs passants se sont arrêtés, surpris par cette effusion de rires et de grâce perdue parmi quantité de salons de massage douteux. C'est en effet la raison pour laquelle Arn Chron Pond a décidé d'installer là le siège de CLA : propager un soupçon de lumière et bonne humeur au milieu des lugubres salons de filles de joie, convaincu que « La musique est magie : elle guérit tout, elle panse tout ».

Hélène de LA ROCHEFOUCAULD - www.lepetitjournal.com/cambodge - Mercredi 9 avril 2014

 

* Pour en savoir plus sur Arn Chorn Pond et Cambodian Living Arts : http://bit.ly/1g1Ueqc
** www.seasonofcambodia.org

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Publié le 7 avril 2014, mis à jour le 9 avril 2014

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