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Rencontre avec Murielle Lorilloux, CEO de Vodafone et UPC Roumanie

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Écrit par Grégory Rateau
Publié le 17 février 2020, mis à jour le 17 février 2020

Notre rédaction est aujourd'hui allée à la rencontre d'une Française, Murielle Lorilloux, CEO de Vodafone et UPC Roumanie. Elle nous parle ici des enjeux du secteur des télécommunications en Roumanie et de ses nouvelles perspectives.

 

 

Grégory Rateau: Pouvez-vous nous parler brièvement de votre parcours ?

Murielle Lorilloux: J’aime penser à mon parcours comme une succession d’opportunités et d’expériences. J'ai commencé à travailler dans le secteur des télécommunications par hasard lors de mes premières missions dans le conseil, et je peux dire que je me suis très tôt sentie vraiment attachée à ce domaine, avec son dynamisme, sa vitesse, ses innovations, mais aussi avec son pouvoir extraordinaire de transformer effectivement le monde et nos vies. La technologie et les communications ont ouvert une multitude d’opportunités vers le progrès dont on peut se réjouir aujourd’hui. L'industrie des télécommunications a toujours eu une contribution essentielle à la formation d'un monde connecté, ainsi que nous le connaissons aujourd’hui, et à la révolution numérique dont nous sommes témoins. Après 10 ans dans le conseil, j’ai décidé de partir à l’étranger, en famille, toujours dans le secteur des télécoms, et j’ai passé plusieurs années en Afrique avant de rejoindre la Roumanie en 2017.

 

 

Est-ce plus difficile de diriger quand on est une femme en Roumanie ?

À vrai dire, je pense que les femmes sont très bien représentées au sommet des entreprises actives en Roumanie et c’est un sujet dont les Roumains devraient être fiers. À mon avis, et avec le reflet de la réalité que l’on constate, la distinction homme / femme ne semble pas être révélatrice là-dessus. Dans le milieu des affaires, ce qui compte plus, ce sont les qualités professionnelles, la confiance et le respect mutuel. Les femmes roumaines sont ambitieuses et très compétentes. Comme partout, la difficulté réside à maintenir l’équilibre avec la vie personnelle et familiale.
 

 

Vous avez occupé différentes positions de management dans plusieurs compagnies multinationales avant de devenir CEO de Vodafone Roumanie. Selon vous, qu’est-ce qui fait un bon leader ?

Comme vous le dites, avant de devenir CEO, j’ai eu plusieurs positions de management, qui m’ont construite petit à petit. Donc, avant de devenir un bon leader, je pense qu’il faut être un collègue avec un bon esprit d’équipe, puis un bon manager, qui, au-delà de son expertise, va savoir gérer son équipe et coordonner les efforts vers un succès commun. L’équipe peut être de plus en plus grande, les qualités restent les mêmes. Un bon leader doit aller au-delà du manager, c’est le capitaine du navire: il doit avoir la vision, définir une stratégie claire pour toute l'entreprise, il doit montrer l'exemple et inspirer l'enthousiasme de son équipe pour l'avenir. À mon avis, le rôle principal d'un leader est de créer l'environnement propice qui permet aux équipes d’avoir des résultats et d’innover. Il est important de créer l'espace nécessaire pour que les gens puissent avoir des idées, essayer, au risque d'échouer parfois, apprendre des erreurs et se développer.

 

 

Le marché des télécoms en Roumanie est très dynamique et aussi très compétitif. Quelle est la stratégie de Vodafone pour faire face à ses compétiteurs ?

Avant même de parler de nos concurrents, pour Vodafone, tout part de notre vision et de la mission que nous nous sommes fixé. “Connecter la Roumanie pour un avenir meilleur” est notre objectif ultime et notre stratégie en découle. La digitalisation, l'innovation et la convergence resteront nos priorités, visant à élever en permanence la barre, en termes de qualité des services et du réseau, au bénéfice de nos clients. Côté convergence, nous poursuivons l'intégration d'UPC et proposerons de nouveaux produits et services convergents à nos clients, qui réuniront les services mobiles, l'internet fixe et la télévision. Nous pensons que c'est une attente naturelle d'avoir un seul fournisseur, d'avoir plus d'avantages et de profiter des meilleures solutions de communications. Je suis convaincue que notre croissance et notre puissance sur le marché des télécoms en Roumanie viendront tout d'abord du fait que Vodafone et UPC sont maintenant ensemble. Nous visons également à accélérer la transformation numérique, pour offrir une meilleure expérience à nos clients, à travers tous les canaux de communication, en fonction de leurs besoins. Et, bien sûr, continuer à être les leaders en matière d'innovation, avec de nouvelles technologies et solutions, telles que la 5G ou des solutions IoT (Internet of Things) pour tous.

 

 

Justement quelles sont les nouvelles technologies dans lesquelles le groupe Vodafone investit-il ?

Du côté technologique, Vodafone Roumanie s’est toujours placé en tête de file, avec une histoire très riche en matière d'innovations. Après de nombreuses premières sur la 3G/4G, au printemps 2019 nous avons été le premier opérateur sur le marché local, et parmi les premiers en Europe, à avoir lancé la 5G commercialement. Il s'agit d'une étape importante pour nous, dans notre mission de contribuer au développement de la société numérique, car nous avons montré que l'avenir de la 5G est déjà là, au bénéfice des consommateurs et des entreprises.  

Nous avons également investi ces dernières années dans le domaine de l’IoT et au niveau de la technologie réseau où Vodafone est le seul opérateur en Roumanie à avoir lancé le NB-IoT (Narrowband Internet of Things) depuis plus d’un an avec une couverture nationale. Cette nouvelle technologie est un nouveau standard réseau basse consommation et longue portée, généralement conçu pour l’internet des objets. Au-delà de la partie réseau, nous avons également innové et lancé plusieurs solutions IoT innovantes permettant d’améliorer la productivité et l’efficacité commerciale, opérationnelle et industrielle de nos clients partenaires.

Nous avons également initié plusieurs projets et initiatives dans le domaine de l’intelligence artificielle et de l’automatisation/robotisation de nos process, d'abord pour améliorer notre propre modèle commercial et opérationnel, mais aussi avec l’objectif d’être partagé demain avec nos partenaires si ça permet d’aider l’ensemble de l’écosystème à progresser. L’IA est devenu une terminologie très générique dont tout le monde parle mais il faut comprendre que l’IA est un soutien, un accélérateur qui doit être couplé avec d’autres innovations pour en tirer un maximum de bénéfices. Par exemple, la reconnaissance vocale, les solutions de “chat bot”, les modèles prédictifs d’appels ou d’offres et de ventes personnalisés etc, sont autant d’innovations qui ne peuvent bien fonctionner sans l’apport de l’IA et des modèles de “machine learning”.    

 

 

Quels sont les principaux défis que devra affronter l’industrie des télécoms à l’avenir ?

À mon sens, l’industrie des télécoms en Roumanie est victime de son succès. Nous avons un des meilleurs rapports qualité/prix en Europe et au monde, avec un des meilleurs réseaux en terme de qualité pour un des prix les moins chers au monde. Grâce à ces ingrédients, nous avons réussi la démocratisation des télécoms et l’accès à l’internet haut débit pour tous et nous pouvons nous en féliciter. Ceci a néanmoins érodé nos marges opérationnelles de façon dramatique ces dernières années et pose le défi de pouvoir maintenir notre capacité à investir en terme de réseau et d’innovations, pour le bénéfice de nos clients, mais également pour accompagner la Roumanie dans sa transformation numérique.

 

 

La Roumanie est un pays dans lequel on trouve encore des régions où l’eau potable et la canalisation font défaut mais où on a un réseau Internet parmi les plus rapides d’Europe et où tout le monde ou presque possède un Smartphone. Comment voyez-vous ce contraste ?

C'est fantastique, n’est-ce pas? Le marché roumain des télécommunications a connu une évolution spectaculaire, si l'on pense aux transformations qui se sont produites au cours des 20 dernières années, avec l’essor de ce domaine en Roumanie. Personnellement, je pense que les Roumains ont montré un très grand appétit pour les nouvelles technologies et que la Roumanie a “brûlé" les étapes du développement technologique, se situant désormais à un niveau de développement comparable, voire supérieur, à celui des pays occidentaux, en ce qui concerne les communications mobiles. Quand je suis arrivée ici, j'ai été très impressionnée parce que les Roumains ont une manière optimiste de se rapporter à la technologie. Ils sont vraiment ce que l’on appelle des “early adopters” des dernières innovations, bien plus tôt que les autres. Les Roumains sont impatients de tester de nouvelles choses, qu'il s'agisse de la 5G ou de nouvelles solutions de communications mobiles.

 

 

Justement, on parle beaucoup d’éventuels problèmes de santé ou de sécurité cybernétique que pourrait poser la 5G. Pouvez-vous nous en parler ?

La santé et la sécurité de nos clients et du grand public sont bien sûr des priorités pour nous. En matière de santé, il est évident que nos appareils mobiles et nos antennes fonctionnent conformément aux directives établies par la Commission internationale de protection contre les rayonnements non ionisants. Les normes internationales de sécurité pour l'exposition aux champs électromagnétiques couvrent également les bandes de fréquences considérées pour la mise en œuvre de la technologie 5G. Des autorités telles que la Commission internationale de protection contre les rayonnements non ionisants et l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) sont parvenues à un consensus sur le fait qu'il n'y a pas d'effets néfastes sur la santé après une exposition, conformément aux normes internationales de sécurité. Nous sommes conscients néanmoins que le public demeure préoccupé par les émissions de fréquences électromagnétiques et leurs effets. Ainsi, nous essayons de répondre à ces préoccupations en fournissant des informations à jour, ouvertes et transparentes. Mais il est important que le relais soit fait par les différentes autorités et organisations européennes et mondiales en matière de santé. Même si nous apportons nos propres analyses, nous serons toujours suspectés de parti pris et il est essentiel d’avoir un cadre légitime d’experts reconnus et des recherches scientifiques dont la méthodologie est valide pour échanger et ne pas laisser libre voie à des théories alarmistes relayées par les réseaux sociaux et créant la panique si elles ne sont pas fiables ou prouvées.

En matière de cybersécurité, il est urgent d’adresser ce problème auquel nous sommes tous exposés, de façon globale et coordonnée. À mon sens, c’est un problème qui existe déjà depuis plusieurs années, dont on a pris conscience que trop tardivement avec des conséquences majeures pour le monde économique et politique. La 5G ne va pas poser un problème qui existe déjà et a été utilisé de façon abusive pour des raisons commerciales et géopolitiques. Ceci dit, avec la 5G et la connectivité de tous les objets, et la numérisation qui s’accélère à tous les niveaux, les risques de cybersécurité vont être encore plus urgents et critiques à gérer.  

 

grégory rateau
Publié le 17 février 2020, mis à jour le 17 février 2020

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