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Premières sanctions après le drame des mineurs illégaux dans le Kachin

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Le cadavre d'un mineur mort dans l'accident d'avril 2019
Écrit par Rédaction lepetitjournal.com Birmanie
Publié le 7 juillet 2020, mis à jour le 8 juillet 2020

Après la mort de plus de 170 mineurs illégaux dans une coulée de boue dans une mine à ciel ouvert du Kachin, le 1er juillet dernier, les autorités civiles comme militaires se devaient de réagir puisque le 8 novembre prochain se tiendront les élections générales en Birmanie.

Elles viennent donc de prendre leurs premières mesures et n’ont pas manqué de communiquer largement dessus. En 2019, dans ces mêmes exploitations de Hpakant et Lone Kin, 19 glissements de terrains ont été observés, provoquant officiellement 94 décès, dont une cinquantaine dans un seul accident en avril. Cela n’avait pas vraiment susciter de réactions… mais ce n’était pas une année électorale !

Le 3 juillet, le bureau du Président a nommé une commission d’enquête pour « faire la lumière sur le drame et venir également en aide aux familles des victimes ». Le ministre des Ressources naturelles et de la Conservation de l'environnement U Ohn Win préside ce groupe, qui est également composé du ministre de l’Intérieur, le général Soe Htut, du ministre de la Protection sociale, du Secours et de la Réinstallation U Win Myat Aye, du Premier ministre de l’état de Kachin, U Khat Aung, du directeur du ministère des Ressources naturelles et de la Conservation, U Min Thu, et enfin de U Htun Zaw, secrétaire général du gouvernement de l’état de Kachin. Leur mission est simple : établir les principales causes du glissement de terrain et trouver les coupables du drame. Il leur est aussi demandé de faire des suggestions pour éviter d’autres accidents.

330 euros pour chaque famille de décédé

Sachant que depuis plusieurs décennies ceux-ci se répètent annuellement sans perturber pour autant une industrie du jade qui représente des dizaines de milliards d’euros, pour l’essentiel de l’argent frauduleux et sans taxes, ce qui explique facilement le peu de soin et de sécurité des mines. Ce qui est plus difficile à comprendre, en revanche, est pourquoi le gouvernement a peu fait pour réguler et contrôler cette activité qui lui rapporte, selon les différents observateurs du secteur, à peine 10 % des ventes, ce qui représente malgré tout plusieurs milliards d’euros par an. Signe sans ambiguïté de l’opacité du secteur, tous ces chiffres restent des estimations, les dernières données officielles datant de… 2014 ! Et mentionnant une valeur de 31 milliards de dollars étasuniens pour la production totale de jade du pays cette année-là.

La commission d’enquête est donc restée trois jours sur place, a visité le site du dernier accident, cinq autres mines considérées « à risque » et rencontre des proches de victimes et des survivants du drame. L’occasion pour le ministre de la Protection sociale, du Secours et de la Réinstallation U Win Myat Aye d’annoncer que les familles des morts recevraient chacune 500 000 kyats (environ 330 euros) – un montant qui dans les faits couvre un peu plus que les frais des funérailles – et que les blessés auraient eux 200 000 kyats (soit de l’ordre de 130 euros). En outre, le ministère a versé 11 millions de kyats (quelque 7 200 euros) à partager entre les organisations de la société civile qui ont aidé dans les opérations de sauvetage.

Des responsables militaires sanctionnés

Les militaires de leur côté ont fait savoir que le ministre régional des Affaires frontalières et de la Sécurité, le colonel Nay Lin Tun, ainsi que l’officier commandant les forces de sécurité locales avaient été démis de leurs fonctions et renvoyés à leurs postes précédents pour « avoir échoué dans leur mission et dans leurs responsabilités ». Le porte-parole de l’armée, le général Zaw Min Tun, a ainsi publiquement déclaré que « il était de leur devoir d’empêcher les intrusions illégales et ils ne l’ont pas fait ». Les deux officiers auront prochainement « à répondre de leurs manquements », a ajouté Zaw Min Tun.

Dans l’ensemble, les victimes sont des migrants ethniques provenant d’autres régions du pays et attirés par l’espoir de trouver la « grosse pierre » qui fera leur fortune. Mais la misère constitue bien sûr le principal moteur de ces modes de vie à haut risque. Un nouveau ministre régional des Affaires frontalières et de la Sécurité va être nommé (par l’armée car c’est un ministère qui relève d’elle) et en partant la commission d’enquête a recommandé « d’empêcher les mineurs illégaux de venir sur ces sites ». La plupart d’entre eux vivent directement aux pieds des mines dans des campements de fortunes…

Et si la Ligue Nationale pour la Démocratie comme l’armée – dont la population sait que le Parti pour le Développement et la Solidarité de l’Union est le bras politique – communiquent sur les mesures qu’ils prennent, ils n’ont pas pour autant échappé aux critiques, relayées sur Facebook par ceux que l’indifférence des dirigeants a choqué : pas un mot officiel de la conseillère d’état Daw Aung San Suu Kyi, le ministre des Ressources naturelles et de la Conservation de l'environnement U Ohn Win qualifiant de « cupides » ces mineurs vivants dans un dénuement extrême et le ministre régional des Ressources naturelles et de la Conservation de l'environnement, U Darshi La Sai, expliquant que les prospecteurs seraient dorénavant « éduqués pour éviter d’autres accidents ».

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