

L’événement se trouve désormais dans toutes les gazettes du pays, même si rien n’a filtré avec précision, même pas les dates exactes de la visite : le président chinois Xi Jinping viendra en Birmanie, probablement cette semaine, pour ce qui sera sa deuxième visite officielle dans le pays, après celle de 2009. Les dates supposées, mais pas confirmées, sont les 17 et 18 janvier prochain, à l’occasion de la commémoration du 70ème anniversaire de l’établissement de relations diplomatiques entre les deux pays.
La venue du numéro Un chinois s’explique surtout par l’agacement de Pékin devant la lenteur du développement, voire les blocages dans certains cas, des projets conjoints dans le cadre de la fameuse « Nouvelle route de la soie ». Par exemple, la voie ferrée qui doit relier Ruili en Chine avec Muse en Birmanie, deux villes frontières au nord-est de l’état de Shan, pour s’achever à Mandalay, en est encore au stade des relevés de terrain en Birmanie alors que la gare de Ruili est achevée en Chine. Xi Jinping veut donc redonner un coup de fouet aux relations entre les deux partenaires mais aussi rappeler Nay Pyi Taw à l’ordre sur ses engagements.
Le dirigeant chinois va aussi certainement mettre le processus de paix dans la balance, lui qui fait aujourd’hui pression sur les groupes ethniques combattants qui sont installés sur des territoires entre les deux pays pour qu’ils reviennent à la table des négociations avec le gouvernement actuel et qu’ils cessent leurs attaquent nuisant au commerce entre les deux voisins. Sa venue, qui coïncide – mais est-ce une coïncidence ? – avec la reprise la semaine dernière de discussions réelles entre les divers acteurs birmans et ethniques de ce processus, est en tout cas un signe fort pour tous les protagonistes que la patience de Pékin commence à s’user. Le message est clair : la Chine a besoin de paix à ses frontières pour développer ses projets économiques grandioses.
Autre développement économico-diplomatique attendu, la signature de deux des sept accords prévus pour le fonctionnement de la zone économique spéciale de Kyaukphyu, dans l’état d’Arakan. L’accord-cadre sur cette zone spéciale a été signe en 2018, et les études d’impacts environnemental et social ont été conduite. Mais depuis, plus rien. Or, cette zone est également un élément important de la politique régionale chinoise puisqu’elle est l’un des points terminaux du Corridor économique sino-birman et qu’elle donnera à Pékin un accès à l’océan indien, au grand dam de New-Delhi. L’un des deux accords qui seront signés porte d’ailleurs sur la construction d’un port en eaux profondes. Les prochains accords portent eux sur le développement industriel de la zone.
A côté de ces grands projets sur lesquels il y a déjà accord mais où les retards se sont accumulés, Xi Jinping devrait aussi travailler à ce que la Birmanie exporte plus de produits agricoles vers la Chine, tant du bétail que des fruits, légumes et éventuellement des céréales. L’empire du milieu cherche en permanence à assurer un flux correct de ressources alimentaires pour sa population, et l’agriculture birmane est l’un des leviers que Pékin veut utiliser.
Et puis bien sûr, le dossier du barrage de Myitsone reviendra sur la table. L’ouvrage est officiellement en sommeil depuis le 30 septembre 2011, sous le gouvernement précédent, et s’il avait été achevé en les termes prévues en 2017, sa production d’électricité serait allée au Yunnan chinois et non pas à la Birmanie. Nul doute que Xi Jinping cherchera une voie de sortie favorable aux intérêts chinois sur ce dossier, quitte à faire quelques concessions.
A un moment où les relations de la Birmanie avec la plupart des pays occidentaux ne sont pas particulièrement positives, à cause essentiellement de la crise des populations musulmanes dans l’Arakan, la venue du président Xi Jinping remet clairement Nay Pyi Taw dans le giron de l’influence chinoise. Elle est perçue par tous les observateurs comme un acte positif pour l’économie birmane, mais aussi une reprise en main diplomatique.
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