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La Covid-19, une bonne nouvelle pour les assureurs malins

Les bureaux de Myanma Insurance à Yangon...Les bureaux de Myanma Insurance à Yangon...
Les bureaux de Myanma Insurance à Yangon...
Écrit par Julia Guinamard
Publié le 5 juillet 2020, mis à jour le 5 juillet 2020

« La COVID-19 a fait comprendre aux gens les avantages de l'assurance et les a sensibilisés à l'importance d'une épargne retraite pour leurs enfants et leurs familles », estime le PDG de l’entreprise canadienne d’assurances Manulife. Et les ventes de l’entreprise birmane KBZ MS lui donne raison : pour les assurances maladie, elles ont quintuplé depuis avril 2020. « Cette évolution est en partie due à notre campagne promotionnelle Covid-19 avec une réduction de 50 %, mais aussi parce qu’en général les gens sont plus réceptifs aux assurances lorsqu'ils sont confrontés à une crise », explique le PDG de KBZ MS. Le Sars-Cov-2 offre une démonstration concrète de la plus-value des assurances santé, une aubaine pour les assureurs ! C’est ainsi que l’entreprise hongkongaise AIA Insurance a modifié sa campagne de communication : « Nous sommes passés d’une approche ‘vie plus saine, plus longue et meilleure’ à l’approche ‘être résilient et plus fort’ », témoigne son PDG. En Birmanie, AIA Insurance a fait bénéficier l’ensemble de ses clients d’une allocation pour la Covid-19. La couverture s’élève jusqu’à un million de kyats (de l’ordre de 640 000 €) s’ils sont infectés et hospitalisés en soins intensifs.

Le consortium de sociétés d’assurance et de réassurance Chubb Insurances, l’ancien ACE, qui se présente comme « le leader mondial des assurances », a aussi sauté sur l’occasion en annonçant le 20 juin 2020 le lancement de deux nouvelles polices d’assurances santé et d’une prévoyance santé. Afin de cibler le plus grand nombre, les primes sont vraiment modiques, de 26 400 kyats annuels pour l’assurance santé (environ 17 €) alors qu’elles commencent à 35 000 kyats annuels (de l’ordre de 22€) pour la prévoyance santé. De manière générale, on observe que plusieurs entreprises de Birmanie ont décidé de souscrire à des assurances santé pour leurs employés.

Autre incitation à recourir à ces produits : depuis le 22 mars 2020, la Thaïlande demande à tous les étrangers entrant sur son territoire de prouver qu’ils disposent d’une assurance santé couvrant au moins leurs frais éventuels à hauteur de 100 000 USD (environ 89 000 €). Avec beaucoup de Birmans qui travaillent en Thaïlande, les assureurs ont de nombreux clients en devenir.

Une ouverture du secteur récente

Cet attrait pour les assurances en temps de crise n’est bien sûr pas nouveau. Il avait aussi été observé lors de la crise de Sars-Cov-1 en 2003. Toutefois, l’inquiétude de la population ne bénéficie pas à toutes les assurances. Dans le secteur de l’automobile, elles ont au contraire subi une baisse de 50 %.

L’ouverture du secteur des assurances aux entreprises privées en Birmanie date de 2013. Mais il a fallu attendre le 28 novembre 2019 pour que les premières entreprises 100 % étrangères commencent à vendre des assurances. L’investissement total de ces nouveaux arrivants s’élève à 172 milliards de kyats (environ 110 millions d’euros). Leurs noms ? AIA Myanmar Life Insurance, Chubb Life Insurance, Dai-Ichi Life Insurance Myanmar, Manulife Myanmar Life Insurance et Prudential Myanmar Life Insurance. Aujourd’hui, la Birmanie compte 11 entreprises d’assurances, dont l’entreprise publique et historique Myanma Insurance.

Mais malgré la concurrence et l’augmentation du type d’offres, pour beaucoup de Birmans les avantages d’une assurance restent mal compris. Parmi les freins, la conviction bouddhiste que l’on ne maîtrise pas son destin, qu’il est déjà tracé par ses actions. De ce point de vue, prendre une assurance c’est un peu aller à l’encontre de son destin. Les raisons religieuses ajoutées aux raisons économiques ajoutées à l’arrivée récente en Birmanie de ce concept d’assurance expliquent que seulement 0,01 % de la population possédait une assurance de prévoyance en 2019. À cette date, le directeur du management de l’entreprise AMI commentait ce faible attrait : « Il s'agit d'épargner pour un besoin, qu'il s'agisse d'éducation ou de retraite. Il faut avoir une vision à long terme ».

La lourdeur administrative du gouvernement ralenti la transformation du secteur

Le secteur des assurances automobiles est un peu à part : en théorie, il profite de la loi rendant les assurances responsabilité civile obligatoires. Dans les faits, l’estimation est que seulement 10 % des véhicules sont assurés. Manque d’information des propriétaires, mais aussi manque de rigueur des entreprises, qui longtemps restées sans concurrence, ne se préoccupaient pas beaucoup du service rendu, pas plus que les bénéficiaires ne s’intéressaient vraiment à leur contrat. Avant l’ouverture du secteur aux entreprises étrangères, le PDG de Power Eleven, une entreprise de Bus qui dessert Yangon, déplorait cette situation : « Certains assureurs ne rappellent pas aux propriétaires de bus que leur contrat est sur le point d'expirer. Et ceux-ci constatent l’expiration lorsqu'ils signalent un dommage lors d’un accident ». Lesdits propriétaires pourraient aussi se donner la peine de tenir leur documentation administrative et contractuelle à jour… La concurrence devrait changer la donne.

Car avec la concurrence étrangère qui arrive, le secteur se diversifie. Et proposer de nouveaux services n’est pas une mince affaire car chaque nouvelle offre fait l’objet d’une étude par le gouvernement et ne peut être mise sur le marché sans son approbation. Ces procédures n’existent pas en Thaïlande ou en Malaisie. En Birmanie, trois nouvelles catégories d’assurance ont été acceptées par le conseil de réglementation du secteur des assurances en mai 2020 : assurance tous risques industriels, assurance tous risques chantiers et assurance de responsabilité civile. Ces nouvelles assurances seront sur le marché en octobre 2020. « Ces trois types de produits sont largement utilisés à l’étranger. Nous recevons généralement des demandes de la part des investisseurs étrangers sur leur disponibilité en Birmanie », commente le co-secrétaire de l’association des assureurs birmans.

La Covid-19 amorce la modernisation du secteur des assurances en Birmanie

En février 2020, ce sont les assurances habitations qui ont été introduites sur le marché. Ainsi, Myanma Insurance a annoncé la création d’un pack logement : « L’intérêt du pack est qu'il couvre 14 assurances, dont l'assurance vie, incendie, inondation, tremblement de terre et tempête. Il garantit une sécurité à ceux qui achètent des appartements en empruntant et aux banques », annonce le directeur général de Myanma Insurance. Pour les consommateurs, ce pack facilite la compréhension des services et assure une couverture complète.

« De différentes façons, la COVID-19 accélère les tendances numériques déjà en cours », juge le PDG de la branche birmane de Manulife. Avec les règles de distances physiques ou avec la fermeture de certains points de vente, la numérisation du secteur s’accélère. Manulife a ainsi mis en place des outils numériques pour entrer en contact avec ses futurs clients. L’entreprise GGI Nippon Life s’inscrit également dans cette dynamique : « Nous voyons cette crise comme une opportunité pour adopter davantage la technologie dans nos activités », a déclaré son PDG. GGI Nippon Life a profité de la crise de la Covid-19 pour proposer une assurance qui peut être entièrement achetée en ligne. En parallèle, les assureurs insèrent dans leur modèle économique les ventes additionnelles. La pratique est commune et autorisée dans le secteur bancaire et dans le tourisme, par exemple, avec les assurances annulation.

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