Les attentats à la bombe contre les civils se multiplient ces derniers jours dans tout le pays, le plus dramatique ayant abouti à la mort de trois personnes mardi 25 mai lors d’une fête de mariage.
Un paquet piégé avait été place parmi les cadeaux et lorsque le couple a ouvert ses présents, l’explosion a tué la mariée, un cousin du marié et une invitée et blessé de nombreuses autres personnes présentes. Comme toujours dans ces attaques à la bombe des rumeurs ont circulé sur les raisons de ce triple meurtre mais rien qui soit prouvé ou confirmé.
D’autres attentats aux conséquences moins graves mais tout de même importantes ont surtout ciblés des bâtiments administratifs considérés par les militants adeptes de la violence comme des enjeux majeurs du mouvement de désobéissance civile : des écoles sont incendiées pour empêcher la reprise des classes prévue le 1er juin – celle de Kalay, dans le Sagaing, une zone où les insurgés sont très actifs, a subi une attaque à la bombe alors que des enseignants s’y trouvaient ; des bureaux des services d’électricité sont attaqués alors que de nombreuses personnes s’y trouvent, probablement pour empêcher la population de payer ses factures – à Pathein, un civil a d’ailleurs été blessé dans une telle attaque ; des bureaux de l’administration générale sont aussi régulièrement visé. L’objectif global semble être d’essayer de bloquer les institutions considérées comme essentielles. Et l’ampleur des destructions matérielles des explosions indique l’usage d’explosifs plus puissants que ceux qui étaient utilisés au début de cette tactique des bombes, ce qui marque une nouvelle étape dans l’escalade de la violence.
La population prise en otage
Dans l’autre camp, après la répression massive de mars et avril, les forces de sécurité ont adopté une méthode plus discrète, faite d’arrestation d’individus identifiés comme opposé au nouveau pouvoir, qui pour certain meurent ensuite durant leur incarcération, assassiné ou suite à des mauvais traitements. Les policiers restent aussi sur leurs gardes et font facilement usage de leurs armes : un homme se comportant de manière « étrange » aux abords d’un bureau de l‘administration générale a été abattu par les sentinelles. La victime s’est avérée être un handicapé mental inconscient du risque mortel qu’il avait pris.
Entre les deux pôles de la violence aveugle, la population est prise en otage. Et même si dans sa majorité elle a soutenu la Ligue nationale pour la démocratie (LND) et elle désapprouve le coup de force militaire, elle rejette de plus en plus les attentats à la bombe, qui l’effrayent. « Maintenant j’ai peur d’aller au marché et je ne vais plus au supermarché du tout. J’ai trop peur. Ces gens sont fous avec leurs bombes, il faut les mettre en prison », s’indigne cette employée de maison de Thingangyun. Un retraité du quartier de North Dagon confiait ainsi : « Mes trois filles sont enseignantes et elles veulent reprendre le travail. Mais elles subissent des menaces de la part d’individus qui se disent ‘des défenseurs du peuple’. Ce n’est pas juste. Nous avons voté pour Daw Aung San Suu Kyi mais nous devons être libres de décider de ce que nous voulons faire ». Et un vélo-taxi du même quartier, qui arborait un drapeau de la LND au moment des élections de novembre 2020, d’ajouter : « Ici, dans le quartier, beaucoup sont pauvres et nous avons besoin de gagner de l’argent. J’ai deux enfants. Avant je m’en sortais bien. Maintenant, c’est très dur. La grève et dire aux gens ‘ne payez pas !’ c’est bien pour ceux qui sont riches mais moi je veux travailler. Je veux que les choses redeviennent comme avant ». Sans avoir malheureusement la moindre idée de comment revenir à cet avant…