L’ONG Amel a inauguré son deuxième bus mobile éducatif au Liban. Objectif : apporter du soutien scolaire dans les camps informels de réfugiés syriens de la Bekaa-Ouest. Au total, 600 enfants vont en bénéficier.
En empruntant la route pour rejoindre la plaine de la Bekaa, les camps informels de réfugiés syriens apparaissent. 7000 ont été recensés sur l’ensemble du territoire libanais. Pour répondre à un besoin d’éducation de ses enfants fuyant la guerre, Amel a mis en place un deuxième bus mobile. Il a été inauguré le 15 mai. Dans quelques jours, 600 enfants de réfugiés syriens vont pouvoir suivre des cours.
Un bus, cinq classes de cours
Au centre médical de Kamed El Loz, une cinquantaine de personnes s’attroupe en cette matinée de printemps. Il y a l’ONG Amel, le maire du village Satti Ahmad, l’équipe médicale, l’ONG les Baroudeurs de l’Espoir, le Haut Commissariat aux Réfugiés et l’ONG Les enfants de la Méditerranée. Les patients venus consulter semblent interloquer. C’est l’inauguration du bus mobile Amel. Le premier sillonne déjà les routes du Liban-Sud et c’est un succès.
Le deuxième bus mobile va sillonner les dizaines de camps informels de la Bekaa ouest entre Kamed El Loz et Khiara. Photo Raphaëlle Talbot
Diane Antakli est la présidente et fondatrice des Baroudeurs de l’espoir. Son association a financé le bus, avec la fondation PSA Peugeot-Citroën. Tous les membres de son association sont bénévoles. Elle est originaire d’Alep, en Syrie, et témoigne de son émotion. « Le conflit (en Syrie), c’est sept ans de violence inouïe. On ne sait pas comment agir mais cette initiative permet de ne pas rester impuissant. C’est une goutte d’eau mais chaque enfant est unique », dit-elle.
L’ONG Amel a mis en place une équipe éducative. Des professeurs de la région vont travailler dans le bus. Le bus circulera dans la Bekaa-Ouest, entre Kamel El Loz et Khiara. « L’école mobile » ira deux fois par semaine dans chaque camp. Elle y restera cinq heures. A l’intérieur du véhicule, une classe de 25 élèves a été montée. Quatre tentes supplémentaires seront dépliées pour permettre à 150 enfants de profiter du cours. Au programme : soutien scolaire pour les enfants déjà scolarisés, alphabétisation pour ceux qui ne le sont pas.
Créée en 1979 pendant la guerre civile par Kamel Mohanna, Amel est aconfessionnelle et apolitique. Elle s’engage auprès des populations les plus vulnérables. L’ONG a d’abord agi dans le domaine médical ; aujourd’hui Amel se diversifie, notamment dans le domaine de l’éducation.
Le retard scolaire des 500 000 élèves syriens au Liban
« La crise syrienne est une crise des enfants », déplore Lucas Wintrebert, responsable du pôle éducation à Amel. En tout, 500 000 enfants syriens en âge d’être scolarisés (entre 3 et 18 ans) vivent au Liban.
Le système éducatif libanais était un secteur déjà affaibli avant 2011. L’arrivée des 500 000 syriens n’a pas arrangé la situation. « Dans les premiers temps, le gouvernement libanais a choisi d’inscrire ces enfants de réfugiés dans les classes avec les Libanais », salue M. Wintrebert. Mais aujourd’hui, la situation est préoccupante pour ces enfants.
En 2014, manque de places suffisantes, le gouvernement a décidé de changer sa politique. Un second créneau horaire a été créé pour les élèves syriens. C’est toujours le cas aujourd’hui, les écoles publiques restent ouvertes pour eux de 13h à 18h. A la rentrée 2016-2017, le ministère de l’éducation a déclaré que 48% des enfants syriens étaient scolarisés. Un an après, les chiffres sont montés jusqu’à 70%. Pour Lucas Wintrebert, ils sont erronés. « Il s’agit ici des enfants inscrits à la rentrée, mais rien ne prouve que ces élèves poursuivent leur scolarité. Le taux d’absentéisme est très élevé dans ces populations ».
En plus, les élèves syriens sont soumis à d’énormes difficultés, notamment dans l’apprentissage. Au Liban, le programme scolaire est bilingue en anglais en français. En Syrie, tout est en arabe. Certaines familles ne peuvent pas payer le transport pour aller à l’école. Et à cause de la guerre, des enfants ont manqué plusieurs années scolaires. « La non-mixité des classes entre Libanais et Syriens contribue au faible niveau des enfants de réfugiés », explique Lucas Wintrebert. En 2018, seulement 12% des enfants syriens ont le brevet.