Depuis plusieurs années, une autre facette est venue s'ajouter aux multiples visages qui composent la capitale allemande. Berlin, ville d'ouverture et de tolérance où cohabitent de nombreuses communautés très diversifiées, est en passe de devenir également la capitale européenne de la création et du développement des start-ups. Les différents rapports et études concernant le monde des start-ups la rapprochent toujours plus de sa principale concurrente et numéro 1 en Europe dans ce domaine; Londres. Cette prolifération du nombre de nouvelles entreprises à Berlin, dont une partie connaissent un réel succès, est devenue un véritable booster de création d'emplois aussi bien adaptés aux Allemands qu'aux étrangers vivant dans la capitale allemande et, dont la maîtrise de l'allemand est parfois insuffisante pour décrocher un job qualifié.
Quatre Français travaillant au sein de différentes start-ups fondées et établies à Berlin, ont accepté de livrer leurs témoignages reflétant aussi bien les nouvelles perspectives d'emploi que les nouvelles formes de structures d'entreprise qu'offrent les start-ups berlinoises.
Selon le dernier classement mondial (Global Ecosystem Ranking 2015 ) des villes favorables à la création et au développement commercial de start-ups, publié par la société californienne d'analyse de données Compass, Berlin se situe désormais à la 9e place derrière Seatle, Chicago et Londres, 6e meilleure ville, alors que la capitale allemande n'était encore qu'au 15e rang en 2012. Un bon en avant qui se ressent tant au niveau de l'ébullition créative de Berlin qu'au niveau du marché de l'emploi.
Souvent qualifiée de « nouvelle silicon Valley », la capitale allemande attire en effet toujours plus de jeunes créateurs d'entreprises basées sur le modèle américain des start-ups. Selon la dernière étude réalisée par Start-up Monitor et basée sur la consultation de 900 start-ups, 39 % d'entre elles ont établi leur siège à Berlin. Vient ensuite la ville de Munich avec 8 % et Hambourg avec 7 %.
Le coût de la vie, encore beaucoup moins important que dans d'autres grandes villes d'Allemagne et le nombre de jeunes diplômés venus de toute l'Europe s'installant à Berlin sont deux des nombreux facteurs d'attraction pour ceux souhaitant développer leurs idées commerciales fondées sur le modèle d'une start-up.
Par la terminaison start-up (démarrer et décoller, littéralement), les sociétés d'analyses comme Start-up Monitor, entendent la création d'une entreprise généralement en équipe (70 % d'entre elles selon l'étude de 2014) autour d'un projet commercial innovateur et détenant un fort potentiel de développement commercial qui, pour se faire, nécessite une levée de fonds.
Même si sur l'ensemble de toutes les start-ups créées à Berlin, très peu en réalité bénéficient d'un financement, le rayonnement de Berlin s'affiche au travers du nombre toujours plus important d'investisseurs en capital risque dans ces jeunes entreprises innovantes qui influent positivement sur l'économie et le marché du travail de la capitale allemande.
Les start-ups : un moteur de création d'emplois
Selon le site Startup-Berlin.com, dans la capitale allemande, une start-up est fondée toutes les 20 minutes. Bien évidemment, toutes ces créations d'entreprise ne donnent pas lieu à un développement commercial réussi, bien au contraire, mais celles qui réussissent à se développer permettent de booster le nombre d'offres d'emplois qualifiés dans des secteurs liés au web, qu'il s'agisse de référencement, de marketing ou encore de communication.
Berlin, déserté par les grandes entreprises « classiques » qui ont préféré installer leurs sièges sociaux dans d'autres villes allemandes après la Seconde Guerre mondiale, reprend donc petit à petit également son rôle de capitale économique grâce aux jeunes talents qui s'y implantent et transforment la ville en eldorado des start-ups.
Selon le dernier rapport de Start-up Monitor, environ 40 000 postes de travail pourraient être créés d'ici à 2020 grâce au développement de cette nouvelle scène berlinoise. Cela profite à la ville-Etat de Berlin qui voit sa santé économique s'améliorer lentement mais sûrement mais aussi aux expatriés en quête de jobs à Berlin.
Ainsi pour Romain, la start-up Babbel, lancée en 2008 et offrant un service d'apprentissage en ligne de différentes langues, lui a clairement donné l'opportunité de mettre à profit son apprentissage réalisé à l'Audencia Nantes School of Management sans avoir besoin de parler parfaitement la langue de Goethe. "La maîtrise de l' allemand est rarement indispensable [au sein de start-ups berlinoises, ndlr], tout se déroule en anglais", confie le manager de la TV Marketing pour différents pays.
Pour son compatriote Aurélien, évoluant au sein de la toute jeune entreprise mais déjà réputée , ce sont ces mêmes avantages qui l'ont poussé à s'installer durablement dans la capitale allemande. Venu à Berlin pour effectuer son stage de fin d'étude, en Master Finance et Stratégie à Science-po Paris, au sein de la start-up, Wimdu, le jeune Français a finalement décidé de rester à Berlin pour débuter sa carrière professionnelle. "Ayant un certain intérêt pour l'entrepreneuriat et mon allemand n'étant pas encore très bon, les start-ups m'ont semblé être la structure parfaite", commente-t-il. Mais la langue pratiquée et la croissance du secteur web ne sont pas les seuls critères d'attraction pour ces jeunes diplômés maîtrisant au minimum deux langues couramment. La philosophie du mode de travail appliquée au sein des start-ups, et importée des États-Unis, offre ce petit plus qui rompt avec la rigidité des entreprises classiques.
Une structure de travail à l'image de Berlin: décontractée et créative
Berlin est certainement une des villes européennes des plus adaptées pour accueillir le nouveau modèle économique et d'organisation professionnelle généré par les start-ups, bousculant la structure rigide et stricte de l'entreprise classique.
En visitant les locaux de certaines start-ups berlinoises déjà bien établies économiquement, comme Go Euro ou Visual Meta, l'atmosphère à la fois internationale, décomplexée, mais aussi studieuse est un des premiers aspects qui marque la différence avec une structure plus conventionnelle.
"La hiérarchie dans une start-up est beaucoup plus horizontale et chacun peut être force de proposition, explique Lucie, chargée de la communication pour le portail français Shopalike.fr de la start-up Visual Meta, l'objectif de nombreuses start-ups, comme la nôtre, est d'encourager l'implication des employés". Cela passe par une communication plus transparente, de nombreuses réunions avec la direction mais aussi la mise à disposition d'espaces de détentes qu'il s'agisse de salle de repos ou de jeux permettant ainsi aux employés de se décontracter.
La salle de jeux/détente de la start-up Visual Meta
Un autre critère définit le mode de travail au sein d'une start-up; l'évolution professionnelle plus ou moins rapide que peuvent offrir ces structures plus souples et accordant plus d'intérêt à la prise d'initiative, la compétence et la motivation qu'à l'ancienneté.
Pour Géraldine, venue à Berlin pour effectuer son stage de fin d'étude au sein d'une start-up, la décision de rester dans la capitale allemande et d'évoluer au sein d'une jeune entreprise innovatrice n'a pas été difficile à prendre. "Les start-ups offrent un aspect plus souple, parfois sans grande organisation, mais qui permet à tout employé de proposer des projets et de les voir aboutir". Depuis deux ans, elle travaille pour le site de rencontres en ligne, edarling.fr appartenant à la société Affinitas GmbH et en l'espace de quelques mois, elle a pu grimper les échelons comme il est rarement le cas dans une autre forme d'entreprise. "J'ai commencé comme stagiarie SEO/editorial pour le site français, puis ai été promue Junior Manager SEO/Editorial France avant de devenir SEO Manager pour plusieurs pays". Un bel exemple des possibilités d'évolution au sein de start-ups comme le confirme Aurélien, Head of Business Intelligence pour le site Medigo : "Dans les start-ups berlinoises, tout va très vite. Je connais énormément de personnes, moi y compris, qui se sont vues confier d'importantes responsabilités ou la direction d'une équipe très rapidement, affirme-t-il, la motivation et le « Hard work » sont parfois plus importants que des décennies d'expérience".
Les quatre français interrogés s'accordent tous sur le fait que les start-ups et les métiers du web qui y sont pratiqués sont un secteur porteur et y voient pour de nombreux nouveaux venus à Berlin une réelle chance d'y commencer une carrière professionnelle. "Je conseillerais sans hésiter à un Français maîtrisant parfaitement l'anglais et cherchant un travail, de s'orienter vers le monde des start-ups, confie Lucie travaillant pour Shopalike.fr, qui assure toutefois avoir privilégié cette société pour sa bonne ambiance, son côté international mais surtout sa stabilité financière. "Après avoir effectué mes stages dans des start-ups à la santé économique douteuse, j'ai eu envie de trouver un travail au sein d'une société stable comme Visual Meta qui est en pleine croissance".
En effet, cette start-up, à l'instar des trois autres citées, Babbel, Medigo et edarling, a rapidement connu un succès avant de bénéficier, deux ans après sa création en 2009, du soutien financier d'Axel Springer, aujourd'hui propriétaire de Visual Meta mais dont la direction est restée entre les mains des fondateurs initiaux. Cette jeune entreprise compte aujourd'hui 225 employés dont 15 français. Lancée uniquement en Allemagne la première année de création de la start-up, Visual Meta est désormais présente virtuellement dans 19 pays et compte poursuivre son développement mondial afin peut-être de rejoindre la start-up berlinoise Zalando, dont l'entrée en bourse a confirmé la force grandissante de Berlin au sein de la scène mondiale, ou encore Delivery Hero sur la liste des grands succès berlinois.
Anaïs Gontier (http://www.lepetitjournal.com/Berlin) jeudi 17 septembre 2015