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CV ou pas : gérer sa carrière, c’est choisir

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Photo by bruce mars on Unsplash
Écrit par Marion Suffert
Publié le 5 février 2019, mis à jour le 5 février 2019

Nous avons vu que souvent les techniques utilisées dans la recherche d’emploi sont un reflet de ce qu’on vit dans la recherche d’emploi. Marie invente des techniques : aller chercher les enfants à l’école, ne pas parler d’elle, oublier le CV…


Le CV est un faux ami : il tue la créativité et l’imagination, il étiquette les hommes, il les attache au passé. Le monde entier s’acharne à vous donner des conseils sur votre CV. Et le CV est toujours là… Les réseaux sociaux, l’identité digitale, la marque personnelle sont encore et toujours des héritiers du CV. Et il y a toujours un malin pour vous demander votre CV. Bon. Ben si le CV est si important, allons-y. Parlons du CV. 


Mais soyons créatif. Ou plutôt, prenons le risque de choisir, ou dit autrement, soyons prudent, et évitons que les autres choisissent pour nous. Réfléchissons un peu sur cette petite clé sur laquelle nous misons tant de rêves et tant de chances…

 

Traitement de texte du souvenir et des dates. 

Sur une ou deux pages, nous allons chercher à résumer notre vie, nos réalisations, nos exploits, nos émotions, des étapes de vie, avec du bonheur, des malheurs. Des dates qui souvent nous donnent des soucis : trop de changement, pas assez, la voie n’est pas claire, la progression n’est pas constante ou les changements injustifiables, des vides à exliquer. 

Résumer sa vie su un papier est une bonne méthode. Mais c’est une méthode pour soi. Pour reprendre, pour se rappeler, se retrouver. Après, il faut apprendre à raconter. Il faut apprendre à se vendre sur le papier. Il faut centrer. Il faut définir le message : regrouper, éliminer, amplifier, accentuer, synthétiser.

Quel message, quelle identité, quel choix voulez-vous communiquer ? 


Avant de décrire la recette du CV, étudions une hécatombe de possibles. 

 

1) Le choix du "petit Suisse" et la nounou des enfants :

 
Avant de penser au CV, pensons à un produit à positionner sur le marché. Le produit, c’est nous. Prenons que nous sommes "un petit Suisse". 

Le product manager en charge de développer l’image du "petit Suisse" étudie l’histoire du produit, ses modes de fabrication, sa valeur ajoutée, ses composantes… Au final, plein de données et de possibles arguments qu’il va pouvoir utiliser pour positionner son produit : le "petit Suisse" se transporte, il est petit, il fait grandir, il rend intelligent, il a du calcium, il peut se manger congelé, avec un petit bâton, comme une sucette, il se vend en paquet de huit, il n’est pas cher… 

Avec tous ces arguments, le product manager va devoir choisir. Il va décider l’argument qu’il va utiliser pour se faire remarquer. Il va définir des targets, un positionnement, un objectif. Il veut vendre le "petit Suisse" aux enfants en été : va pour la plage et le petit bâton. Il a choisi. En choisissant les enfants, ils renoncent à d’autres targets, et prend le risque de se tromper. 

La difficulté, c’est de choisir. Tout choix est une hécatombe de possibles. Et bien sûr, vous avez de multiples atouts…

Vous pouvez être "assistante marketing", responsable de "l’administration des ventes", adjointe du responsable du personnel, et plein d’autre choses encore. De fait, vous vous êtes toujours adapté aux nouveaux challenges, et vous êtes tout terrain. Pourquoi choisir une seule étiquette, et perdre des opportunités ? Mais à l’heure de choisir une nounou pour vos enfants, qu’est-ce que vous préféreriez ? Une dame qui a été femme de ménage, concierge, employée de bureau et baby sitter ? Ou une autre qui a gardé un enfant petit, plein d’enfants divers, des bébés à bouchonner, et des ados pour les faire étudier ? Probablement la deuxième. Et finalement c’était peut-être la même. 

Sauf qu’avant de faire le deuxième CV, la dame a réfléchi : 

Elle a réfléchi qu’elle préférait les enfants à un travail de bureau. Que les horaires lui convenaient mieux. Que sa relation avec les patrons était plus satisfaisante pour elle dans une salle à manger que derrière un ordinateur. Et qu’en plus, éduquer les enfants c’est ce qu’elle fait de mieux. Bien sûr, elle perd peut-être des opportunités d’emploi comme réceptionniste. Mais elle est unique dans son choix, dans son histoire et dans ses arguments pour son choix. Et entre la quantité et la qualité, c’est toujours la qualité qui gagne. 

Gérer sa carrière, que l’on soit femme de ménage, baby sitter, employé, cadre ou dirigeant, c’est avant tout savoir choisir. Et parfois, le CV nous aide à choisir. Surtout si on suit une bonne recette. 


2) Une recette de CV pour choisir

Etape 1 : 

Racontez, rédigez et repassez votre vie sur le papier ou sur l’écran. Après être sûr de n’avoir rien oublié, relisez, peaufinez, racontez à d’autres. Corrigez et rajoutez.
Et puis fermez l’écran ou rangez les papiers. 

Etape 2 :

Prenez un nouveau papier et un bon stylo ; celui qui glisse sur le cahier. 

Ecrivez les mots clé : les mots de l’identité que vous souhaiteriez avoir. Les verbes des actions que vous menez et que vous avez aimées. L’étiquette de ce que vous êtes professionnellement. 

Par exemple, un financier, l’homme pour la petite filiale espagnole, le troisième homme de la centrale. Celui qui range et organise. Et qui en plus adore cuisiner pour toute sa famille. 
Ou encore une passionnée du bien être dans l’environnement urbain, qui rêve d’un développement économique centré sur le bien être de l’habitant. Et qui en plus a beaucoup voyagé. Ou un autre qui se définit comme professionnel des achats et de l’export, qui aime avant tout débrouiller les longs process de cahier des charges des achats internationaux. Et qui en plus est champion de sudoku. Trouvez les tags. Et pas plus de cinq ou six tags. Le product manager vous dirait que plus de cinq tags, c’est trop difficile à cerner. 

Etape 3 :

Cherchez dans votre histoire les arguments de ces mots clés. Ordonnez-les sur le papier. 

Etape 4 : 

Cherchez la maquette pour assurer qu’on ne voit que ces mots et idées clés. (*)

Etape 5 : 

Validez avec trois copains "A quoi sert le type de ce CV ?"
 
Si on vous renvoie vos mots clés, vous avez gagné. 

(*) La maquette est importante. Elle définit le sens, les étapes, l’objectif et les choix. Les exemples de maquettes sur Internet donnent des bonnes idées. N’hésitez pas à en inventer d’autres. Il ne s’agit pas d’être original : il s’agit de donner du sens aux mots clés. 


3) Les lecteurs de CV

En document attaché, dans une archive, sur une base de données, le CV se lit en 2,5 secondes. Il ne se lit pas. Il se voit. 

On le lirait peut-être si on prétendait engager la personne. Ce n’est pas encore le cas. On veut savoir si ça vaut la peine d’en savoir plus. Si ça vaut la peine d’investir du temps au téléphone ou éventuellement dans un entretien. On cherche une marque, une couleur, une étiquette, une identité. On ouvre, on trouve ou on ferme. On cherche la réponse à une question : Il est "quoi" lui ?

Les nuances de vos réalisations et de vos fonctions que vous avez détaillées, travaillées, rédigées avec circonspection, ne seront lues que par vous… Et peut être par celui qui vous aura engagé. Après vous avoir engagé. 

On vous demande d’être clair et évident. Une étiquette, et la justification et re-justification de cette étiquette. 

La recherche du chasseur de tête chargé de trouver d’éventuels candidats pour le poste, ou le moteur de recherche de LinkedIn fonctionnent finalement de la même manière : une étiquette. Une identité. Bref, des mots clés. Ces mots clés permettent de filtrer. De filtrer ce qui ne répond pas simplement et clairement au produit recherché.


4) Et n’oubliez pas : mort au CV

Que feriez-vous si les CV n’existaient pas ? Vous feriez différemment. Vous sortiriez du système fermé de la recherche d’emploi. Vous vous éloigneriez de l’épuisement que produisent souvent les non réponses, le désintéressement et l’indifférence ressentis par l’envoi de dizaine de CV resté sans réponse. Par la sensation erronée que notre histoire n’intéresse personne. 

Internet, l’identité digitale, les tags ou "mots clés" parachèveront bientôt le règne du CV. Le CV sera remplacé par notre Web, notre blog, ou par rien. C’est Internet et notre réseau qui nous étiquetteront. Nos exploits sportifs, nos interventions publiques, notre image professionnelle. Le petit écran reflètera nos choix, amplifiera nos élections, déterminera nos opportunités. En attendant, le CV n’est pas toujours un mauvais outil. Il peut être même un très bon outil, s’il permet de regarder l’hier pour rêver et dessiner nos choix de demain. 


Marion Suffert                        
Vasis Conseil                            
http://vasis-conseil.com/    
https://www.linkedin.com/in/marionsuffert/

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