À moins de deux semaines des élections générales en Espagne, les indépendantistes tiennent toujours la corde en Catalogne.
La perspective des élections générales du 10 novembre prochain a pris une toute autre dimension depuis la sentence du Tribunal Suprême à l'encontre des leaders indépendantistes catalans, dont les partisans ont fait de cet événement le thème majeur d'une campagne. De fait, aucun débat ne peut échapper à la "question catalane". Dans la dernière ligne droite avant ces élections parlementaires, les sondages jouent évidemment le rôle de la Pythie.
Que dit l'oracle ? D'abord qu'il ne pourra y avoir de gouvernement sans alliance au lendemain du 10-N. Entre la victoire nationale de PSOE ou du PP, les dieux (enfin, les sondés) sont indécis, même si la balance penche très sensiblement en faveur du parti de Pedro Sanchez, selon la dernière enquête publiée par le très controversé Centre d'Investigations Sociologiques (CIS) ; le PSOE obtiendrait ainsi entre 133 et 150 sièges sur les 350 fauteuils du parlement espagnol, d'après ce sondage réalisé entre le 21 septembre et le 13 octobre, c'est à dire avant la sentence du Tribunal Suprême. La carte des résultats estimés dessinée par le CIS partage la Catalogne entre le parti indépendantiste Esquerra Republicana de Catalunya (ERC) et le Parti Socaliste Catalan (PSC). La formation indépendantiste de Gabriel Rufian (ostensiblement pilotée par Oriol Junqueras depuis la prison de Lledoners) obtiendrait la part du lion en Catalogne avec une quinzaine de députés, contre une douzaine pour le PSC (surtout dans la province de Tarragonne).
Émergence de la CUP
Reste à savoir quelles seront les conséquences sur le vote du jugement des leaders indépendantistes et des mouvements de protestation de ces derniers jours en Catalogne... Une première piste est donnée par une autre étude réalisée au lendemain de la sentence du Tribunal Suprême (du 21 au 25 octobre) par le Cabinet d’Études Sociales et d'Opinion Publique (GESOP). Ce sondage centré sur la Catalogne ne dément pas les grandes lignes de l'enquête du CIS, avec 14 à 15 sièges pour ERC et 11 à 12 élus pour le PSC. En revanche, la tendance est ici à une légère érosion d'ERC comme de l'autre grand parti indépendantistes Junts Per Cat (JXCat), de Carles Puigdemont et du président le la Generalitat Quim Torra, ainsi que En Comun Podem (ECP), représentant de "Unidas Podemos" en Catalogne. Et ce fléchissement participerait à l'élection de quatre députés de la CUP, parti indépendantiste d'extrême gauche, qui ferait une entrée remarquée au parlement espagnol. Ciutadans, le Parti Populaire et Vox obtiendrait des résultats résiduels en Catalogne, avec au mieux deux députés chacun.
La CUP apparaîtrait ainsi comme le bénéficiaire d'une agitation qui promet de perdurer jusqu'au jour du vote, et au delà. À ce propos, la plate forme Tsunami Democratic a déjà annoncé des actions de protestation pour le traditionnel "jour de réflexion" de la veille du scrutin, c'est à dire le 9 novembre prochain. L'émergence d'une gauche indépendantiste plus intransigeante laisse aussi peu d’espoirs de négociation en Catalogne au futur président du gouvernement, même si l'option n'est de toutes façons pas prise actuellement en considération, pas plus par le PSOE que le PP.