Des manifestants anti-gouvernementaux ont habillé le monument de la Démocratie, samedi, pour demander l’abolition de la loi de lèse-majesté et la libération de leurs camarades
Plusieurs centaines de jeunes thaïlandais ont manifesté samedi dans le quartier historique de Bangkok pour protester contre la loi de lèse-majesté en recouvant le Monument de la démocratie d'un tissu de couleur pourpre de 30 mètres de côté.
Les militants ont déclaré que le rouge sur le monument représentait le sang des combattants pour la démocratie.
Un peu plus tard dans la soirée, de brefs affrontements ont eu lieu avec la police à quelques centaines de mètres de là, au Sanctuaire du pilier de la cité.
Alors que les manifestants se dirigeaient vers le Palais royal, ils ont été stoppés par des barbelés et des barrages avec des policiers en tenue antiémeute entourant la zone.
Après des négociations, les policiers ont escorté quatre militants vers le Sanctuaire du pilier de la cité, lieu spirituel de la capitale considéré comme un lieu protecteur du pays, où ces derniers ont procédé à un rituel pour protéger les citoyens qui se battent pour défendre leurs droits.
Un peu plus tard, alors que les leaders avaient appelé à la dispersion de la manifestation, des protestataires ont jeté de la peinture sur les forces de l’ordre et plusieurs détonations ont été entendues.
Selon le porte-parole adjoint de la police, Kissana Pattanacharoen, plus de 20 policiers auraient été blessés dans les affrontements et sept ou huit personnes ont été arrêtées pour interrogatoire. Il a également déclaré qu'au moins un engin artisanal, gros pétard ou bombe ping-pong, avait explosé sur les lieux.
Le journal Bangkok Post rapporte par ailleurs qu’un volontaire médical a été tabassé par des policiers l’ayant pris pour un manifestant hostile.
La manifestation était organisée en réaction aux arrestations mardi de quatre figures du mouvement de contestation, accusées d'avoir insulté la monarchie lors des grandes manifestations antigouvernementales l'année dernière.
La loi dite de "lèse-majesté", qui correspond à l'article 112 du code pénal thaïlandais, prévoit des peines allant de 3 à 15 ans de prison par chef d’accusation.
Les militants étudiants estiment que la loi est instrumentalisée depuis des décennies pour museler et éliminer l'opposition politique à l’établishment militaro-royaliste.
"Nous voulons que l'article 112 soit aboli et aussi que quatre de nos leaders et les autres prisonniers politiques condamnés par cette loi soient relâchés", a déclaré Chutima Kaenpetch, une manifestante de 24 ans.
Le gouvernement dirigé par l'ancien chef de la junte militaire, Prayuth Chan-O-Cha, nie tout abus de la loi, affirmant que l'opposition politique est autorisée du moment qu’elle s’exprime dans le respect du cadre légal, et que toute violation de la loi, comme insulter le roi, sera punie.
La Thaïlande est officiellement une monarchie constitutionnelle, mais la tradition thaïlandaise voue au roi un culte particulier et lui confère un statut quasi-divin, le présentant comme le protecteur de la religion bouddhiste et de la nation.
Le mouvement étudiant qui a émergé l'année dernière a osé briser le vieux tabou interdisant la moindre remise en question en public de la royauté. Ceux qui représentent la nouvelle génération de militants pro-démocratie estiment entre autre que le roi Maha Vajiralongkorn a accumulé trop de pouvoir depuis son accession au trône après la mort de son père en 2016, et demandent notamment à ce que les prérogatives du monarque soient encadrées par la Constitution.