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L'image du roi essaime dans toute la Thaïlande avant le couronnement

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Pierre QUEFFELEC

Il a fallu 5.700 euros et 12 heures de route pour que le maire de la commune aille récupérer l’autel et le majestueux portrait du roi de Thaïlande qui se dresseront au cœur de la ville - une infime partie de la publicité massive du palais pour le couronnement de ce week-end.

"Tous les bureaux gouvernementaux à travers le pays feront de même", explique Aunchalee Chamchang, maire de Thungkhanan, un groupement de villages à l'est de la capitale.

Les portraits du roi Maha Vajiralongkorn, souvent vêtus d'une robe dorée regardant fixement devant lui d’un œil insondable, ont été placés dans de nombreux bureaux de l'État depuis son accession au trône en 2016.

Mais de nouvelles images imposantes, atteignant plusieurs mètres de haut, et des décorations sont obligatoires dans tous les bureaux de l’État avant le sacre de trois jours, qui commence ce samedi.

Les ensembles les plus élaborés comprennent le portrait au cadre doré, un imposant piédestal, des drapeaux, des «pan phum» sortes de tributs floraux en forme de cône et des banderoles en plusieurs nuances de jaune, couleur de la monarchie thaïlandaise.

Ils peuvent coûter des milliers de dollars, financés par les budgets locaux et des subventions, et resteront en place pendant au moins le reste de l'année.

Les axes routiers à Bangkok et à travers le royaume sont désormais flanqués de la projection du pouvoir royal, censée refléter la dévotion du pays, sa loyauté et son respect envers le monarque.

Mais comme les Thaïlandais ne sont jamais loin du regard des portraits du roi, cela sert aussi à rappeler la position dominante dont jouit l'institution royale.

Les critiques vis-à-vis de la monarchie sont rarement entendues dans le pays où la famille royale est protégée par la très sévère loi de la lèse-majesté qui prévoit des peines allant jusqu'à 15 ans de prison.

La loi est souvent interprétée de manière large et inclut l'utilisation inappropriée d'images royales.

Les médias basés en Thaïlande doivent s'autocensurer.

Films, billets de banque et timbres

Pour la majorité des Thaïlandais, ce couronnement très élaboré de trois jours sera le premier qu'ils aient vu et l’on peut sentir la curiosité grandir.

Son père Bhumibol Adulyadej est décédé en 2016 après un règne de sept décennies tumultueuses.

Bhumibol était considéré comme un personnage unificateur dans un pays politiquement divisé et son image reste omniprésente dans de nombreux foyers et magasins thaïlandais.

Après sa mort, les Thaïlandais ont porté des couleurs noires ou sombres durant le deuil officiel d’un an.

Mais l'héritier de Bhumibol, âgé de 66 ans, est moins connu de ses sujets et passe une grande partie de son temps à l'étranger.

Pour combler cet écart, l'image du nouveau roi s'est lentement installée dans la vie quotidienne - sur les bâtiments, les billets de banque et les timbres - depuis la mort de son père.

Un court métrage accompagnant l'hymne royal qui se déroule avant les films projetés dans les cinémas thaïlandais retrace désormais l'histoire de Vajiralongkorn, un prince devenu moine, pilote de l'armée de l'air, père puis roi.

Selon Edoardo Siani, chercheur en études du Sud-Est asiatique à l'Université de Kyoto, les successions royales sont partout confrontées à une iconographie changeante.

"L’État thaïlandais a réglé ce problème en introduisant progressivement des images du nouveau roi sur une longue période", a-t-il déclaré.

La junte qui a pris le pouvoir en 2014 a dirigé la campagne d’image, tandis que le puissant chef de l’armée a prononcé plusieurs serments de loyauté au cours des dernières semaines.

Les fonctionnaires ont reçu l'ordre de porter du jaune avant le couronnement, mais la couleur liée au jour de naissance du roi, le lundi, n'a pas encore totalement imprégné la ville.

Traversant le cœur historique en tricycle, qui fait aussi état d’autel ambulant à la gloire de la monarchie thaïlandaise, exhibant une multitude de portraits des rois passés et présents, Komchit Kraithong se dit très enthousiasmé par ce grand événement.

"Je l'ai décoré de portraits pour montrer ma loyauté", a-t-il déclaré à l'AFP.

"C'est aussi comme si je servais leurs majestés en les promenant dans Bangkok."
 

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