Le roi de Thaïlande Maha Vajiralongkorn a écrit des messages d'amour et d’unité nationale lors d'une visite mardi dans le nord-est du pays, deux jours après que les manifestants lui ont déposé devant le Grand Palais une lettre demandant des réformes qui limiteraient ses pouvoirs.
Le Palais royal s’est gardé de tout commentaire sur les manifestations depuis leur début en juillet. De fait, la moindre forme d’expression du roi est scrutée attentivement dans le royaume.
"Nous nous aimons tous et nous nous soucions les uns des autres. Prenez soin du pays, aidez-vous les uns les autres à protéger notre pays avec bonté pour la prospérité et pour protéger la thaïté", a écrit le roi dans un message au gouverneur de la province d'Udon Thani.
Sur une photo de lui-même et de la reine apportée par un sympathisant, le roi a écrit: "Aimez la nation, aimez le peuple, chérissez la thaïté, le vrai bonheur".
Des milliers de manifestants ont défilé dimanche du Monument de la démocratie jusque devant le Grand Palais de Bangkok, bravant un barrage policier muni de canons à eau, pour transmettre un message au souverain.
"Quand le roi chérira vraiment la démocratie, tout le monde trouvera le bonheur", ont déclaré les protestataires dans une déclaration lue à quelques dizaines de mètres des murs du Grand palais, où ils ont été stoppés par un important dispositif de police.
La semaine dernière, le roi avait fait ses tout premiers commentaires sur le mouvement de contestation qui a brisé un vieux tabou en demandant en août des réformes de la monarchie pour limiter ses pouvoirs.
Dans de brèves remarques obtenues de manière très inhabituelle depuis la foule par un journaliste britannique, le roi avait déclaré "nous les aimons quand même" avant de dire que la Thaïlande était une terre de compromis.
Des photos de différents événements royaux à Udon Thani montrent une foule de plusieurs milliers de personnes, beaucoup portant des vêtements jaunes - la couleur du roi - et brandissant des portraits officiels du couple royal.
Après le coup d’Etat de 2014, l’un des chantiers de la junte militaire dirigée par l’actuel Premier ministre Prayuth Chan-O-Cha, a consisté à marteler des valeurs telles que le patriotisme, l’amour de la royauté et le respect des valeurs traditionnelles à travers des reformes sur les manuels scolaires, de nouveaux codes de conduite et toute une série de campagnes de relations publiques. Des valeurs présentées comme indissociables et constitutives de la notion de "Thaïté" ("kwarm pen Thai" ou ce qui fait que l’on est Thaïlandais).
Une idée largement véhiculée dans les milieux ultra-conservateurs thaïlandais est que l’amour et l’allégeance à la royauté sont des éléments fondamentaux de l’identité thaïlandaise, et par conséquent, quiconque critique la monarchie ne saurait être considéré comme thaïlandais et est un ennemi potentiel de la nation.
Au mois d’août, peu après l’appel inédit des manifestants à des réformes de la monarchie, l’ex-chef de l’armée, le général Apirat Kongsompong, avait déclaré que "haïr la nation, haïr son propre pays, [était] une maladie incurable", dans un discours devant des cadets de l'armée.