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Le blocage des aéroports de Bangkok porte un mauvais coup au tourisme

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Jean-Louis DUZERT - Crise politique et tourisme ne font pas bon ménage, surtout lorsque les manifestants décident de prendre les vacanciers en otage
Écrit par La rédaction de Bangkok
Publié le 27 novembre 2008, mis à jour le 6 mars 2019

L'escalade de la crise politique, qui a débouché mardi sur la fermeture de l'aéroport international de Bangkok, risque de porter un coup très dur à l'imposante industrie du tourisme du royaume qui accuse déjà les effets de la crise financière mondiale. Les professionnels sont très pessimistes. L'indice de croissance a été revu à la baisse

Les images des visages déconfits de voyageurs coincés dans l'aéroport de Suvarnabhumi alternant avec la marée jaune de manifestants installés à l'extérieur ont déjà fait le tour du monde.

"En quoi cela affecte-t-il l'industrie du tourisme ? Eh bien elle est dévastée", estime le président de l'association des agents de voyages thaïlandais, Apichart Sankary. Selon lui, les étrangers ont perdu leur confiance dans les voyages en Thaïlande et le pays du sourire n'atteindra pas cette année son objectif de 15 millions de visiteurs étrangers et de 600 milliards de bahts de revenus issus du tourisme. "Nous allons souffrir car nous ne savons pas quand l'aéroport sera de nouveau ouvert ou quand le problème sera résolu", ajoute-t-il, tout en reconnaissant qu'il est encore trop tôt pour estimer l'ampleur des pertes.

Triple malédiction

Pour le directeur de PATA (Pacific Asia Travel Association), Dale Lawrence, "ce n'est pas une double mais une triple malédiction". L'augmentation du prix du pétrole avait déjà fait baisser de 33% les arrivées du mois d'août à l'aéroport de Suvarnabhumi par rapport à l'an dernier. Dale Lawrence rappelle que le tourisme avait été peu affecté par les manifestations qui durent depuis six mois. "Cela a complètement changé la nuit dernière,"dit-il, faisant remarquer que le blocage de l'aéroport vient s'ajouter à l'impact de la crise financière et celui de la mauvaise image issue des manifestations précédentes. Pour autant, le directeur de PATA ne craint pas une annulation en masse des gens ayant déjà acheté leurs billets d'avion : "Les voyageurs en provenance d'Europe forment le gros des troupes des touristes et s'ils ont réservé un séjour de deux semaines en Thaïlande, à moins que la troisième guerre mondiale ne se déclare, ils viendront très probablement".

Croissance revue encore à la baisse

Selon le secrétaire général adjoint de la Fédération des Industries Thaïlandaises Thanit Sorat, l'arrêt temporaire des services de fret aérien de l'aéroport a entrainé de lourdes pertes de marchandises surtout les produits périssables. Le montant des pertes financières a été estimé à 1 milliard de bahts par jour.

Le ministre des Finances Suchart Thada-Thamrongvech a quant à lui indiqué hier qu'en raison de la baisse prévue de la fréquentation touristique et de la confiance des investisseurs, son ministère avait dû revoir ses prévisions à la baisse pour 2009, tablant désormais sur une croissance de l'ordre de 2.5% à 3% pour l'an prochain.

Le tourisme compte pour 6% dans l'économie thaïlandaise. 14.8 millions de touristes ont visité la Thaïlande en 2007 et le tourisme apporte des milliards de dollars à la Thaïlande chaque année. La Thaïlande est la deuxième destination asiatique pour les touristes français (370.000 visiteurs en 2007), et la première pour les Belges (60 à 80.000 en 2007 selon l'Ambassade). Lire aussi : L'aéroport de Bangkok fermé, violences dans la rue

M.R. et P.Q. (http://www.lepetitjournal.com/bangkok.html avec AFP) jeudi 27 novembre 2008

Plusieurs pays mettent en garde leurs ressortissants

Plusieurs pays ont diffusé ces derniers jours des avis de mise en garde conseillant à leurs citoyens de changer leurs projets de voyage en Thaïlande ou d'agir avec précaution. L'Australie, les Etats-Unis et le Japon conseillent à leurs ressortissants d'éviter les zones de manifestations et de s'informer auprès des compagnies aériennes s'ils doivent passer par Bangkok. La Chine, la Nouvelle-Zélande, Singapour et la Grande-Bretagne invitent leurs compatriotes à différer leur voyage en Thaïlande jusqu'à ce que la situation politique s'apaise. La France a recommandé à ses ressortissants se trouvant hors de la Thaïlande d'éviter le royaume jusqu'à la réouverture de l'aéroport International. "Nous faisons tout pour venir en aide à nos compatriotes retenus dans les différents aéroports ou empêchés d'accéder à leurs vols", a déclaré le Quai d'Orsay lors du point de presse électronique régulier. L'ambassade de France, qui a ouvert une cellule de crise mardi, en coordination avec les autres représentations européennes, ne disposait pas hier de chiffres concernant le nombre de Français coincés à Suvarnabhumi. Mais selon le Quai d'Orsay, au moins 200 Français étaient bloqués hier matin à l'aéroport de Don Muang. Le Centre de crise du ministère des Affaires étrangères et européennes a de son côté ouvert une "cellule de réponse téléphonique"pour les Français, joignable au 01.45.50.34.60. L'Ambassade de France met régulièrement à jour des informations sur son site Internet (conseils de voyages, numéros utiles, etc.) http://www.ambafrance-th.org/
L'Ambassade de Belgique, quant à elle, a envoyé sur place hier la vice-Consul, Anna Hajdu, qui a répertorié 46 de ses ressortissants répartis en deux groupes venus en voyage organisé, selon le Conseiller de l'Ambassade Michaël Wimmer. Le consulat belge met à disposition un numéro d'urgence 24/24 :  +66 (0)8 18 33 99 87 , et met régulièrement à jour sur son site Internet ses conseils aux voyageurs.

Nous n'avons pu joindre l'Ambassade de Suisse hier, mais des dépêches de l'agence AP faisait hier état de 500 helvètes coincés en Thaïlande. L'Ambassade du Canada nous a dit avoir reçu plusieurs appel mais aucun cas d'urgence. Elle invite ses ressortissants à consulter sur son site Internet ses avertissements et recommandations aux voyageurs  

Des voyageurs français libérés après une nuit difficile

La plupart des voyageurs bloqués mardi et hier dans la zone de pré-embarquement de l'aéroport de Suvarbabhumi ont été évacués hier et dirigés vers des hôtels. L'attente toute la nuit de mardi à mercredi sans information ni ravitaillement a été pénible pour beaucoup. Un peu moins pour ceux habitués aux grèves intempestives. Deux Français nous racontent leur aventure

L'hébétude des voyageurs, coincés et abandonnés mardi soir par le personnel de l'aéroport entre les portiques de l'immigration et les terminaux d'embarquement, contrastait hier avec l'ambiance plutôt bon enfant au sein des manifestants : dans l'esprit de kermesse populaire qui régnait au siège du gouvernement ces derniers mois. Mais au fur et à mesure que la journée avançait, l'atmosphère s'est tendue, les touristes commençant à s'énerver, après avoir passé quasiment 24h dans l'aéroport. Certains ont déploré l'absence d'information, d'eau et de nourriture.

Aux petits soins avec la THAI

"Les conditions étaient déplorables dans l'aéroport, s'est plaint Jean McCartan, une retraitée Ecossaise. Tous les restaurants et les magasins ont fermé". Des membres de l'APD ont essayé d'expliquer la situation, et ont distribué de la nourriture (et aussi des applaudisseurs !).

Gérard Alaniou fait partie d'un groupe de Français qui a passé la nuit bloqué dans la zone internationale. "On est arrivés [mardi] soir pour prendre notre avion. Juste avant nous, des vols pour Zurich, Tokyo et le vol d'Air France pour Paris sont partis. Nous étions dans la salle de pré-embarquement quand ils nous ont dit que notre vol était annulé. Ils nous ont installés dans le salon de la THAI, on y a dormi sur la moquette. Le personnel nous a apporté des boissons chaudes, des biscuits, [hier] matin un petit déjeuner, et à midi un déjeuner".

Vincent Renard était avec un autre groupe de 18 touristes français venus de Normandie. En voyage au Cambodge, ils devaient regagner la France mardi soir, via Bangkok. Ils se sont retrouvés coincés dans la zone de transit international de l'aéroport avec environ 3 à 4.000 personnes. Ils n'ont pu sortir de cette zone que mercredi en milieu de journée, pour être conduits dans un hôtel.

Vaccin SNCF

"Quand on est arrivé, on nous a parlés de retards d'avion, explique le Français, nous avions appris par TV5 Monde qu'il y avait des manifestations. Après ça, on se serait crus en France pendant des grèves de la SNCF, nous n'avions aucune information, rien du tout. On est restés toute la nuit dans l'aéroport. Au bout d'un certain temps ils nous ont nourris tout à fait correctement, le temps qu'ils s'organisent. Ce n'est pas facile avec 4-5000 personnes, dit-il. Mais ils ont l'air passablement débordés. Nous n'avons eu absolument personne parlant français, poursuit-il, et comme nous ne parlons pas très bien anglais, on a eu du mal à saisir quelle était la situation. Finalement on a réussi à comprendre qu'ils voulaient la démission du premier ministre, donc ils ont pris l'aéroport en otage et les passagers avec. Le problème c'est qu'on ne sait pas du tout ce qu'ont fait les autorités françaises. L'ambassade brille par son absence".

Peu avant 13h, des centaines de passagers ont commencé à être évacués lentement vers la ville à bord d'autobus. Au moment de l'évacuation des voyageurs, alors qu'il ne restait plus que les gens de l'APD, un sentiment d'inquiétude était perceptible parmi les manifestants, la peur d'une évacuation violente. Vers 21h, il restait encore quelques voyageurs qui n'avaient pas été informés de l'évacuation.

E.M. et P.Q. (http://www.lepetitjournal.com/bangkok.html avec AFP) jeudi 27 novembre 2008

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